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Le 23 octobre 2019

La servitude de puisage est une servitude discontinue au sens de l’art. 688 du code civil, de sorte qu’elle ne peut être constituée que par titre, conformément à l’art. 691 du même code.

La création ou l’existence d’une servitude au profit d’un fonds dominant ne peut trouver son fondement que dans le titre du fonds servant, de sorte qu’il est indifférent qu’il n’en soit pas fait mention dans les titres de propriété du fonds dominant.

L’acte d’acquisition de leur propriété par les époux Y comporte la mention suivante de leurs vendeurs: «Monsieur et Madame D, vendeurs, déclarent que dans l’acte de vente par les Consorts E à leur profit en date du 6 avril 1982 ci-dessus énoncé, il a été stipulé que le puits situé en limite de propriété avec celle appartenant à Monsieur F (section B n° 712) a été construit à frais communs avec Mesdemoiselles H, précédents propriétaires de Monsieur G». Cet acte ne comporte pas de mention d’une quelconque servitude au profit des parcelles B 1239 et 1241.

Par acte authentique du 23 juillet 1935, M. T E et son épouse Mme U V, Mme W I et Mme W I veuve H ont vendu à M. AA J:

«1° Un droit de communauté de puits à eau établi sur la ligne mitoyenne de la propriété de M. et Mme E et de la propriété de Melle I et de Mme H.

2° Le droit d’accéder à ce puits et de circuler autour par un passage de un mètre de large créé pour partir de la route et aller en ligne droite au puits et par une bande de terrain de cinquante centimètres de large autour dudit puits. Le passage et cette bande de terrain sont fournis par moitié par M. et Mme E et par moitié par Melle I et Mme H.

Est comme condition de ladite vente à M. J ['] l’échange suivant': M. et Mme E cèdent à titre d’échange en s’obligeant conjointement et solidairement entre eux à toutes les garanties ordinaires et de droit, à Melle I et Mme H qui acceptent le droit de passer et de circuler librement en tous temps sur la moitié appartenant aux cédants du passage et de la bande de terrain dont il est ci-dessus parlé et en contre échange, Melle I et Mme veuve H en s’obligeant conjointement et solidairement aux mêmes garanties cèdent à M. et Mme E qui acceptent ['] le droit de passer et de circuler librement et en tous temps sur l’autre moitié appartenant auxdites dames dans lesdits passage et bande de terrain.

Au moyen des présentes, M. J sera propriétaire aura la jouissance des droits à lui vendus à compter de ce jour et tous les comparants auront droit également à compter de ce jour au passage et à la bande de terrain dont il est ci-dessus parlé.

Il est en outre expressément convenu ce qui suit entre les parties […]

3° Le sol du droit de passage et la bande de terrain dont il s’agit reste la propriété respective des vendeurs. Ce passage et cette bande de terrain seront communs entre tous les comparants qui pourront y passer et circuler comme bon leur semble.

4° Ledit passage et bande de terrain ne devront jamais être embarrassés ni cultivés et devront être entretenus en bon état à frais communs par tiers(Mademoiselle I et Madame H formant ensemble un tiers».

Il résulte de cet acte que M. J propriétaire de la parcelle B 712, désormais la parcelle B 1121, est devenu propriétaire du puits à eau dont la propriété est demeurée commune avec les époux E, Mme I et Mme H, et titulaire d’un droit de passage tel que décrit à l’acte, pour accéder audit puits. Il s’avère également que le passage et la bande de terrain demeuraient la propriété des vendeurs, et que chaque partie s’accordait un droit de passage sur la propriété de l’autre.

Il résulte des mentions sur l’origine antérieure de propriété des actes de leurs actes respectifs d’acquisition que les parcelles appartenant aux époux Y et aux époux X ont été la propriété commune des époux E-V, qui ont ensuite été divisées et cédées. Ainsi, le 6 avril 1982, les parcelles cadastrées section B n° 1238 et 1242 ont été cédées aux époux X, et les parcelles cadastrées section […] et 1241 ont été cédées aux consorts AE-AF qui les ont par la suite revendues aux époux Y le 7 décembre 1990.

Le croquis figurant au procès-verbal de bornage établi par M. K, AI-AJ, le […], illustre que la propriété des consorts E divisée et cédée aux époux X figure à l’Est de l’autre partie de la parcelle, qui a par la suite été cédée aux époux Y. Le puits et le passage litigieux sont situés à l’Ouest de la parcelle des époux Y, entre leur propriété et la parcelle B 1121. En conséquence, seule la parcelle des époux Y jouxte et comprend une partie du passage objet de la servitude d’accès au puits.

La cour relève ainsi que l’exercice de la servitude des époux E-V est localisé sur la partie Ouest du fonds servant, de sorte que la division de ce fonds sur une ligne Nord-Sud, a exclu la partie Est du fonds initialement servant de la servitude de puisage et de passage. Il n’est d’ailleurs pas établi que la division du fonds servant ait prévu le maintien d’une servitude de passage et de puisage au profit des parcelles B 1238 et 1242 qui ne présentent plus de contiguïté avec le passage et le puits litigieux.

La servitude discontinue de puisage et de passage ne pouvant s’acquérir que par titre, l’acquisition par prescription trentenaire est impossible, de sorte qu’il est indifférent que les époux X ont pu, par le passé, accéder au puits litigieux, cet accès n’étant pas source de servitude.

Les époux X évoquent cependant une acquisition de la servitude par destination du père de famille. En application de l’art. 694 du Code civil, il n’y a destination du père de famille que lorsqu’il est prouvé que les deux fonds actuellement divisés ont appartenu au même propriétaire, que c’est par lui que les choses ont été mises dans l’état duquel résulte la servitude et que, s’il existe un signe apparent, la servitude continue d’exister activement ou passivement en faveur du fonds aliéné ou sur lui.

Si les parcelles appartenant aux parties ont appartenu au même auteur, il n’est pas allégué et il ne résulte pas de la situation des lieux l’existence d’un signe apparent de servitude de la parcelle des époux Y au profit de celle appartenant aux époux X. Il n’est pas établi que le droit de communauté du puits a été vendu aux époux X. En outre, le droit de passage pour accéder au puits était accordé entre les parcelles constituant la limite Ouest de la propriété des époux Y où le puits se trouve, alors que les époux X ont acquis la partie divisée située à l’Est de celle des intimés. Le seul fait que les parcelles ne faisaient auparavant qu’une, laquelle disposait d’un droit de passage pour accéder au puits situé à la limite Est, ne permet pas de constituer un signe apparent de servitude au profit de la propriété des époux X.

En conséquence, les époux X ne disposent pas d’une servitude de puisage et de passage attachée à leur terrain situé au […], […] et 1242, sur la parcelle cadastrée section […] située […] au lieu-dit « Le Carroi », sur la même commune. Ils sont donc mal fondés à solliciter l’enlèvement de tout obstacle à l’exercice de cette prétendue servitude.

Le jugement est donc confirmé en ce qu’il a débouté les époux X de cette demande, sauf à dire que ces derniers ne bénéficient pas d’une servitude de puisage et de passage.

Référence: 

- Cour d'appel d'Orléans, Chambre civile, 21 octobre 2019, RG n° 18/00119