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Le 27 mai 2004

En droit fiscal, l'acte anormal de gestion est une décision de gestion qui se traduit par une écriture comptable affectant le bénéfice imposable, c’est cette opération que l'Administration entend écarter comme étrangère ou contraire aux intérêts de l'entreprise. Les actes anormaux de gestion sont divers, il peut s’agir de charges, qu'elles soient anormales dans leur principe ou simplement dans leur montant, comme de produits, qu'ils soient inexistants ou insuffisants. Dans l’hypothèse d’un redressement fiscal, il est crucial de déterminer qui supporte la charge de la preuve du caractère normal ou anormal des opérations. En d’autres termes, est-ce l’administration qui doit prouver le caractère anormal d’une décision de gestion ou bien est-ce le contribuable qui doit en justifier le bien fondé ? Une jurisprudence récente du Conseil d’Etat permet d’apporter quelques éclairages. D’un point de vue pratique, cela peut aider les entreprises à se prémunir contre l’éventuelle remise en cause d’une décision de gestion. Les solutions acquises : un fardeau partagé entre le contribuable et l’administration fiscale La loi fiscale prévoit que l'Administration supporte la charge de la preuve lorsque le redressement est notifié dans le cadre de la procédure contradictoire. Cela étant, une jurisprudence constante précise qu'il appartient au contribuable de justifier dans son principe comme dans son montant de l'exactitude des écritures de charges portées dans ses écritures comptables. Dans un arrêt du 20 juin 2003 (n° 232832), le Conseil d’Etat précise que le contribuable doit apporter tous les « éléments suffisamment précis portant sur la nature de la charge en cause, ainsi que sur l'existence et la valeur de la contrepartie qu'il en a retirée ». Il est demandé à l'entreprise de prouver, non pas l'utilité de sa dépense, car cela constituerait une forme d'immixtion dans sa gestion, mais la réalité des contreparties que la dépense comporte. Cette formule s’avérait relativement sévère à l’égard des entreprises, celles-ci pouvaient avoir des difficultés à réunir un arsenal de preuves. La solution nouvelle : la facture, un élément de présomption de déductibilité de la charge De manière plus favorable aux entreprises, la Haute Juridiction est revenue sur sa jurisprudence antérieure en retenant qu’une facture régulièrement enregistrée en comptabilité constitue un élément justificatif suffisant pour établir la réalité d’une prestation (Conseil d'Etat, 21 mai 2007 n° 284719). En l'espèce, la société Sylvain Joyeux avait fait l'objet d'une vérification de comptabilité suite à laquelle l'administration avait réintégré à son résultat imposable des commissions versées en rémunération des services d'intermédiaires pour l'obtention de marchés publics. L'administration réclamait que la société fournisse des pièces susceptibles de justifier la réalité et la nature des services rendus, mais le Conseil d'État admet la déduction au vu des seules factures produites par la société et relève que « l'administration ne peut être regardée comme ayant produit des éléments de nature à laisser penser que ces versements constituaient de pures libéralités consenties dans un intérêt autre que celui de l'entreprise ». Les conséquences sont simples : la régularité apparente de la facture crée une présomption en faveur du contribuable et l'administration doit, a minima, fournir quelques éléments afin d'étayer ses soupçons d'irrégularité de la déduction. Ainsi, dans un contexte d'apparence régulière, l'administration ne saurait remettre en cause la déductibilité de la charge sous le seul prétexte que le contribuable ne lui aurait pas fourni de justifications complémentaires. Il appartient à l'administration de renverser cette présomption au moyen d'objections concrètes et circonstanciées. En réponse à ces objections, il revient ensuite au contribuable de fournir les justificatifs supplémentaires. Le juge tranchera en fonction des éléments apportés par le contribuable d’une part et par l’administration d’autre part. En amont de tout contrôle fiscal, les entreprises ont tout intérêt à faire preuve de prudence et à préparer une documentation exhaustive sur les opérations en cours. Marie-Amélie Roger Références:[site du Conseil d'Etat->http://www.conseil-etat.fr/ce/home/index.shtml] Conseil d’Etat : arrêt du 20 juin 2003 n° 232832 Conseil d'Etat : arrêt du 21 mai 2007 n° 284719