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Le 23 octobre 2020

 

Par acte sous seing privé du premier janvier 2000, madame G. a consenti à madame Rosa L. la location d'une villa sis [...].

Par un nouveau contrat du 5 septembre 2001, madame G. a loué à madame L. le même bien pour une durée de six ans.

Par suite des termes d'un legs qui avait été consenti par monsieur Elihu G. à madame G. épouse R. et monsieur Vincent R., prévoyant l'attribution de l'usufruit de ce bien au couple R. et la nue-propriété de ce bien à la commune de Vallauris, avec mention que celle-ci serait propriétaire au décès du dernier usufruitier, la commune de Vallauris est devenue pleinement propriétaire du bien à compter du 9 décembre 2001.

Par acte d'huissier du premier mars 2019, la commune de Vallauris a fait délivrer à madame L. un congé pour motif légitime et sérieux à effet au 4 septembre 2019.

Par acte d'huissier du premier avril 2019, madame L. a fait assigner la commune de Vallauris, prise en la personne de son maire, aux fins de voir déclarer nul et de nul effet le congé qui lui a été délivré et la condamner à lui verser une indemnité fondée sur l'article 700 du code de procédure civile.

Par jugement contradictoire du 17 octobre 2019, le tribunal d'instance d'Antibes a :

  • dit que le maire de la commune disposait par délégation du conseil municipal du pouvoir de délivrer un congé pour motif légitime et sérieux
  • constaté que le bail conclu entre Madame G. et Madame L. le 05 septembre 2001 pour six ans a été renouvelé tacitement pour expirer à nouveau le 04 septembre 2019 à minuit
  • constaté que Madame L. a manqué gravement à ses obligations de locataire en modifiant les lieux loués sans l'autorisation nécessaire du bailleur
  • dit que le congé délivré le premier mars 2019 par la commune de Vallauris est valable en droit et fondé
  • constaté la résiliation du bail dont bénéficiait Madame L. à effet au 04 septembre 2019
  • dit que Madame L. est occupante sans droit ni titre des lieux depuis le 05 septembre 2019
  • ordonné l'expulsion de Madame L. et de tous occupants de son chef, au besoin avec le concours de la force publique, faute pour elle d'avoir libéré les lieux sis [...], dans le délai de deux mois après le commandement prévu par les articles L 411-1 et L 42161 du code des procédures civiles d'exécution
  • débouté la commune de Vallauris de sa demande de réduction du délai d'expulsion
  • dit valable la clause pénale prévoyant la fixation de l'indemnité d'occupation au double du loyer
  • condamné Madame L. à payer à la commune de Vallauris une indemnité d'occupation de 865,96 euros par mois à compter du 05 septembre 2019 jusqu'à parfait paiement
  • condamné Madame L. à payer à la commune de Vallauris la somme de 1000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile
  • dit n'y avoir lieu à exécution provisoire
  • rejeté toutes autres demandes plus amples ou contraires
  • -condamné Madame L. aux dépens..

Appel a été relevé.

Sur le pouvoir du maire de la commune de Vallauris à délivrer un congé

Le bail initial conclu le 05 septembre 2001, d'une durée de six ans, est tacitement renouvelable. Sa durée n'excédait donc pas douze ans.

C'est par des motifs pertinents en fait et en droit que le premier juge, faisant valoir que le maire, qui disposait d'une délégation pour décider de la conclusion et de la révision du louage de choses pour une durée n'excédant pas 12 ans, en application de l'article L 2122-22-5° du Code général des collectivités territoriales, alors que le bail tacitement renouvelé n'avait pas une durée excédant 12 ans, pouvait, dans ce cadre, ne pas renouveler l'engagement de location et délivrer en conséquence un congé pour motif sérieux et légitimes.

Le jugement déféré est confirmé sur ce point.

Par ailleurs et contrairement à ce qu'indique madame L., la mairie, bailleur, pouvait utiliser le procès-verbal dressé par l'agent communal venu à son domicile et relatant des infractions en matière d'urbanisme, cet élément servant de socle à son congé pour motifs légitimes et sérieux. Ce congé n'encourt pas plus, de ce fait, la nullité.

Sur les motifs sérieux et légitimes du congé :

En application de l'article 15 de la loi du 6 juillet 1989, lorsque le bailleur donne congé à son locataire, ce congé doit être justifié soit par sa décision de reprendre ou de vendre le logement, soit par un motif légitime et sérieux, notamment l'inexécution par le locataire de l'une des obligations lui incombant. Le délai de préavis est de six mois.

Comme l'indique avec justesse le premier juge, il ne s'agit pas de vérifier si les travaux auxquels la locataire a procédé consiste ou non en des manquements aux règles de l'urbanisme mais si ces derniers s'analysent en une violation par la locataire de ses obligations.

En vertu de l'article 7 de la même loi, le locataire a pour obligation de ne pas transformer les locaux et équipements loués sans l'accord écrit du propriétaire; à défaut de cet accord, ce dernier peut exiger du locataire, à son départ des lieux, leur remise en l'état ou conserver à son bénéfice les transformations effectuées sans que le locataire puisse réclamer une indemnisation des frais engagés ; le bailleur a toutefois la faculté d'exiger aux frais du locataire la remise immédiate des lieux en l'état lorsque les transformations mettent en péril le bon fonctionnement des équipements ou la sécurité du local.

Le bail du 5 septembre 2001, conclu moyennant une somme mensuelle de 2.000 francs, mentionnait que le locataire a procédé à la 'remise total en état des lieux'.

Ce même bail désignait le bien loué de la sorte : villa sur terrain de 800 m² environ comportant au rez-de-chaussée cinq pièces, une cuisine, une salle de bain, une buanderie, une terrasse couverte de 50 m², deux garages, une cave et une piscine. Au premier étage, le bien loué comporte trois pièces, une cuisine, une salle de bain et un balcon.

Le congé pour motif légitime et sérieux délivré pour le 4 septembre 2019 à minuit évoque des transformations importantes du bien sans autorisation du bailleur, des manquements aux règles de l'urbanisme ( réalisation d'une extension en limite de propriété; construction d'une piscine; imperméabilisation du sol; changement partiel d'affectation du garage; réalisation d'une cuisine d'été et mise en place de clôtures occultantes) et un défaut de paiement des loyers.

Devant la cour, madame L. produit un état des lieux datant du 05 septembre 2001 intitulé 'état des lieux après travaux'.

Elle démontre par ce dernier que la cuisine extérieure existait déjà lors de la conclusion du bail du 5 septembre 2001, tout comme le bar extérieur et les extensions. Toutefois, rien n'était mentionné s'agissant de la structure qui recouvrait la terrasse.

Le bail du 5 septembre 2001 qui mentionnait 'remise total en état des lieux', sans autre précision, alors qu'une remise en état avait déjà été effectuée comme le témoigne l'état des lieux produit au débat, ne permettait pas à madame L. de continuer, sans autorisation du bailleur, à procéder à des transformations du bien loué.

Le bailleur, devant la cour, n'évoque plus la difficulté relative à l'impayé locatif qui a été réglé.

Il est établi qu'en 2003, madame L. a transformé sans autorisation du bailleur l'un des garages en pièce à vivre en faisant notamment installer une baie vitrée au lieu et place de la porte pleine du garage existant. Cette pièce est accessible par l'aménagement d'une porte au fond du garage.

Il est également établi qu'elle a transformé sans autorisation du bailleur l'appartement de cinq pièces du rez-de-chaussée en un appartement de trois pièces, et ce, postérieurement au mois de décembre 2001 (date à laquelle la mairie est devenue propriétaire du bien). Cela résulte de la description des lieux qui avait été faite dans un rapport du 31 janvier 2002 par un agent communal et qui évoque bien cinq pièces au rez-de-chaussée. En avril et septembre 2017, le rez-de-chaussée comportait toujours trois pièces. L'argument de madame L. selon lequel il s'est uniquement agi d'enlever ou de remettre une cloison non porteuse n'enlève rien au fait qu'il s'agit d'une transformation des lieux et non d'un simple aménagement.

Enfin, s'agissant de la couverture de la terrasse, la seule attestation de madame D. veuve R. qui indique, pour avoir vécu dans le rez-de-jardin de la maison de 1973 à 1997 avoir constaté en 'rendant visite à Madame L. [sans que la cour connaisse la date de cette visite] , que ces éléments [ patio; terrasse extérieure; cuisine d'été] ont subi des modifications mineures dues à la vétusté de la terrasse notamment en ce qui concerne la couverture du toit de celle-ci qui a juste été rénovée comme à l'origine' est insuffisante pour démontrer que madame L. n'a procédé à aucune transformation de la couverture de la terrasse. Il ressort en revanche des autres pièces produites que la couverture, que madame L. indique avoir remise en état car elle menaçait de s'effondrer (courrier du 11 janvier 2019; pièce 10 de l'appelante), a subi une réelle transformation, faite sans autorisation du bailleur. Comme le souligne très justement le premier juge, il y a eu construction d'une toiture en dur, ce qui n'était pas le cas auparavant.

Il est démontré par la commune de Vallauris Golfe Juan que madame L. ne s'est pas contenté, comme elle en avait le droit, de procéder à de simples aménagements au sein du bien loué, mais a procédé, et en tout cas depuis que la commune est devenue propriétaire, à de véritables transformations du bien, sans autorisation du bailleur, ce qui constitue des violations de ses obligations de locataire, peu importe que les travaux apportent pour certains une amélioration au local et qu'elle a remis le garage dans sa configuration d'origine.

Dès lors, il convient de déclarer valable le congé pour motif sérieux et légitime qui lui a été délivré.

Le jugement est en conséquence confirmé sur ce point, tout comme il sera confirmé lorsqu'il dit que madame L. est occupante sans droit ni titre depuis le 5 septembre 2019 et qu'il a ordonné son expulsion.

Référence: 

- Cour d'appel d'Aix-en-Provence, 1re et 7e chambres réunies, 15 octobre 2020, RG n° 19/16863