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Le 23 octobre 2020

 

A la suite d'un démarchage à domicile, Mme Françoise Le B. a, selon 'demande de candidature au programme maison verte' du 17 juillet 2012, commandé à la société France Solaire Energie (la société FSE) la fourniture et l'installation de 16 panneauxphotovoltaïques, moyennant le prix total de 21.500 EUR TTC.

En vue de financer cette opération et suivant offre acceptée le même jour, la société Banque Solfea (la société Solfea) a consenti à Mme Le B. un prêt de 21 500 euros au taux de 5,79 % l'an remboursable en 158 mensualités de 228,65 euros, puis une mensualité de 112,80 euros, assurance emprunteur comprise, après un différé d'amortissement de 11 mois.

Les fonds ont été versés à la société FSE au vu d'une attestation de fin de travaux du 17 août 2012.

Prétendant que le bon de commande était irrégulier et qu'en méconnaissance du contrat, l'installation n'avait jamais été mise en service en vue de la revente de l'électricité produite, Mme Le B. a, par acte du 14 février 2017, fait assigner Mme H.-E., ès-qualités de mandataire liquidateur de la société FSE dont la liquidation judiciaire a été prononcée par jugement du tribunal de commerce d'Evry du 21 septembre 2015 et la société Solfea devant le Tribunal d'instance de Vannes, en annulation des contrats de vente et de crédit, remboursement des sommes déjà versées à la banque, et en paiement de dommages-intérêts.

La société BNP Paribas Personal Finance (la BNP) est intervenue ensuite volontairement aux droits de la société Solfea.

La cour d'appel a confirmé l'annulation des contrats de vente et de crédit.

Et concernant la restitution du capital prêté

Aux termes des dispositions de l'article L. 311-32 devenu L. 312-55 du Code de la consommation, le contrat de crédit affecté est résolu ou annulé de plein droit lorsque le contrat en vue duquel il a été conclu est lui-même judiciairement résolu ou annulé.

Il n'est pas contesté que le crédit consenti par la société Solfea est un crédit accessoire à une vente ou à une prestation de services.

En raison de l'interdépendance des deux contrats, l'annulation du contrat principal conclu avec la société FSE emporte donc annulation de plein droit du contrat accessoire de crédit conclu par Mme Le B. avec la société Solfea.

Il convient donc de confirmer le jugement en ce qu'il a constaté l'annulation de plein droit du contrat de crédit conclu le 17 juillet 2012 entre Mme Le B. et la société Solfea.

La nullité du prêt a pour conséquence de remettre les parties dans leur situation antérieure, de sorte que celle-ci doit, sauf faute du prêteur, entraîner la restitution des prestations reçues de part et d'autre, c'est à dire du capital versé par le prêteur et des échéances réglées par l'emprunteur.

A cet égard, la BNP sollicite l'infirmation du jugement en ce qu'il a retenu des fautes la privant de son droit à restitution du capital emprunté, en faisant valoir que la société Solfea n'étant pas partie au contrat principal, elle n'était pas tenue de vérifier la régularité du bon de commande, ni tenue à une obligation de conseil, celle-ci n'ayant pas à supporter la responsabilité du fait du vendeur, et, d'autre part, qu'elle a libéré les fonds sur remise d'une attestation de fin de travaux signée de Mme Le B. lui donnant ordre de débloquer les fonds, de sorte que cette dernière n'était plus recevable à soutenir ensuite, au détriment du prêteur, que la prestation de service n'avait pas été exécutée.

Mme Le B. conclut quant à elle à la confirmation de la disposition du jugement attaqué l'ayant dispensée de restituer le capital prêté, en faisant valoir que le prêteur se serait fautivement dessaisi des fonds en faveur de la société FSE, sur la base d'un bon de commande irrégulier et d'une attestation de fin de travaux transmise par le fournisseur excluant le raccordement au réseau et les autorisations administratives, alors qu'elles étaient toutes deux mises à la charge du vendeur dans le bon de commande, et que le raccordement au réseau électrique n'a jamais été effectué par la société FSE.

Il est à cet égard de principe que le prêteur commet une faute excluant le remboursement du capital emprunté lorsqu'il libère la totalité des fonds, alors qu'à la simple lecture du contrat de vente il aurait dû constater que sa validité était douteuse au regard des dispositions protectrices du code de la consommation relatives au démarchage à domicile.

Or, il a été précédemment relevé que le bon de commande conclu avec la société FSE, par l'intermédiaire de laquelle la société Solfea faisait présenter ses offres de crédit, comportait des irrégularités formelles apparentes qui auraient dû conduire le prêteur, professionnel des opérations de crédit affecté, à ne pas se libérer des fonds entre les mains du fournisseur avant d'avoir à tout le moins vérifié auprès de Mme Le B. qu'elle entendait confirmer l'acte irrégulier.

Pour prétendre qu'elle n'avait pas à s'assurer de la régularité formelle du bon de commande, la BNP laisse entendre qu'elle n'était légalement pas tenue de détenir un exemplaire du contrat principal, mais le déblocage des fonds entre les mains du vendeur sans s'assurer de l'existence d'un contrat de vente dont le prêt était l'accessoire constitue par lui-même une faute la privant de son droit à restitution du capital prêté.

Il est aussi de principe que le prêteur commet une faute excluant le remboursement du capital emprunté lorsqu'il libère la totalité des fonds, alors que l'attestation de livraison ne lui permet pas de s'assurer de l'exécution complète du contrat principal.

En l'espèce, il sera observé que l'attestation de fin de travaux du 17 août 2012 dont la banque se prévaut pour justifier le versement des fonds entre les mains du fournisseur présentait un caractère pour le moins équivoque et contradictoire dans la mesure où, si son signataire attestait que les travaux 'objets du financement' ne couvraient pas 'le raccordement au réseau éventuel et autorisations administratives éventuelles', il ressortait pourtant clairement du bon de commande que la société FSE s'était engagée à effectuer les démarches administratives, ainsi que la mise en service, l'obtention du Consuel et le tirage des câbles entre le compteur et l'onduleur.

Or, si Mme le B. souligne que l'installation a pu être raccordée à ses frais le 12 avril 2016, elle n'a jamais pu être mise en service du fait qu'elle n'a jamais pu obtenir de la société FSE l'attestation selon laquelle l'installation avait été réalisée selon les règles liées à l'intégration au bâti photovoltaïque, la privant par conséquent du rachat de sa production électrique par EDF.

Au demeurant, alors que, selon l'attestation litigieuse du 17 août 2012, la prestation d'installation était prétendument intégralement réalisée et que les fonds étaient versés entre les mains du fournisseur le 23 août 2012, l'arrêté de non-opposition de la déclaration de travaux n'est qu'en date du 13 septembre 2012.

Le prêteur n'avait certes pas à assister l'emprunteur lors de la conclusion et de l'exécution du contrat principal, ni à vérifier le bon fonctionnement d'une installation exempte de vice ou la conformité du matériel livré aux stipulations contractuelles, mais il lui appartenait néanmoins de relever l'incohérence apparente de l'attestation de fin de travaux au regard du bon de commande, avant de se dessaisir du capital prêté.

Il en résulte qu'en versant les fonds entre les mains du fournisseur, au seul vu de cette attestation incomplète et équivoque, et sans procéder à des vérifications complémentaires sur la régularité formelle et l'exécution complète du contrat principal, la société Solfea qui ne pouvait ignorer les énonciations du bon de commande au vu duquel elle a apporté son concours, a commis des fautes la privant du droit d'obtenir le remboursement du capital emprunté.

La dispense de remboursement du crédit par l'emprunteur étant fondée sur la faute du prêteur, la contestation relative à son préjudice, lequel résulte précisément de l'obligation de restitution des prestations reçues de part et d'autre du fait de l'annulation du contrat de prêt en dehors de toute faute de sa part et, au surplus, sans perspective d'obtenir la restitution du prix par le fournisseur en liquidation judiciaire et sans bénéficier en contrepartie de la livraison par le vendeur d'une installation pérenne, permettant d'obtenir la production d'électricité attendue en vue de sa revente, est sans fondement.

Sans qu'il y ait lieu d'examiner les autres moyens fondés sur la responsabilité de la banque en sa qualité de dispensateur de crédit, il convient donc de confirmer le jugement attaqué en ce qu'il a débouté la société Solfea de sa demande en restitution du capital prêté.

En outre, c'est en tirant exactement les conséquences de l'anéantissement du contrat de prêt annulé de plein droit que le premier juge a condamné la société Solfea à rembourser à Mme Le B. les sommes versées en exécution du contrat de prêt.

Ayant été dispensée de restituer à la société Solfea le capital prêté, il n'y a pas lieu de statuer sur la demande subsidiaire de Mme Le B. en paiement de dommages-intérêts d'un montant de 13.500 EUR au titre de perte de chance de ne pas contracter, devenue sans objet.

Référence: 

- Cour d'appel de Rennes, 2e chambre, 16 octobre 2020, RG n° 17/08665