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Le 03 juin 2019

Aux termes d'un acte d'apport en date du 1er décembre 1972 la Sa Société Nationale des Poudres et Explosifs ultérieurement dénommée SNPE est devenue propriétaire d'un terrain de 49 hectares 34 a et 35 ca, jusqu'alors propriété de l'Etat, situé sur la commune du Fauga (Haute-Garonne) cadastré Section B, numéro 916, [...] constituant le Parc du Fauga, sur lequel elle a stocké jusqu'en 1993 des explosifs et des munitions de sa fabrication (poudre d'artillerie et de chasse et fûts de phénol).

N'ayant plus l'utilité des lieux, elle a envisagé de vendre ce terrain, matériellement devenu désaffecté et a fait le nécessaire à cette fin avec la commune du Fauga pour le rendre juridiquement constructible et permettre une opération d'aménagement urbain.

En 2003 une zone d'aménagement concertée (Zac) spécifique a été créée par modification du plan d'occupation des sols (Pos).

Selon acte authentique en date du 15 décembre 2003 la Snc De Labourdette, émanation de la société Eiffage Immobilier Sud, a acquis le terrain de la Sa SNPE pour un prix de 1'341'551,35 euro HT dont 426'857,25 euro payable comptant, le solde de 914'694,10 euro sur une période de trois ans.

Le terrain vendu, devenu constructible, étant destiné à la réalisation d'un programme de 164 lots de terrain à bâtir, comprenant des maisons individuelles groupées et une résidence pour personnes âgées pour un coût de 2'256'965,71 euro, elle a entrepris la réalisation de travaux d'infrastructure et la commune a réalisé une station d'épuration avec la participation financière de cette société.

Elle a souscrit divers marchés pour procéder aux démolitions et à la mise en place des VRD et les travaux ont démarré sur ordre de service donné en décembre 2004.

En mars 2005, à l'occasion de la réalisation des travaux d'aménagement des réseaux, des munitions ont été découvertes dans le sol, révélant une situation d'insécurité qui a conduit les autorités communales et préfectorales à suspendre les travaux dans l'attente d'un diagnostic précis des terrains.

Les rapports dressés fin 2005 sur l'historique et le diagnostic du site ont mis en évidence une pollution pyrotechnique considérable sur l'ensemble du site qui a pour origine des actes de destructions de munitions opérées en 1944 par l'armée allemande, peu avant sa retraite, qui ont laissé un grand nombre de munitions non explosées, de sorte que celles-ci et des résidus de celles qui ont explosé sont disséminés sur tout le site avec une concentration particulière sur les lieux d'enfouissement ou de destructions, à des profondeurs variables ; le terrain reste constructible sous réserve de réaliser des travaux de dépollution dont le coût se situe dans une fourchette allant de 2'500'000 euro à 4'500'000 euro et pour une durée de 18 mois à deux ans, soit un montant en toute hypothèse très supérieur au prix d'achat du bien.

Depuis cette date, la Snc De Labourdette n'a pas été en mesure de reprendre son projet immobilier et l'aménagement de la ZAC n'a pas été poursuivi.

Par acte d'huissier en date du 20 juin 2007 la Snc De Labourdette a fait assigner la Sa SNPE devant le TGI de Toulouse en exécution forcée de son obligation de délivrance, tout en sollicitant l'organisation d'une expertise pour connaître la nature et le coût des opérations à entreprendre.

Appel a été relevé du jugement de première instance.

L'action tendant à la résolution de la vente portant sur un terrain désaffecté ayant initialement servi à l'entrepôt d'armes de guerre doit être examinée non pas au regard de l'art. 1604 du Code civil (obligation de délivrance) mais dans le cadre de la garantie des vices cachés dont les modalités sont fixées par les art. 1641 et suivants du Code civil. En effet, il ne saurait être reproché au vendeur d'avoir manqué à son obligation de délivrance - le défaut de conformité consistant en une différence entre la chose promise au contrat et la chose délivrée - dès lors que l'acte de vente rappelle la nature initiale du terrain vendu et qu'il ne s'est pas engagé à délivrer un terrain dépourvu de toute pollution. Toutefois, la pollution du sous-sol constitue un vice caché rendant la chose impropre à l'usage auquel elle est destinée dès lors que l'aménagement du terrain pour la construction du programme immobilier projeté est rendu impossible sans procéder, au préalable, à de très importants et coûteux travaux de dépollution du sous-sol indispensables à l'élimination du danger présenté pour la sécurité du chantier et des futurs utilisateurs.

Si l'action rédhibitoire a été exercée quelques mois après la découverte du vice dans son ampleur, soit à bref délai conformément à l'art. 1648 ancien du Code civil, elle est irrecevable puisque se heurtant à la clause exclusive de garantie stipulée dans l'acte de vente. La clause exclusive de garantie stipulée dans l'acte de vente est opposable à l'acheteur, la mauvaise foi du vendeur de nature à la paralyser n'étant pas établie. Il résulte de l'expertise que des opérations de déminage et de décontamination ont été exécutées lors des précédentes ventes. La présence de munitions n'a pas été décelée après réhabilitation du terrain et la commission interministérielle de contrôle de déminage a jugé le terrain comme ayant été dépollué à 95 % sur une profondeur de 30 centimètres.

Le vendeur a satisfait à son obligation d'information prévue à l'art. L. 514-20 du Code de l'environnement tel qu'il résulte de l'acte notarié indiquant que l'acheteur a été informé par écrit de ce qu'une installation classée pour la protection de l'environnement, ayant fait l'objet d'un arrêté d'autorisation délivré par le préfet, avait été exploitée sur le terrain vendu et faisant référence expresse au diagnostic de sol et environnemental.

Par ailleurs, l'acheteur a reconnu avoir été averti des dangers ou inconvénients importants pouvant résulter de l'activité exercée dans l'immeuble acquis.

Référence: 

- Cour d'appel de Toulouse, Chambre 1, section 1, 15 avril 2019, RG N° 16/01608