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Le 21 juillet 2022

 

Le 25 janvier 2017, un ressortissant belge a déposé une demande tendant à sa nomination en qualité de notaire sur un office notarial créé à Bettignies dans le Nord. Nommé sur cet office par un arrêté du 23 février 2018, le ministre de la Justice a rapidement constaté que ce ressortissant avait été nommé en qualité de notaire dans l'arrondissement judiciaire de Bruxelles, en Belgique, par arrêté royal du 18 janvier 2018, et a retiré sa nomination par un arrêté du 6 avril 2018. Mécontent de cette décision, le ressortissant belge a saisi le juge administratif et a obtenu l'abrogation de l'arrêté litigieux (TA Lille, 7 mai 2021, n° 1810562).

Le ministre de la Justice a fait appel de ce jugement au motif que l'obligation de démission imposée par la loi s'applique aux notaires exerçant en France comme aux notaires exerçant à l'étranger.

L'article 49 du décret du 5 juillet 1973 relatif à la formation professionnelle dans le notariat et aux conditions d'accès aux fonctions de notaire prévoit que « peuvent demander leur nomination sur un office à créer les personnes qui remplissent les conditions générales d'aptitude aux fonctions de notaire. Les personnes physiques titulaires d'un office au jour de leur demande ne peuvent être nommées dans l'office créé qu'après ou concomitamment à leur démission [...] ». En outre, l'article 52, alinéa 3 du même décret précise que « la nomination en qualité de titulaire d'un office ou en qualité d'associé d'une société titulaire d'un office à tout moment de la procédure entraîne la caducité de toute autre demande de nomination sur un office à créer formée par l'intéressé ».

Après avoir rappelé qu'« aucune disposition législative ou réglementaire ni aucun principe général du droit n'imposait la consultation préalable de la chambre départementale des notaires compétente et du président du tribunal de grande instance compétent pour recevoir la prestation de serment, avant de procéder au retrait de l'arrêté du 23 février 2018 », les juges de Douai ont estimé que les premiers juges n'avaient pas épuisé leur office !

En effet, pour annuler l'arrêté litigieux du 6 avril 2018, le tribunal administratif a estimé que l'obligation de démission prévue à l'article 49 précité du décret du 5 juillet 1973 ne s'appliquait pas aux activités de notaires à l'étranger et que l'article 1er de l'ordonnance du 2 novembre 1945, imposant à un notaire établi dans un État membre de démissionner de son premier office afin de pouvoir être titulaire d'un office nouveau à créer en France, constituait une restriction à la liberté d'établissement qui n'apparaissait pas strictement nécessaire pour atteindre les objectifs d'intérêt général de cette profession.

Or, pour la cour administrative d'appel de Douai, le tribunal n'avait pas regardé si le « ministre aurait pris la même décision s'il s'était fondé sur le troisième motif tiré de l'application des dispositions de l'article 52 du décret du 5 juillet 1973 ». Il revenait donc aux juges douaisiens de savoir si le ministre de la Justice pouvait retirer sa décision sur le fondement de cet article 52 ?

Par principe, « l'administration ne peut abroger ou retirer une décision créatrice de droits de sa propre initiative ou sur la demande d'un tiers que si elle est illégale et si l'abrogation ou le retrait intervient dans le délai de quatre mois suivant la prise de cette décision » (CRPA, art. L. 242-1). Dès lors, et puisque le ressortissant belge avait été nommé à un office en Belgique, sa demande de nomination sur l'office créé à la résidence de Bettignies était devenue caduque en application des articles 49 et 52 du décret du 5 juillet 1973.

L'arrêté de nomination du 23 février 2018 étant entaché d'illégalité, le ministre de la Justice avait donc légalement pu procéder à son retrait par la décision litigieuse du 6 avril 2018.

Référence: 

- Cour administrative d'appel de Douai, 21 juin 2022, n° 21DA01538