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Le 29 octobre 2019

Il ressort des dispositions de l’art. 809 du Code de procédure civile que :

"Le président (du Tribunal de Grande Instance ) peut toujours, même en présence d’une contestation sérieuse, prescrire en référé des mesures conservatoires ou de remises en état qui s’imposent, soit pour prévenir un dommage imminent, soit pour faire cesser un trouble manifestement illicite".

L’application de ces dispositions n’est pas subordonnée à la preuve de l’urgence de la mesure sollicitée ni à la preuve de l’absence de contestation sérieuse.

Le trouble manifestement illicite résulte de toute perturbation résultant d’un fait matériel ou juridique qui directement ou indirectement constitue une violation évidente de la règle de droit.

En l’espèce, il résulte de l’ordonnance entreprise que monsieur X a saisi le juge de référés en se fondant sur l’existence d’un trouble manifestement illicite résultant de la violation d’une servitude de passage dont il bénéficierait sur la parcelle appartenant à monsieur Y et cadastrée anciennement 365, aujourd’hui comprise dans les parcelles cadastrées section WK 25 et 31, cette servitude de passage lui permettant d’accéder à ses parcelles anciennement cadastrées 102 et 357 comprises aujourdhui dans les parcelles cadastrées section WK 24 et 30.

Il est constant qu’une servitude de passage constitue une servitude discontinue.

Aux termes de l’art. 691 du Code civil, les servitudes continues non apparentes et les servitudes discontinues, apparentes ou non apparentes, ne peuvent s’établir que par titres, la possession même immémoriale ne suffisant pas pour les établir. L’existence d’un titre au sens de l’art. 691 précité n’est caractérisée que par la reconnaissance d’un droit de passage par celui qui est débiteur de ce passage.

Or, en l’espèce, il n’est versé aux débats aucun titre émanant de monsieur Y ou de son auteur établissant qu’un droit de passage conventionnel ait été reconnu sur sa propriété au profit de celle de monsieur X ou de son auteur. A cet égard, le premier juge se fonde pour retenir l’existence d’une servitude conventionnelle de passage sur une attestation produite par monsieur H-I J, ancien propriétaire des parcelles cadastrées alors 102 et 357 (aujourd’hui […] et 30) qui confirmerait que ces parcelles étaient desservies par une servitudelégale de passage qui permettait l’entretien des vignes. Cependant, cette attestation ne saurait valoir reconnaissance d’un droit de passage conventionnel constitutive d’un titre, alors qu’elle émane de l’auteur de monsieur X qui n’est pas le débiteur de la servitude et non de l’auteur de monsieur Y, seul susceptible d’être redevable d’une servitude s’exerçant sur sa propriété au profit de celle de monsieur X. C’est donc à tort que le premier juge a déduit de cette attestation l’existence d’une servitude conventionnelle s’imposant à monsieur Y.

S’agissant d’une servitude fondée sur un état d’enclave des parcelles de monsieur X et également retenue par le premier juge, l’art. 682 du Code civil prévoit que le propriétaire dont les fonds sont enclavés et qui n’a sur la voie publique aucune issue ou qu’une issue insuffisante, soit pour l’exploitation agricole, industrielle ou commerciale de sa propriété, soit pour la réalisation d’opérations de construction ou de lotissement est fondé à réclamer sur les fonds de ses voisins un passage suffisant pour assurer la desserte complète de ses fonds, à charge d’une indemnité proportionnée au dommage qu’il peut occasionner.

En l’espèce, le premier juge se fonde sur un procès-verbal d’huissier qui confirme selon lui qu’aucun autre passage que celui revendiqué n’est utilisable en l’état afin de desservir les parcelles de Monsieur X.

Cependant, ce procès-verbal non produit en cause d’appel et dont le premier juge ne reproduit pas les constatations matérielles précises effectuées par l’huissier de justice, empêchant ainsi la présente Cour de porter une appréciation sur l’état d’enclave de la propriété de monsieur X et sur le caractère praticable ou non des accès la desservant, est contredit par les attestations régulières en la forme produites par monsieur Y et émanant de madame Z monsieur A, monsieur B et madame C, desquels ils résultent que monsieur X bénéficie de deux autres accès à ses parcelles WK 24 et 30 :

—  l’un par la rue du quartier en remontant sur l’ancien […]

—  l’autre par sa propre parcelle WK 30 sur l’ancien chemin de Feuilla-Treilles en passant derrière le cimetière, et sans besoin d’emprunter la propriété de Monsieur Y.

Il ressort de ces mêmes attestations, confirmées par un courrier de monsieur B, maire de la commune de Feuilla adressé à monsieur X en date du 12 septembre 2018, qu’à tous le moins en ce qui concerne le second accès sur l’ancien chemin communal de Feuilla-Treilles, ce chemin en bon état et bien entretenu est parfaitement praticable par tous véhicules, y compris agricoles, ce que confirme tant le maire de la commune que monsieur F G, artisan forestier, lequel indique aux termes de son attestation en date du 28 novembre 2018 qu’il est intervenu à la demande du propriétaire des parcelles WK 24 et 30, en l’occurence monsieur X afin d’effectuer le débroussaillage de ces parcelles, lesquels sont accessibles par le chemin communal précité décrit par le témoin comme étant en bon état et adapté aux engins agricoles.

En conséquence, à défaut pour monsieur X d’établir l’état d’enclave de sa propriété, c’est à tort que le premier juge a considéré qu’il justifiait d’un trouble manifestement illicite et a ordonné à monsieur Y de rétablir l’accès au passage sur sa parcelle au profit de la parcelle cadastrée […] sous astreinte.

Il convient donc d’infirmer l’ensemble des dispositions de l’ordonnance entreprise et statuant à nouveau de rejeter l’ensemble des demandes formées par Monsieur X.

Référence: 

- Cour d'appel de Montpellier, 1re chambre d, 17 octobre 2019, RG n° 18/05927