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Le 16 octobre 2020

 

Selon l'article 1728 du Code civil, le locataire doit user de la chose louée en bon père de famille. Il résulte par ailleurs de l'article 1184 du même code, dans sa rédaction antérieure à celle issue de l'ordonnance 2016-131 du 10 février 2016, que la condition résolutoire est toujours sous entendue dans les contrats synallagmatiques pour le cas où l'une des parties ne satisferait pas à son engagement

Le contrat de résidence conclu le 25 octobre 2012 entre l'association Amli et Mme B. stipule en son article 2, que le preneur s'engage à user paisiblement de la chose louée, à se soumettre à toutes conditions légales et d'usage et aux conditions du règlement des locations qu'il reconnaît avoir reçu et accepté lors de la signature du contrat, le règlement de location précisant dans son chapitre III «usage des lieux» article 6° «rapports avec les voisins» que le résident jouira des locaux en bon père de famille et qu'il s'interdit toute action susceptible de nuire aux rapports de bon voisinage; que par mesure d'hygiène, de salubrité et de tranquillité des voisins, l'élevage d'animaux dans les lieux loués ou mis à disposition de la collectivité des résidents est proscrit et que la présence d'animaux domestiques familiers est autorisée dans les lieux loués, sauf dans les caves et parties communes pour autant qu'elle n'engendre pour les autres résidents aucune nuisance.

Il sera également rappelé que s'il résulte de l'article 10 de la loi n° 70-598 du 9 juillet 1970, que le bailleur ne peut empêcher le locataire de détenir un chat dans un local d'habitation dans la mesure où il s'agit d'un animal familier, encore faut-il qu'il ne trouble pas la jouissance des occupants.

En l'espèce, l'association AMLI produit au soutien de ses prétentions :

- la lettre qu'elle a adressée à Mme B. le 20 février 2017, constatant que depuis 2013, elle héberge plusieurs chats à l'intérieur de son logement ce qui génère de nombreuxtroubles locatifs au sein de la résidence, et lui reprochant de ne pas avoir donné suite aux deux avertissements adressés en recommandé les 30 septembre 2013 et 7 septembre 2015 lui demandant de régulariser la situation

- la lettre adressée à Mme B. le 9 juin 2017 aux termes de laquelle elle expose qu'à l'issue de l'entretien avec la responsable d'établissement qui a effectué une visite du logement, en présence d'un membre de concertation qu'elle avait choisi pour l'assister, Mme B., qui a produit les carnets de vaccination des deux chats qu'elle héberge, s'est engagée à ne plus prendre d'animaux supplémentaires dans le logement et ne plus obstruer les canalisations de la salle de bain en déversant dans celle-ci de la litière pour chats. Or, depuis cette date, de nouvelles plaintes ont été adressées par les résidents à la responsable d'établissements qui a effectué le 2 mai 2017, en présence de la locataire et avec son accord, une nouvelle visite du logement au cours de laquelle ont été constatées la présence d'une dizaine de chats à l'intérieur du logement et une nette dégradation des conditions d'hygiène': litières sales et nauséabondes, excréments au sol, traces d'urine et tapisseries dégradées

- le courrier recommandé adressé à Mme B. le 1er octobre 2018 faisant état de la présence de plusieurs chats à l'intérieur du logement et lui demandant une nouvelle fois de prendre les dispositions nécessaires pour rétablir de bonnes conditions d'hygiène dans son appartement.

Par ailleurs, outre les témoignages produits en première instance, l'appelante se prévaut de nouvelles attestations dont rien ne permet de contester la valeur probante, rédigées les 24 et 25 octobre 2018 par :

- M. Jean-François R. faisant état des nuisances imputables à Mme B. du fait des mauvaises odeurs constantes dues à son élevage de chats et des déchets qu'elle dépose quotidiennement aux abords du bâtiment

- Mme Monique R.'qui déclare être incommodée, lorsqu'elle rend visite à M. S., par les désagréables odeurs dans son appartement situé au-dessus de celui de Mme B. et précise que ces odeurs persistantes d'urine de chats se répandent également dans le couloir, qu'elle a visité l'appartement de Mme B. et a pu constater les dégâts causés par les chats

- Mme Ilona K., locataire d'un appartement dans la résidence, qui relate que Mme B. déposait toutes les nuits, dans un angle du trottoir en face de ses fenêtres, des croquettes ou même de la pâtée pour nourrir les chats errants et au lever du jour les pigeons, à l'origine de grosses mouches vertes envahissant son logement,'et qu'elle continue à lancer par sa fenêtre du pain et des biscottes pour attirer les pigeons

- Mme Béatrice B., voisine immédiate de Mme B., qui se plaint d'odeurs d'urine de chatsen provenance de l'appartement de celle-ci, ces odeurs pénétrant dans son logement si elle laisse la porte d'entrée ouverte trop longtemps

- Mme Marie-Denise B.'qui fait état d'odeurs pestilentielles émanant des déjections de chats, insupportables surtout par grandes chaleurs, provenant de l'appartement de Mme B.

- Mme Naïma M.'qui déclare être fortement incommodée par de fortes odeurs de déjections de chats lorsqu'elle se rend chez sa voisine, Mme V., au premier étage de l'immeuble et ajoute que le dépôt d'alimentation pour chats devant la résidence provoque de fortes odeurs et attire les pigeons et les rats, ces désagréments étant le fait de Mme B.

- M. Yves B.'qui relate que lorsqu'il se rend au premier étage de même lorsqu'il utilise l'ascenseur, il a remarqué les odeurs désagréables d'urine de chats, émanant de l'appartement de Mme B.'

- Mme Henriette T., âgée de 95 ans et locataire d'un logement situé au premier étage de la résidence, qui se déclare gênée par les odeurs d'urine de chats provenant du logement de Mme B. et souhaite que le problème soit résolu.

Enfin, il résulte des pièces du dossier que, sollicitée par Mme K. agissant en qualité de curatrice de M. S. P., locataire d'un logement dans la résidence, l'association AMLI a mandaté Maître L., huissier de justice à Sarreguemines, lequel a établi le 22 octobre 2018, un procès-verbal aux termes duquel il relate qu'en présence de Mme Meyer O., chef d'établissement de la résidence et de Mme K., tutrice de M. S. P., il s'est rendu à l'appartement de Mme B. laquelle a ouvert sa porte et lui a déclaré qu'elle héberge actuellement quatre chats dans le logement, dont deux lui appartiennent et deux appartiennent à l'école du chat, qu'il a constaté dès que Mme B. a ouvert la porte des odeurs nauséabondes en provenance de son appartement qui se sont diffusées dans le couloir et que Mme B. lui a déclaré qu'elle ne conservera que deux chats et qu'elle va prendre contact avec Mme Meyer O. et Mme Marise pour que les deux autres chatssoient repris par l'école du chat. Maître L. indique qu'il s'est ensuite rendu à l'appartement situé au 2ème étage, occupé par M. S., lequel lui a déclaré téléphoniquement qu'il ne peut jouir paisiblement de son logement en raison des odeurs nauséabondes, qu'avec son autorisation et en présence de Mme Meyer O. et de Mme K., il a pénétré dans le logement et a constaté dans la salle de bain des odeurs d'urine de chats insoutenables.

L'affirmation de Mme B. selon laquelle elle ne possède qu'un chat même s'il lui arrive à titre occasionnel d'en héberger en dépannage, est démentie par ces pièces et la réalité des nuisances occasionnées aux occupants de l'immeuble, résultant des odeurs nauséabondes identifiées comme des odeurs d'urine de chats en provenance de son appartement et perceptibles tant dans les logements voisins que dans les parties communes, est largement démontrée par les éléments relevés ci-dessus, en particulier les constatations de l'huissier de justice.

Ces nuisances, anciennes et persistantes à ce jour, malgré les rappels à l'ordre délivrés par la bailleresse en butte aux doléances des occupants de l'immeuble, caractérisent des manquements graves et répétés de l'intimée à son obligation légale et contractuelle d'user paisiblement de la chose louée et constituent un motif légitime et sérieux de résiliation du contrat de résidence.

Il convient, dans ces conditions, d'infirmer le jugement entrepris et de faire droit à la demande de résiliation du contrat de résidence formée par l'association AMLI qui est tenue d'assurer une paisible jouissance aux autres locataires. En conséquence de la résiliation du contrat de résidence, Mme B. devra payer à l'association AMLI une indemnité d'occupation égale au montant mensuel de la redevance et des charges à compter de l'arrêt et jusqu'à libération effective des lieux. Il n'y a pas lieu en revanche d'assortir les condamnations d'une astreinte, le concours de la force publique se révélant suffisant.

Référence: 

- Cour d'appel de Metz, 3e chambre, 12 décembre 2019, RG n° 18/02762