Inscription à notre newsletter

Recevez toutes les informations importantes directement dans votre boite mail. Cliquez ici

Partager cette actualité
Le 06 septembre 2021

 

Par un testament authentique reçu le 28 avril 2005, M. B... a institué " légataire universel en nue-propriété le Vatican avec obligation d'affecter ce legs prioritairement à la basilique Sainte-Marie-Majeure de Rome ".

A la suite du décès de M. B... le 23 juin 2012, le préfet du Rhône a, par un courrier du 3 février 2015, refusé de délivrer un certificat de non opposition à l'association française des oeuvres pontificales missionnaires (AFOPM), dont le conseil d'administration avait accepté le legs de M. B... le 5 novembre 2013, au motif qu'elle n'était pas le légataire désigné par le testament. L'AFOPM s'est pourvue en cassation contre l'arrêt du 13 février 2020 par lequel la Cour administrative d'appel de Lyon a rejeté l'appel qu'elle avait formé contre le jugement du Tribunal administratif de Lyon du 28 mars 2017 rejetant sa demande d'annulation de la décision du préfet du Rhône.

L'article 910 du code civil, dans sa rédaction applicable à la date de la décision attaquée, dispose que : " (...) les dispositions entre vifs ou par testament au profit des fondations, des congrégations et des associations ayant la capacité à recevoir des libéralités et, dans les départements du Bas-Rhin, du Haut-Rhin et de la Moselle, des établissements publics du culte et des associations inscrites de droit local, à l'exception des associations ou fondations dont les activités ou celles de leurs dirigeants sont visées à l'article 1er de la loi n° 2001-504 du 12 juin 2001 tendant à renforcer la prévention et la répression des mouvements sectaires portant atteinte aux droits de l'homme et aux libertés fondamentales, sont acceptées librement par celles-ci. / Si le représentant de l'Etat dans le département constate que l'organisme légataire ou donataire ne satisfait pas aux conditions légales exigées pour avoir la capacité juridique à recevoir des libéralités ou qu'il n'est pas apte à utiliser la libéralité conformément à son objet statutaire, il peut former opposition à la libéralité, dans des conditions précisées par décret, la privant ainsi d'effet. / Les libéralités consenties à des Etats étrangers ou à des établissements étrangers habilités par leur droit national à recevoir des libéralités sont acceptées librement par ces Etats ou par ces établissements, sauf opposition formée par l'autorité compétente, dans des conditions fixées par décret en Conseil d'Etat ". Les articles 6-1 à 6-7 du décret du 11 mai 2007 relatif aux associations, fondations, congrégations et établissements publics du culte et portant application de l'article 910 du Code civil donnent compétence au ministre de l'intérieur pour s'opposer aux libéralités consenties aux Etats et établissements étrangers et organisent les conditions dans lesquelles s'exerce ce droit d'opposition.

Pour la Haute juridiction administrative, saisie du pourvoi en cassation, la Cour administrative d'appel a jugé, par une appréciation souveraine non entachée de dénaturation que le défunt, en désignant le Vatican comme légataire avec obligation d'affecter ce legs prioritairement à la basilique Sainte-Marie-Majeure de Rome, avait entendu stipuler son legs en faveur du Saint-Siège. En l'état de cette appréciation souveraine, la cour n'a pas commis d'erreur de droit en retenant que, quels que soient les liens existants entre le Saint-Siège et l'association française des oeuvres pontificales missionnaires requérante, cette dernière ne pouvait être regardée comme le bénéficiaire du legs. Dès lors que le Saint-Siège, propriétaire de la basilique désignée par le legs, est un sujet de droit international, la cour n'a pas commis d'erreur de droit en jugeant qu'il avait la qualité d'un Etat ou d'un établissement étranger au sens et pour l'application du dernier alinéa de l'article 910 du Code civil. C'est sans erreur de droit qu'elle en a déduit que le ministre de l'intérieur était seul compétent pour exercer, sur ce legs, le droit d'opposition prévu à l'article 910 du Code civil.

Il s'ensuit qu'en jugeant que le préfet avait pu refuser de délivrer à l'association française des oeuvres pontificales missionnaires un certificat de non opposition au legs du défunt au motif que ce dernier avait été stipulé non pas au profit de l'association mais en faveur du Saint-Siège, la cour, qui pouvait considérer que le refus du préfet ne portait, en tout état de cause, pas atteinte au principe de séparation entre l'Eglise et l'Etat, n'a entaché son arrêt d'aucune erreur de droit.

Référence: 

- Conseil d'État, 10e et 9e chambres réunies, 5 mai 2021, req. n° 440167