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Le 18 septembre 2020

 

Le 16 décembre 2010, B R Z veuve Y, domiciliée à […], est décédée sans laisser d'héritiers réservataires.

Par testament olographe du 19 novembre 1997, déposé au rang des minutes de la SCP Strock Klepping et Ganem-Cohen, notaires associés à Puteaux (Hauts-de-Seine), établi le 19 novembre 1997, elle a institué l'Etat d'Israël légataire universel, dans les termes suivants :

« Ceci est mon testament.

Je soussignée B-R Y, née Z, née le […] à […] demeurant à […], institue comme légataire universel de tous mes biens meubles et immeubles l'Etat d'Israël pour des oeuvres charitables et sociales.

Je nomme comme exécuteur testamentaire le Consul d'Israël en poste au jour de mon décès.

Ceci est ma dernière volonté et je révoque tout testament antérieur.

Fait à Paris, le 19 Novembre 1997

[signature] »

Le 10 mars 1998, elle a créé en Israël une fondation charitable répondant au nom de « Fondation B-R et A Y » dans le but de distribuer des bourses d'études et de recherche à des étudiants ingénieurs ou des scientifiques de haut niveau dans les domaines notamment de la mécanique, de l'hydraulique, de l'électricité, et de l'aviation.

Par testament olographe du 9 septembre 2010, elle a légué la totalité de son patrimoine à monsieur G X ou en cas de décès à son épouse, B-H C, ce testament étant rédigé comme suit :

« Ceci est mon testament,

Je soussignée B R Y, née Z, […], en possession de tous mes moyens, demeurant […] déclare instituer pour mon légataire universel Mr G X demeurant […] né le […].

Sa femme, B-H et lui se sont occupés de moi de moi et m'ont témoigné plus d'affection depuis le décès de mon époux A que des enfants n'auraient pu le faire.

En conséquence, je lui lègue en totalité des biens meubles, présents et à venir qui composeront ma succession le jour de mon décès.

Si Mr G X venait à décéder avant moi, j'institue alors Mme B-H X née C le […] comme légataire universel.

Ce testament annule toutes les dispositions antérieures.

Fait à Paris le Neuf Septembre Deux Mille Dix. Ecrit et signé de ma main.

[Signature] »

Par acte d'huissier du 18 décembre 2014, l'Etat d'Israël, représenté par l'Administrateur des Biens de l'Etat d'Israël, lui-même représenté par le Consul d'Israël à Paris en exercice, a assigné Monsieur G X et son épouse Madame B-H C devant le tribunal de grande instance de Paris aux fins de voir prononcer la nullité du testament du 9 septembre 2010.

Une expertise a été réalisée.

--o--

Monsieur G X et madame B-H C épouse X soutiennent qu'il convient de consacrer les dernières volontés de la défunte et de les désigner légataires universels de cette dernière. Subsidiairement, ils sollicitent la désignation d'un expert en écriture afin d'examiner les originaux des deux testaments et déterminer si le testament daté du 9 septembre 2010 a été rédigé avant le mois de juillet 2010, date retenue pour le début des troubles cognitifs.

En réponse, l'Etat d'Israël qui conclut, à titre principal, à la nullité du testament du 9 septembre 2010 au visa des dispositions de l'article 970 du Code civil, fait valoir qu'il est établi que la date qu'y est apposée est fausse et qu'il est impossible de déterminer la date à laquelle le testament a été rédigé. Il conclut également à la confirmation du rejet de la demande de mesure d'instruction, estimant que « scientifiquement » l'expertise sollicitée « n'a pas de sens ».

Aux termes des dispositions de l'article 970 du code civil, « Le testament olographe ne sera point valable s'il n'est écrit en entier, daté et signé de la main du testateur : il n'est assujetti à aucune autre forme. »

Il n'est pas remis en cause que le testament daté du 9 septembre 2010 a bien été rédigé de la main de la défunte, seule la date à laquelle il a été établi par son auteur étant discutée.

Monsieur G X et madame B-H C épouse X estiment que « la situation peut être comparable à un testament non daté précisément » et que dans ces conditions, la jurisprudence impose de rechercher la véritable intention de la testatrice.

Il est vrai qu'en présence d'une date incomplète ou d'absence de date, un testament olographe n'encourt pas la nullité dès lors que des éléments intrinsèques à l'acte, corroborés par des éléments extrinsèques, établissent qu'il a été rédigé au cours d'une période déterminée et qu'il n'est pas démontré qu'au cours de cette période, le testateur ait été frappé d'une incapacité de tester ou ait rédigé un testament révocatoire ou incompatible.

A ce titre, Monsieur G X et madame B-H C épouse X qui se prévalent de la validité du testament en cause font valoir qu'au lendemain du premier testament, soit celui daté du 19 novembre 1997, la défunte a modifié son assurance vie en effectuant plusieurs versements au profit de son neveu et des appelants, exprimant ainsi, selon ces derniers, la volonté de soustraire ces sommes d'argent de l'assiette successorale revenant au légataire universel. Ils prétendent également que le testament objet du litige a été rédigé entre le 19 novembre 1997 et le 1er août 2010.

Ils ne produisent cependant, ni n'invoquent, aucun élément de nature à démontrer que la défunte ait pu rédiger le testament litigieux durant cette période. Au contraire, aux termes de son rapport, Madame I J, expert, affirme que la de cujus était dans l'impossibilité intellectuellement de produire un tel acte à partir du mois d'août 2010, sans que cela puisse signifier, comme le souligne à juste titre l'intimé, qu'elle a rédigé ledit testament avant le mois d'août 2010.

Si les appelants ajoutent que « l'Expertise a permis de connaître les circonstances dans lesquelles le testament avait été remis, puisque Feu Madame Y a remis une enveloppe scellée à Monsieur X à l'hôpital en lui confiant la mission qu'elle avait jugée impérative, de la remettre à son Notaire », la lecture du rapport d'expertise montre que l'expert a simplement exposé les propos qui lui ont été relatés à ce sujet par monsieur G X, sans que ceux-ci ne soient confirmés par un des éléments produits par les parties, aucun témoignage n'étant en particulier versé pour confirmer la remise d'une telle enveloppe par la de cujus.

Il résulte de ces éléments que la date du testament critiqué est inexacte et que celui-ci a été écrit avant septembre 2010.

Référence: 

- Cour d'appel de Paris, Pôle 3 - chambre 1, 16 septembre 2020, RG n° 19/00851