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Le 02 janvier 2020

 

L’article 15 de la loi du 6 juillet 1989 dispose que :

"Lorsque le bailleur donne congé à son locataire, ce congé doit être justifié soit par sa décision de

reprendre ou de vendre le logement, soit par un motif légitime et sérieux, notamment l’inexécution par le locataire de l’une des obligations lui incombant. A peine de nullité, le congé donné par le bailleur doit indiquer le motif allégué (…). Le délai de préavis applicable au congé est de six mois lorsqu’il émane du bailleur'.

Le congé doit être notifié par lettre recommandée avec demande d’avis de réception, signifié par acte d’huissier ou remis en main propre contre récépissé ou émargement. Ce délai court à compter du jour de la réception de la lettre recommandée, de la signification de l’acte d’huissier ou de la remise en main propre.

Pendant le délai de préavis, le locataire n’est redevable du loyer et des charges que pour le temps où il a occupé réellement les lieux si le congé a été notifié par le bailleur..(…).

A l’expiration du délai de préavis, le locataire est déchu de tout titre d’occupation des locaux loués.

II. Lorsqu’il est fondé sur la décision de vendre le logement, le congé doit, à peine de nullité, indiquer le prix et les conditions de la vente projetée. Le congé vaut offre de vente au profit du locataire : l’offre est valable pendant les deux premiers mois du délai de préavis. Les dispositions de l’article 46 de la loi n° 65-557 du 10 juillet 1965 fixant le statut de la copropriété des immeubles bâtis ne sont pas applicables au congé fondé sur la décision de vendre le logement.

A l’expiration du délai de préavis, le locataire qui n’a pas accepté l’offre de vente est déchu de plein droit de tout titre d’occupation sur le local.

Le locataire qui accepte l’offre dispose, à compter de la date d’envoi de sa réponse au bailleur, d’un délai de deux mois pour la réalisation de l’acte de vente. Si, dans sa réponse, il notifie son intention de recourir à un prêt, l’acceptation par le locataire de l’offre de vente est subordonnée à l’obtention du prêt et le délai de réalisation de la vente est porté à quatre mois. Le contrat de location est prorogé jusqu’à l’expiration du délai de réalisation de la vente. Si, à l’expiration de ce délai, la vente n’a pas été réalisée, l’acceptation de l’offre de vente est nulle de plein droit et le locataire est déchu de plein droit de tout titre d’occupation.

Dans le cas où le propriétaire décide de vendre à des conditions ou à un prix plus avantageux pour l’acquéreur, le notaire doit, lorsque le bailleur n’y a pas préalablement procédé, notifier au locataire ces conditions et prix à peine de nullité de la vente. Cette notification est effectuée à l’adresse indiquée à cet effet par le locataire au bailleur ; si le locataire n’a pas fait connaître cette adresse au bailleur, la notification est effectuée à l’adresse des locaux dont la location avait été consentie. Elle vaut offre de vente au profit du locataire. Cette offre est valable pendant une durée d’un mois à compter de sa réception. L’offre qui n’a pas été acceptée dans le délai d’un mois est caduque.

Le locataire qui accepte l’offre ainsi notifiée dispose, à compter de la date d’envoi de sa réponse au bailleur ou au notaire, d’un délai de deux mois pour la réalisation de l’acte de vente. Si, dans sa réponse, il notifie son intention de recourir à un prêt, l’acceptation par le locataire de l’offre de vente est subordonnée à l’obtention du prêt et le délai de réalisation de la vente est porté à quatre mois. Si, à l’expiration de ce délai, la vente n’a pas été réalisée, l’acceptation de l’offre de vente est nulle de plein droit.

Les termes des cinq alinéas précédents sont reproduits à peine de nullité dans chaque notification."

En l’espèce, le congé a été délivré à Mme Z pour la date du 30 avril 2017 à minuit, porte sur 'des locaux qu’elle occupe sis […] à […]' et est délivré aux fins de vente moyennant un prix de 100.000 euro. Il vise le bail consenti le 1er mai 1987 à Mme Z.

Le congé doit mentionner le prix de vente et reproduire certaines mentions. Le bien objet de la vente doit par ailleurs être identifié. Il faut ainsi qu’il y ait concordance entre l’objet loué et celui offert à la vente, que l’assiette du congé soit identique à celle du bail. Le congé doit indiquer les conditions de la vente et la communication d’un état descriptif de division n’est pas nécessaire dès lors que le locataire a une connaissance effective des lieux qui lui sont loués.

En l’espèce, le congé vise le bail, sa date, l’appartement loué, le bâtiment, l’étage. Si aucun état descriptif du logement ainsi que sa superficie ne sont précisés dans le bail, il apparaît que Mme Z, locataire depuis trente ans de ce logement au moment de la délivrance du congé, a clairement été informée de l’objet et du prix de la vente et que le bailleur a donné des éléments suffisants sur la consistance du bien à acquérir pour permettre au locataire de donner son consentement en pleine connaissance de cause.

Mme Z soutient que le congé n’a été délivré que pour la dissuader de se porter acquéreur du bien au vu notamment du prix fixé et de l’absence de démarches pour vendre le bien.

En l’espèce, il convient de rappeler qu’un abondant contentieux oppose les parties et qu’il conduit inévitablement à la question de savoir si le but des bailleurs n’est pas seulement dans ce cas d’espèce de libérer le logement de Mme Z. C, Mme Z produit huit décisions de justice l’opposant à ses bailleurs, la plus ancienne datant de 2004. Des pièces produites, il résulte que deux congés ont été préalablement délivrés le 27 octobre 2004 et le 15 octobre 2007 avec un prix de vente à 200.000 euros, ces deux congés ayant été invalidés par décision de justice. Les autres décisions ont trait à l’état du logement et permettent de constater que les bailleurs ont été condamnés en 2005 à effectuer des travaux sous astreinte et à indemniser un préjudice de jouissance, astreinte liquidée en 2009 à hauteur de 48.800 euros, en 2012 à des travaux sous astreinte, par arrêt en date du 1er juillet 2016 par la cour d’appel d’Aix-en-Provence à la liquidation de deux astreintes relatives à des travaux suite aux décisions de 2005 et 2012 et la fixation d’une nouvelle astreinte pour les travaux encore inexécutés.

La question se pose d’autant plus que Mme Z sollicite à nouveau la somme de 15.000 euro à titre de dommages et intérêts pour occupation d’un logementindécent et indique que les travaux ordonnés par la cour d’appel en 2016 n’ont pas été effectués et fait état en août 2018 de problèmes de robinetterie. La cour n’a pas connaissancede l’exécution des travaux après l’arrêt de 2016 mais il est exact que les bailleurs ne produisent pas de factures relatives à ces travaux.

Cependant, il importe de rappeler que pour qu’il y ait fraude, il faut démontrer que le bailleur n’a pas eu l’intention véritable de vendre. Le bailleur est libre de la détermination du prix. Le congé peut néanmoins être annulé en cas de fraude caractérisée constituant, de la part du bailleur, à mentionner un prix dissuasif pour empêcher le locataire de se rendre acquéreur, un simple excès de prix par rapport au niveau du marché ne suffit cependant pas à établir la fraude. Mais le cumul d’un prix dissuasif et l’absence d’initiative pour trouver un acheteur révèlent l’absence de sincérité de la décision de vendre

Il est constant que l’existence de la fraude est établie à partir de trois éléments : le caractère excessif du prix de vente par rapport au marché de l’immobilier, l’insuffisance des démarches faites pour trouver un acheteur, et éventuellement la relocation du logement après le départ du locataire congédié.

S’agissant du prix fixé à 100.000 euro, la preuve n’est pas rapportée qu’il soit excessif par rapport au marché de l’immobilier. En effet, il résulte des pièces produites au dossier que ce prix avait été estimé entre 85.000 et 92.000 euros dans un avis d’une agence immobilière en 2009, entre 110 et 120.000 euro dans le rapport d’expertise de M. D en 2011 et entre 85.000 et 90.000 euros par l’agence FONCIA en 2016 sans visite du bien. Si ces données ne sont pas récentes et sont pour certaines anciennes, il convient de noter ainsi que l’a fait le premier juge qu’il résulte d’un courrier en

date du 25 octobre 2016 de la SARL CLP que l’agence n’a pu accéder au logement pour l’évaluer, d’un courrier en date du 30 novembre 2016 de la SCP G ET H, huissiers, qu’ils n’ont pu accéder au logement pour constater les travaux exécutés et que celà a été le cas également en 2018 pour l’agence FONCIA comme en atteste un échange de textos et en mai 2019 ainsi qu’il résulte d’un échange de mels entre les bailleurs et l’agence CLP qui souhaitait organiser des visites. La preuve d’un prix excessif par rapport au marché n’est donc pas rapportée et la locataire ne peut se plaindre de l’absence d’évaluation récente au vu de son comportement d’obstruction que la présente cour d’appel avait déjà relevé dans son arrêt en date du 1er juillet 2016. Il convient enfin d’ajouter que le mandat de vente donné à l’agence FONCIA en mars 2019 l’est C pour un prix de 100.000 euro hors frais d’agence.

Il importe d’ajouter par ailleurs qu’en cas de prix excessif, le locataire est protégé par le second droit de préemption que la loi lui accorde en cas de vente à un tiers à un prix inférieur.

S’agissant de l’insuffisance de démarches pour trouver un acquéreur, il apparaît en effet que les bailleurs ont donné mandat à l’agence FONCIA de vendre ce bien. Ce mandat est intervenu tardivement pour avoir été signé en mars 2019 soit 29 mois après la délivrance du congé et après la décision du premier juge. Par mel en date du 30 avril 2019, l’agence SARL CLP faisait également état de deux personnes intéressées et de la nécessité de faire de visites. Si ces démarches sont intervenues tardivement, il est constant que le bailleur n’est pas obligé de mandater un professionnel pour vendre son bien. Par ailleurs, il convient de souligner à nouveau que le comportement d’obstruction de la locataire a empêché que les démarches d’évaluation et de visites du bien soit menées correctement.

Au vu de ces éléments, il apparaît que la fraude du bailleur n’est pas rapportée. Le contentieux ancien et nourri entre les parties et les manquements répétés du bailleur à ses obligations, ne doit pas pour autant l’empêcher de céder son bien. Il convient de valider le congé pour vente délivré, de constater que Mme Z est déchue de tout titre d’occupation des lieux depuis le 30 avril 2017 à minuit, d’ordonner son expulsion et de dire qu’elle est tenue depuis cette date au paiement d’une indemnité d’occupation mensuelle d’un montant de 418,60 euro, montant du loyer actuel.

Référence: 

- Cour d'appel d'Aix-en-Provence, Chambre 1-7, 12 décembre 2019, RG n° 19/06009