Inscription à notre newsletter

Recevez toutes les informations importantes directement dans votre boite mail. Cliquez ici

Partager cette actualité
Le 08 octobre 2021

 

M. G. est propriétaire d'une maison située [...], dans laquelle il est domicilié. Il a acquis ce terrain, sur lequel il a fait édifié son pavillon, auprès de l'association Réalise en 1999. Dans les années qui ont suivi, M. G. a travaillé en qualité de salarié de cette association.

En 2004, l'association Réalise a transformé un terrain situé à une centaine de mètres de la propriété de M. G. en centre éducatif fermé (CEF).

En 2015, M. G. a pris sa retraite. Peu de temps après, sur la période située entre fin 2015 et début 2016, le centre éducatif a créé une ferme pédagogique, hébergeant notamment deux ânes et un coq.

Par courrier de son conseil du 10 janvier 2017, M. G. a mis en demeure l'association Réalise de mettre fin aux chants du coq, estimant subir un trouble anormal de voisinage.

Cette demande, d'abord refusée par courrier en réponse du 25 janvier 2017, a finalement fait l'objet d'une négociation devant le conciliateur de justice du tribunal d'instance de Nancy. Par procès verbal de conciliation du 22 juin 2017, il a été convenu qu'une barre serait installée afin d'empêcher le chant du coq lorsqu'il est dans on abri couvert. En cas de réitération, l'association Réalise s'est engagée à éloigner le coq de la basse cour à compter de janvier 2018.

Par acte d'huissier en date du 3 mai 2018, M. G. a assigné l'association Réalise devant le tribunal d'instance de Nancy aux fins notamment de lui voir ordonner de retirer de sa ferme les deux ânes et le coq s'y trouvant et ce, sous astreinte de 150' par jour de retard passé un délai de huit jours à compter de la signification du jugement, et de condamner la défenderesse à lui verser la somme de 7500' au titre du préjudice moral.

Le coq objet du litige initial est mort en cours de procédure, en septembre 2019. Toutefois, des chants de coq se sont de nouveau fait entendre sur le terrain de l'association Réalise.

L'action en responsabilité pour troubles de voisinage, en raison du chant d'un coq, doit être rejetée. La ferme pédagogique créée par l'association se situe dans une commune rurale de 760 habitants, que les parties s'accordent à qualifier de village. Les activités agricoles, telles que la présence d'un poulailler, y sont en principe normales, sauf à prouver qu'elles sont sources de nuisances anormales. Or, les attestations produites par le requérant n'émanent pas de personnes habitant le village, mais de visiteurs. L'association produit en revanche les attestations de 18 habitants du village, dont certains résident dans la même impasse que le requérant, ainsi que l'attestation du maire de la commune qui déclarent ne subir aucun dérangement du fait du chant du coq. Le voisin immédiat fait la même déclaration. Le caractère anormal des chants du coq n'est ainsi nullement démontré.

La procédure intentée par le requérant, M. G., est abusive. Il a agi en justice pour obtenir la soustraction du coq du poulailler de l'association sous prétexte que ce coq lui causait un préjudice sonore "infernal", alors que ses autres voisins déclaraient ne subir "aucun dérangement" et que son voisin immédiat attestait ne subir "aucune nuisance". Même si le ressenti des bruits de voisinage est subjectif, l'action judiciaire engagée par le requérant pour la présence d'un seul coq (voire deux simultanément pendant quelques semaines) présent dans un poulailler qui n'était même pas situé dans un espace contigu à son habitation, dans un environnement purement rural (l'impasse où le requérant est domicilié est bordée par un haras et par des prés), apparaît manifestement abusive.

Cette action a conduit l'association à dépenser beaucoup d'énergie pour sa défense et à tenter de trouver des solutions pour apaiser le requérant (notamment en déplaçant le poulailler), en pure perte. Aussi convient-il de condamner le requérant à payer à l'association 1000 EUR à titre de dommages et intérêts pour procédure abusive.

Référence: 

- Cour d'appel de Nancy, 2e chambre civile, 23 septembre 2021, RG n° 20/01785