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Le 21 octobre 2019

M. K X demeurant à […]) est décédé le 9 juin 2008 à Suresnes, laissant pour lui succéder :

—  son conjoint survivant, Mme G H, avec laquelle il était marié sous le régime légal, dont il vicait séparé au jour de son décès,

—  son fils unique, issu d’une précédente union,M.  F X.

Par testament olographe daté du 22 septembre 2006, M. K X a privé de tout droit dans sa succession son épouse Mme L G H et dit que sa succession sera exclusivement dévolue à ses autres héritiers appelés par la loi, dans l’ordre et pour les quotités fixées par celle-ci.

Ce testament a été déposé le 28 septembre 2006 en l’étude de la SCP I-J-W, notaire.

C’est sur le fondement de ce testament que le 23 septembre 2008, le notaire susvisé a dressé l’acte de notoriété désignant M. K X comme l’unique héritierdu défunt en vertu de sa vocation héréditaire et en l’état de l’exhérédation du conjoint survivant. Il était ensuite procédé à la déclaration et à la liquidation de la succession conformément à la dévolution successorale ainsi constatée.

Cependant, Mme G H, conjoint survivant a entendu contester le testament l’exhérédant et a, par assignation délivrée le 2 janvier 2012, fait assigner M. F X devant le Tribunal de grande instance de Nanterre aux fins notamment de voir prononcer la nullité de ce testament et ordonner l’ouverture des opérations de compte, liquidation et partage.

M. K X a, par acte du 16 janvier 2013, appelé en intervention forcée la SCP I-J-W en garantie, sur le fondement de sa responsabilité professionnelle pour manquement à son obligation de conseil.

Par jugement avant dire droit du 21 février 2014, le tribunal de grande instance de Nanterre a ordonné une expertise « graphologique » du testament litigieux et désigné à cette fin Mme M N-O afin qu’elle dise si le testament est écrit en son entier, daté et signé de la main de son auteur, et dans l’attente, sursis à statuer.

L’expert a déposé son rapport le 15 juillet 2014, au terme duquel elle concluait que « le testament olographe daté du 22 septembre 2006, déposé au rang des minutes de la SCP I-J-W n’a été ni écrit, ni daté de la main de M. K X mais a été signé de sa main ».

C’est sur le fondement des conclusions d’expertise et par application de l’art. 970 du Code civil que le tribunal a annulé le testament litigieux, prononcé la nullité des opérations de compte liquidation et partage diligentées par la SCP I-J-W et désigné pour procéder à celles-ci, Maître E B, notaire à Levallois-Perret et débouté M. F X de sa demande en garantie à l’encontre du notaire.

Sur la validité du testament

M. K X ne conteste pas que le testament litigieux n’a pas été écrit et daté par son père, K X qui l’a cependant signé  il fait valoir que son contenu correspondait exactement à la volonté exprimée par le défunt, qui vivait séparé de fait de Mme G H depuis novembre 2002 et voulait entamer une procédure de divorce ; il ajoute que son père avait demandé à la SCP I-J-W, notaires, ce qu’il devait faire pour déshériter son épouse ; que faisant suite à cette demande, le notaire lui avait adressé le 19 septembre 2006 un modèle de testament « pour priver de tous droits votre épouse dans votre succession » ; le modèle a été reproduit par Mme A, sa mère, à la demande du défunt, ce dont elle atteste et qu’il a ensuite été déposé chez le notaire deux jours après ; contrairement à ce qu’a jugé le tribunal, M. K X a approuvé de manière personnelle et définitive le contenu du testament et s’en est approprié les termes ; il conteste l’affirmation de Mme G H selon laquelle le testament serait contraire aux règles d’ordre public résultant des lois du 3 décembre 2001 et 23 juin 2006 au motif qu’elle aurait la qualité d’héritier réservataire, à laquelle elle ne peut en réalité prétendre en vertu des dispositions de l’art. 914-1 du Code civil .

Mme G H réplique que le testament prêté à feu K X n’ayant pas été rédigé de sa main, sa volonté réelle ne peut être établie ; que l’attestation de Mme A ne saurait être prise en considération dans la mesure où, ex compagne de K X et mère de F X, elle dispose d’un intérêt manifeste à attester dans ce sens ; qu’en application de l’art. 970 du Code civil, le testament est nul ; que sa nullité a pour conséquence la nullité des opérations de liquidation de la succession puisque la totalité de l’actif net a été attribué à M. F X alors qu’elle peut prétendre à un quart en pleine propriété de la succession ; en toute hypothèse, le testament est contraire aux règles d’ordre public régissant la dévolution successorale qui font du conjoint survivant un héritier réservataire par application des art. 756 et 757 du Code civil.

Contrairement à ce que soutient Mme G H, l’art. 914-1 du Code civil n’institue un droit à réserve du conjoint survivant portant sur le quart de la succession que lorsque celui-ci ne se trouve pas en concours avec un descendant ; tel n’est pas le cas en l’espèce de Mme G H, qui se trouve en concours avec M. F X, enfant et comme tel héritier réservataire de K X ;M.  K X avait donc la faculté d’exhéréder son conjoint, même par testament olographe, sous réserve de la validité de ce document ;

L’art. 970 du Code civil pose comme conditions de validité du testament olographe, qu’il soit écrit en entier, daté et signé de la main du testateur, sans être assujetti à aucune autre forme .

Il est constant que le testament litigieux a été écrit et daté par Mme A, qui le reconnaît et dont l’aveu est corroboré par les conclusions précises et non contestées du rapport d’expertise ; M. K X n’a fait qu’y apposer sa signature ; la seule circonstance que le testament n’a pas été écrit entièrement de la main du testateur doit, sans qu’il y ait lieu de rechercher si cet acte est ou non l’expression de la volonté propre de son signataire, entraîner son annulation par application de l’article susvisé, en raison du vice formel dont il est affecté ; sont donc inopérants les moyens de fait invoqués par l’appelant au soutien de l’illustration de la volonté de son père, tels que la séparation de fait d’avec Mme G H ou son souhait, non abouti, d’introduire une procédure de divorce .

Il en résulte que le jugement doit être confirmé en ce qu’il a annulé le testament du 22 septembre 2006.

Référence: 

- Cour d'appel de Versailles, 1re chambre 1re section, 3 novembre 2017, RG n° 16/03329