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Le 01 décembre 2019

 

L’art. 809 du code de procédure civile prévoit que le président peut toujours même en présence d’une contestation sérieuse,prescrire en référé les mesures conservatoires ou de remise en état qui s’imposent, soit pour prevenir un dommage imminent soit pour faire cesser un trouble manifestement illicite.

Dans les cas où l’existence de l’obligation n’est pas sérieusement contestable, il peut accorder une provision au créancier ou ordonner l’exécution d’une obligation même s’il s’agit d’une obligation de faire.

En l’espèce, M. et Mme A et G X font valoir qu’ils subissent un trouble anormal du voisinage en ce que les sons générés par la pompe à chaleur sont importants notamment dans un environnement très calme et que la distance entre les deux propriétés importe peu ; ils ajoutent également que la conformité de l’installation n’interfère pas pour l’existence d’un trouble anormal de voisinage, ce qui justifie la confirmation de l’ordonnance déférée ;

ils forment appel incident en ce qu’ils demandent que M. Y et Mme Z soient condamnés 'à procéder au déplacement de leur pompe à chaleur qui devra être implantée à une distance suffisante de la propriété de M. et Mme X et sans exposition directe pour ne générer aucune nuisance sonore, dans un délai d’un mois à compter de la signification de l’arrêt, le tout sous astreinte de 300 EUR/jour de retard, passé ce délai.

Les appelants énoncent que la preuve de l’existence du trouble anormal du voisinage allégué n’est pas rapportée, notamment parce que la pompe à chaleur et la chambre des époux X est séparée de l’immeuble voisin d’une large distance (30m) et qu’en référence à des tableaux relatifs aux bruits, les nuisances sonores sont minimes.

Ainsi ils produisent des mesures réalisées par un bureau d’étude qui font état d’une faible intensité sonore ; ils confirment leur position par plusieurs témoignages versés aux débats et précisent que leur installation est conforme aux règles de l’art .

ils contestent ainsi l’existence d’un trouble anormal du voisinage tel qu’énoncé, eu égard à la situation des lieux, à la distance importante entre les propriétés concernées (24 mètres) et à la mise en place des aides techniques pour éviter toute vibration .

Enfin ils indiquent que la solution technique de réduction des nuisances retenue en première instance est inapplicable, car leur modèle de chauffage se base sur un brassage d’air et ne peut donc être enfermé dans un coffrage comme prescrit .

En matière de trouble lié au bruit, il convient de se référer aux dispositions de l’art. R 1334-31 du Code de la Santé Publique qui prévoient que «aucun bruit particulier ne doit, par sa durée, sa répétition ou son intensité, porter atteinte à la tranquillité du voisinage ou à la santé de l’homme, dans un lieu public ou privé, qu’une personne en soit elle-même à l’origine ou que ce soit par l’intermédiaire d’une personne, d’une chose dont elle a la garde ou d’un animal placé sous sa responsabilité" ; il est cependant constant que s’agissant des personnes privées aucun seuil n’est prescrit .

M. et Mme A et G X se prévalent de deux constats d’huissier des 29 novembre 2011 et 1er décembre 2011 réalisés à leur demande (les consorts Y-Z étant entrés dans les lieux le 11 novembre 2017) aux termes desquels il est confirmé l’existence d’un bruit de souffle constamment audible et provenant de l’immeuble voisin, qui présente également une pompe à chaleur en façade latérale côté X ; ce bruit est audible de l’intérieur de la maison des époux X y compris fenêtres fermées et à fortiori, fenêtres ouvertes .

de plus les intimés font valoir que l’anormalité du trouble dépend de l’environnement de l’installation ; or la propriété de M. et Mme X est située en zone rurale dans un village calme et leur habitation est située dans une impasse, peu exposée à la circulation, ce que indiquent les deux officiers ministériels dans leurs constatations .

Aussi M. et Mme A et G X relèvent à juste titre que la distance de la pompe à chaleur à leur maison importe peu, puisqu’il convient de prendre en compte le bruit tel qu’il est perçu et mesuré en ce qu’il constitue une gêne .

Le premier juge avait repris ces éléments et les avait retenus en ce qu’il avait relevé que la pompe à chaleur de Monsieur Y et Madame Z est à l’origine de nuisances sonores, constitutives pour les époux X d’un trouble excédant les inconvénients normaux du voisinage ;

Les appelants contestent cette décision et produisent pour fonder leur position un rapport du BET qui est intervenu à la demande unilatérale des consorts Y et Z et s’est rendu sur place le 31 mai 2019 ; cette étude technique ayant été faite en l’absence de A et G X, ceux-ci concluent à son inopposabilité à leur égard .

Cependant aucune des mesures techniques, que ce soit les constats d’huissier de justice ou le rapport du BET n’ont été réalisées de manière contradictoire .

En outre, elles ont été valablement discutées dans le cadre de la présente instance et sont au demeurant complétées par des témoignages produits par les appelants ce qui les rend recevables ;

Il résulte tant du rapport BET LCM Acoustique du 11 juin 2019 ainsi que des trois constats produits par les appelants, le dernier étant du 14 février 2019 affirmant l’absence d’encastrement de la pompe nonbstant l’ordonnance du 23 janvier 2019, que le niveau maximal de décibels mesurés a été de 43 depuis le bureau de l’immeuble X, et se situe le plus souvent entre 30 et 40 dB .

Le bureau d’études sus énoncé, indique que le bruit d’équipement fixes tels les ventilateurs, climatiseurs ou pompes à chaleur sont englobés dans la catégorie de "bruits du voisinage" au sens de la circulaire du 27 février 1996 liée à la lutte contre les bruits de voisinage ;

Il conclut après écoute en période nocturne que 'la contribution sonore imputable au fonctionnement de la pompe à chaleur à 5 mètres au droit de la façade du riverain plaignant (…) est théoriquement inaudible dans les bandes de tiers d’octave à 10 Hz et qu’une contribution sonore audible de la PAC (pompe à chaleur) peut être considérée comme effective dans les bandes de tiers d’octave 125 Hzn 160 Hz, 200 Hz avec des émergences spectrales comprises entre 3.5 et 4.5 dB’ alors que la norme souhaitée est de +5 dB de jour et + 3 dB de nuit.

il considère 'l’absence de perturbations sonores à l’intérieur de l’immeuble des consorts Y/Z supérieures à 3dB’ et ' la possible confusion entre les émissions sonores de la PAC de M. Y et Mme Z avec les émissions sonores de l’autre équipement qui semble situé sur le propriété du riverain plaignant.

Par conséquent, il résulte de ces éléments confortés par trois témoignages de tiers au litige, indiquant le faible niveau sonore perçu pour eux de la part de la PAC, que l’existence d’un trouble manisfestement illicite n’est pas établie en l’espèce .

Un trouble de voisinage a été identifié du fait de la pose d’une pompe à chaleur sur la facade de l’immeuble des intimés ; il ne peut être caractérisé de trouble anormal du voisinage, y compris dans un milieu rural relativement calme, eu égard aux éléments de la cause sus énoncés ; dès lors l’ordonnance déférée sera infirmée en ce qu’elle a ordonné la mise en oeuvre d’une mesure technique, qui au demeurant apparaît comme incompatible avec le fonctionnement de l’équipement mis en cause .

Consécutivement les demandes indemnitaires et induites par le principe d’un trouble manifestement illicite, sont rejetées comme non fondées .

Référence: 

- Cour d'appel de Nancy, 1re chambre, 12 novembre 2019, RG n° 19/00612