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Le 10 août 2018

Concernant la validité du congé pour vendre qui est contestée au principal par les appelants au motif que Mme , co-indivisaire, aurait agi sans le consentement de son frère, autre co-indivisaire, et sans mandat de sa part, il a été justement répondu par le tribunal que dès le 28 octobre 2015, M. P a donné, par acte sous seing privé, mandat à sa soeur, que ce mandat a été transmis le même jour au notaire en charge de la succession de M. Maurice P, maître Jean-Christophe G, notaire de M. Guy P comme il en est attesté. Ainsi le 30 octobre 2015, Mme P, mandatée à cette fin, a pu légitimement faire tenir ce congé à son locataire.

Le fait que M. Guy P agisse aujourd'hui aux cotés de sa soeur finit de démontrer le parfait accord des co-indivisaires quant à leur volonté commune de vendre ce bien.

Au reste, il est constant en droit que seul le co-indivisaire aurait pu se plaindre de son absence de consentement à ce congé pour vendre et non le locataire qui peut toujours se prévaloir d'un mandat apparent dans de telles circonstances. En cela, la prétendue absence de mandat réel ne pouvait lui causer aucun grief et peu importe dès lors la nullité alléguée de cet acte.

Concernant la bévue ayant consisté pour Mme P à délivrer un congé en se servant du papier à en-tête du notaire, la SCP A G, les explications données sur l'urgence à agir eu égard à la proximité de l'achèvement du délai légal sont recevables et plausibles. Elles excluent toute duplicité ou volonté de tromper le locataire.

Le premier juge a justement considéré que nonobstant l'incongruité de cette utilisation, M. C. ne s'est aucunement trompé sur l'identité réelle de l'auteur de ce congé, comme il le note lui-même dans son courrier du 30 décembre 2015 à cet office public. En tout état de cause, il lui était remis en main propre le lendemain par Mme P, elle même, qui n'a pu manquer de le rassurer sur les circonstances de cette rédaction atypique provenant uniquement de l'utilisation d'un papier à entête de l'étude alors que seule la bailleresse était censée s'exprimer. M. C n'a donc subi aucun grief de ce chef susceptible de mettre à néant un acte qui, au demeurant, n'apparaît pas formellement nul même s'il est incontestablement maladroit.

Quant à l'absence de la notice explicative à destination du locataire telle que voulue par la loi du 24 mars 2014, il convient de souligner qu'à la date du 30 octobre 2015, date du congé, celle-ci n'était pas définie en sa teneur et ne devait l'être qu'au 13 décembre 2017 par un arrêté s'appliquant à compter du 1er janvier 2018.

Par définition, la forme et le contenu d'une telle notice n'étant pas connus à la date du congé, il ne peut être fait grief à Mme P, ès qualités, de ne pas l'avoir fait tenir à M. C en 2015.

Dans son congé pour vendre, Mme P prend soin de mentionner les désignations cadastrales du bien mis à la vente et précise que c'est l'ensemble de la propriété louée qui est concernée.

M. C, locataire de cette propriété depuis plus de vingt ans, en connaissait parfaitement la contenance et les limites. Tout au long de l'instruction de cette affaire, il n'a fait aucunement part de la moindre interrogation à ce sujet. Il n'existe donc aucune ambiguïté quant à la nature et l'importance des biens visés.

Par application de l'art. 15-2 de la loi du 6 juillet 1989, il est reconnu au locataire subissant un congé pour vendre, le droit de se prévaloir de son caractère frauduleux si le prix demandé apparaît volontairement exagéré à seule fin de le dissuader d'acheter, en l'état de la consistance du bien et de l'état du marché à un moment et un endroit donnés.

La preuve de ce caractère excessif incombe au locataire alors que ce prix est librement fixé par le bailleur qui est en droit d'espérer en tirer le meilleur prix, y compris en se livrant à une division de la propriété avec une vente par lots, sans que la loi l'oblige à détailler ses intentions en la matière.

Présentement, il est démontré par l'attestation de l'agence immobilière Ecully, qui n'est pas remise en cause en sa sincérité, que si la propriété était divisée en deux lots, comme le PLU local le permet, le bien à l'époque considérée était alors susceptible d'être vendu au mieux, 320'000 euro pour la construction et 250'000 euro pour le terrain, soit un total de 570'000 euro. Ce chiffre est en totale cohérence avec le prix de 562'000 euro affiché dans le congé.

De plus, ce chiffre n'est pas excessivement éloigné de celui de 490'000 euro considéré par M. C comme étant le juste prix applicable à cette propriété puisqu'il verse cet exemple de vente à son dossier.

Le prix proposé n'apparaît donc pas excessif et frustratoire pour M. C, celui ci disposant en tout état de cause d'un droit de préemption subsidiaire sur la base du prix de la vente effectivement concrétisée par le bailleur avec un tiers.

Quant à la volonté réelle de vendre de la part des co-indivisaires, mise en cause par M. C du fait de l'absence de concrétisation de cette vente depuis le congé, elle résulte clairement des démarches effectuées auprès de différentes agences immobilières, de l'attestation du notaire certifiant que cette vente était destinée à liquider les frais de la succession de feu Maurice P.

De plus, il est de jurisprudence bien établie que l'absence de mise en vente immédiate des locaux n'est pas en soi suffisante pour établir son caractère frauduleux, spécialement lorsqu'il s'explique par les contestations élevées par les preneurs sur la validité du congé, comme c'est exactement le cas en l'espèce.

Concernant l'opposabilité de ce congé au conjoint alors que seul M. C en était destinataire, il est acquis que par application des dispositions des art. 515-4 et 1751 du code civil, de l'article 9-1 de la loi du 6 juillet 1989, les notifications ou significations faites par le bailleur sont de plein droit opposables au partenaire lié par un pacte civil de solidarité au locataire ou au conjoint du locataire si l'existence de ce partenaire ou de ce conjoint n'a pas été préalablement portée à la connaissance du bailleur.

La prise de connaissance par le bailleur de cette situation ne peut résulter en la matière que d'une démarche positive de la part du preneur et ne peut résulter de la rumeur publique ou du simple constat d'une présence physique d'une tierce personne dans le logement loué.

Le fait encore que le bailleur puisse écrire à ses locataires en employant les termes « M. et Mme.. » ne prouve en rien sa connaissance de la réalité de ce lien conjugal entraînant de nombreuses conséquences juridiques contraignantes pour lui.

Or, il est constant qu'aucune démarche positive n'a été effectuée en ce sens par M. C, seul signataire du bail, et peu importe en ce domaine la connaissance officieuse que le bailleur aurait pu avoir de cette situation matrimoniale et du fait que le mariage ait été contracté antérieurement à la signature du bail.

Ainsi, le congé est parfaitement opposable à Mme A épouse C qui au demeurant n'habite pas avec son mari, disposant d'une adresse personnelle constituant son domicile, et ne peut donc se prévaloir d'aucun grief du fait qu'elle n'aurait pas reçu ce congé.

Le jugement de première instance qui a validé le congé est confirmé.

Référence: 

- Cour d'appel de Lyon, Chambre 8, 27 juillet 2018, RG N° 17/03137