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Le 11 juin 2019

La société CDI, gérée par M. C, est devenue l'associée unique de la société LJDR, M. C devenant le gérant de cette dernière en 2009 ; le 21 janvier 2013, la société LJDR a remboursé à la société CDI la somme de 44'000 euro au titre de son compte courant d'associé ; un jugement du 11 avril 2013 a condamné la société LJDR à payer à son bailleur, la société Caramel, une somme supérieure à 40'000 euro au titre d'un arriéré de loyers ; la société LJDR a été mise en redressement judiciaire le 21 mai 2013, la date de cessation des paiements étant fixée au 7 mai 2013 ; la procédure a été convertie en liquidation judiciaire le 17 décembre 2013, la société MJA étant nommée liquidateur.

Soutenant que le remboursement du compte courant du 21 janvier 2013 était intervenu en fraude des droits des créanciers, le liquidateur a assigné la société CDI sur le fondement de l'action paulienne, afin de voir déclarer ce remboursement inopposable à la liquidation judiciaire et condamner la société CDI à lui restituer la somme de 44'000 euro. 

Pour accueillir la demande du liquidateur, l'arrêt d'appel énonce, d'un côté, que la fraude du débiteur, condition de l'action paulienne, implique la volonté ou la conscience de nuire à son créancier, mais que le débiteur ne peut agir en fraude des droits de son créancier lorsqu'il exécute une obligation souscrite envers un tiers, de l'autre, que si un associé peut se faire rembourser son compte courant à tout moment et immédiatement, ce retrait peut toutefois, dans certaines hypothèses, être constitutif d'une fraude et qu'il en est ainsi lorsque le dirigeant social se fait régler des sommes importantes correspondant au remboursement d'un compte courant d'associé au détriment des autres créanciers qu'il ne pouvait ignorer en raison de ses fonctions au sein de la société ; que l'arrêt retient que le 21 janvier 2013, M. C, dirigeant commun des deux sociétés, a fait rembourser par la société LJDR le compte courant de la société CDI, alors qu'il savait que la première était débitrice de la société Caramel, sa bailleresse, d'une somme équivalente au montant du compte courant et que ce remboursement obligerait la société LJDR à déclarer sa cessation des paiements ; qu'il relève ainsi que, dans un jugement du 20 septembre 2012, rendu dans un litige l'opposant à sa bailleresse, la société LJDR a reconnu rencontrer depuis plusieurs mois des difficultés financières, qu'un jugement du 11 avril 2013, condamnant la société LJDR à payer à sa bailleresse une somme supérieure à 40'000 euro au titre d'un arriéré de loyers, a relevé que la société LJDR ne contestait pas l'existence de cette créance et qu'un arrêt du 20 mai 2016 a fixé la créance de la société Caramel au passif de la procédure collective de la société LJDR à la somme de 43'210,42 euro, en précisant que cette créance n'était pas contestée ; que l'arrêt en déduit que la créance de la société Caramel, non contestée par la société débitrice, était certaine au moment où le compte courant de son unique associée, la société CDI, a été remboursé, et que, lors de ce remboursement, la société LJDR ne pouvait ignorer être redevable de l'arriéré de loyers réclamé par la société Caramel, et qu'elle était consciente de ce qu'elle ne pourrait payer cet autre créancier et serait contrainte de déclarer sa cessation des paiements.

En statuant ainsi, alors que l'action paulienne est subordonnée non seulement à la preuve de ce que le débiteur a conscience du préjudice causé à un créancier par l'acte querellé, mais également au fait que ce dernier constitue un acte d'appauvrissement créant l'insolvabilité, au moins apparente, du débiteur, cependant que le compte courant d'associé constitue un prêt consenti par l'associé dont la caractéristique essentielle est d'être, sauf disposition conventionnelle ou statutaire contraire, remboursable à tout moment, de sorte que, sauf s'il a été opéré en violation d'une convention ou des statuts de la société, ou sous la forme d'un paiement effectué par des moyens inhabituels, le remboursement de ce compte courant n'est pas attaquable par la voie d'une action paulienne à défaut de constituer un acte d'appauvrissement du débiteur, la cour d'appel a violé l'art. 1167 du Code civil, dans sa rédaction antérieure à celle issue de l'ordonnance du 10 février 2016.

Référence: 

- Cour de cassation, chambre commerciale, 15 mai 2019, N° de pourvoi: 18-10.403, cassation, inédit