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Le 05 mars 2018

Par acte sous signature privée du 4 avril 2009, M. et Mme F H ont donné à bail à Mme X et à M. Y un appartement dépendant d’un immeuble sis 11 résidence des Sablons à Perthes.

Par acte d’huissier de justice du 29 octobre 2014, les bailleurs ont fait délivrer à leurs locataires un congé pour vendre.

Par acte d’huissier de justice du 27 novembre 2014, les bailleurs ont fait délivrer à leurs locataires un commandement de payer, qui est demeuré infructueux.

Par acte d’huissier de justice du 6 février 2015, M. et Mme F H ont fait assigner leurs locataires devant le tribunal d’instance de Melun, en constatation de la résilation du bail, expulsion et paiement de l’arriéré locatif.

Les locataires ont argué du caractère frauduleux du congé.

Il résulte des dispositions de l’art. 15 de la loi du 6 juillet 1989 que "lorsqu’il est fondé sur la décision de vendre le logement, le congé doit, à peine de nullité, indiquer le prix et les conditions de la vente projetée. Le congé vaut offre de vente au profit du locataire : l’offre est valable pendant les deux premiers mois du délai de préavis…… A l’expiration du délai de préavis, le locataire qui n’a pas accepté l’offre de vente est déchu de plein droit de tout titre d’occupation sur le local". Ce texte n’imposant aucun encadrement, le bailleur détermine librement le prix auquel il entend offrir son logement au locataire en place et rien ne s’oppose à ce qu’il situe la valeur au-dessus du marché, l’intention spéculative n’étant pas sanctionnée en elle-même et la surestimation du prix pouvant résulter d’une ambition excessive du bailleur désireux de vendre au meilleur prix.

Néanmoins, le locataire reste recevable à invoquer la fraude sur le fondement des dispositions du Code civil en faisant valoir que le caractère manifestement excessif du prix caractérise un défaut de sincérité de l’intention de vendre. La fraude ne se présumant pas, la charge de la preuve incombe au locataire qui doit établir que le bailleur a intentionnellement fixé le montant de son offre à un chiffre manifestement excessif en vue de le décourager de se porter acquéreur et de l’évincer.

En l’espèce, le congé pour vendre délivré à Mme X et M. Y, indiquait un prix de 280 000 euros, pour une maison de 90 mètres carrés environ, sur deux niveaux, comprenant entrée, séjour, cuisine aménagée, wc, garage et cellier et à l’étage, quatre chambres, salle de bains. Le bien, qui est mitoyen d’un côté, comporte également une cave sous remise et un jardin privatif de 500 mètres carrés environ. Il est situé dans la résidence des Sablons à Perthes.

Afin de démontrer, comme il leur incombe, que le prix proposé est manifestement excessif, Mme X et M. Y versent aux débats :

- une publicité de l’agence Foncia de Saint-Fargeau-Ponthierry indiquant qu’un bien a été vendu par ses soins en Perthes en Gâtinais pour un prix de 235' 000 euro incluant les frais d’agence. Cette annonce publicitaire montre la photographie d’une maison individuelle non mitoyenne et a fait l’objet d’annotations manuscrites des appelants indiquant que le bien vendu comporterait six pièces et un garage, et qu’il s’agit, comme le montre la photographie, d’une maison indépendante,

-  un extrait d’une base de transactions immobilières (Bien), délivré le 11 mai 2017, recensant les ventes réalisées dans un rayon de 100 mètres de la résidence les Sablons sur la période de janvier 2006 à avril 2016, faisant apparaître un montant moyen de transaction de 216' 456 euro.

Ces deux pièces sont toutefois insuffisantes, à défaut d’estimation du prix de la maison elle-même, pour justifier du caractère manifestement excessif du prix de vente proposé de 280 '000 euro.

En effet, les éléments de comparaison extraits de la base des notaires "BIEN", qui incluent la transaction conclue par l’agence Foncia pour 227' 000 eurs en septembre 2014, sont trop peu nombreux, ne sont pas suffisamment précis et sont, pour la plupart, trop anciens ; ils ne délivrent, au surplus, aucun renseignement sur l’état des biens de comparaison et leur adresse, les prix pouvant varier très sensiblement d’un quartier à l’autre dans une même ville ou même d’une rue à l’autre au sein d’un même quartier ; la transaction de l’agence Foncia, en outre, ne précise pas la surface du bien vendu.

Ces éléments de comparaison ne permettent donc pas démontrer que l’offre faite aux appelants serait manifestement excessive.

Au surplus, il y a lieu de relever que les locataires ont accepté l’offre proposée, de sorte qu’ils ne peuvent utilement soutenir que le prix volontairement dissuasif les aurait dissuadés de se porter acquéreur.

Ils sont mal fondés, en outre, à faire grief aux bailleurs de n’avoir accompli aucune diligence en vue de vendre le bien, dès lors que ces diligences n’avaient pas lieu d’être du fait que les locataires avaient accepté l’offre qui leur avait été faite et qu’il résulte, au surplus, des dispositions de l’art. 15, alinéa 3, de la loi du 10 juillet 1989 que c’est au locataire ayant accepté l’offre qu’il incombe d’accomplir les diligences nécessaires à la finalisation de la vente dans un délai de deux mois à compter de la date d’envoi de sa réponse au bailleur.

Référence: 

- Cour d'appel de Paris, pôle 4, chambre 3, 1er mars 2018, RG N° 16/07287