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Le 04 octobre 2020

 

En vertu des dispositions de l’article 552 du Code civil, la propriété du sol emporte la propriété du dessus et du dessous.

L’article 553 du même code dispose que toutes constructions, plantations et ouvrages sur un terrain ou dans l’intérieur sont présumés faits par le propriétaire à ses frais et lui appartenir, si le contraire n’est prouvé ; sans préjudice de la propriété qu’un tiers pourrait avoir acquise ou pourrait acquérir par prescription soit d’un souterrain sous le bâtiment d’autrui, soit de toute autre partie du bâtiment.

Il résulte en l’espèce des pièces du dossier que le hangar était implanté à l’origine sur les parcelles 250/79 et 249/79, appartenant à monsieur E X et son épouse, madame C Y.

À la suite de la division de la parcelle 249/79 en deux parcelles 272/79 et 273/79, attribuées chacune à l’un des ex-époux, le hangar s’est trouvé situé pour un tiers sur la parcelle 272/79 appartenant à monsieur E X et pour les deux tiers sur la parcelle 273/79 devenue propriété de madame C Y.

Les parties ayant entendu liquider totalement leur communauté selon procès-verbal de liquidation et partage de communauté en date du 29 décembre 2011 passé en l’étude de maître Maupomé, notaire, et acte complémentaire du 30 août 2012 c’est à tort que le premier juge a retenu que le hangar était resté en indivision, en ce qu’il n’avait fait l’objet d’aucune division en lots distincts, alors que par l’effet de la division parcellaire, Madame Y s’est trouvée propriétaire pour les deux tiers du bâtiment et Monsieur E X du tiers restant, correspondant à la propriété du sol qui leur a été attribuée.

Il sera d’ailleurs relevé que monsieur E X a obtenu le permis de démolir sa partie du hangar, agissant ainsi en qualité de seul propriétaire du tiers du hangar reposant sur le terrain qui lui a été alloué; que madame Y ne n’est pas opposée à ce qu’il dispose ainsi de sa partie du bâtiment, puisqu’elle se borne à demander indemnisation des conséquences des travaux de démolition sur la part du hangar lui appartenant.

Le jugement déféré sera en conséquence infirmé en ce qu’il a débouté madame Y de l’ensemble de ses demandes, dont il sera relevé qu’elles ne tendent qu’à la réparation d’un préjudice personnel.

Au fond:

Madame Y fonde sa demande sur les articles 1240 ou 1242 du code civil.

La responsabilité du fait des choses ne peut se concevoir en l’espèce, les préjudices dont se plaint Madame Y résultant de la démolition de la partie du hangar dont Monsieur E X était propriétaire.

La responsabilité découlant de l’article 1240 du code civil suppose la démonstration d’une faute en lien de causalité avec le préjudice allégué.

Pour justifier sa demande, l’appelante se fonde sur un procès-verbal de constatations relatives aux causes et circonstances et à l’évaluation des dommages en date du 24 mai 2016, effectué à la diligence de l’assureur commun des parties, en présence de Monsieur H I expert intervenant pour ACM, assureur de Monsieur X et de Madame Z J inspecteur ACM assureur de Madame Y, dont il ressort que:

—  un jour de cinq à dix centimètres existe entre le bardage et la couverture en plaques de fibrociment amiantées, Madame Y se plaignant d’infiltrations d’eau lors de pluies battantes,

—  la travée démolie de la dépendance comportait le contreventement de la charpente métallique. De ce fait, les deux travées restantes ne sont plus contreventées,

—  l’ancien portique en pignon de la dépendance en charpente métallique comportait un poteau central en profilés métalliques, inexistant sur le portique intermédiaire devenu pignon.

Ils concluent que l’origine des désordres est imputable à la destruction volontaire en propre régie par Monsieur E X de l’une des trois travées composant la structure de la dépendance en question.

La remise en état des désordres est chiffrée à la somme de 4.895 EUR.

Monsieur E X critique ce rapport au motif que les intervenants ne sont pas neutres, puisque mandatés par le même assureur et que l’un d’eux, madame Z, n’est pas expert et ne possède pas de qualification technique.

Il sera cependant relevé que monsieur E X a précisément été assisté par monsieur H I, dont la qualité d’expert n’est pas contestée ; qu’il ne résulte pas des pièces du dossier d’indice selon lesquelles les auteurs du rapport n’auraient pas été impartiaux.

L’appelante se fonde également sur un procès-verbal de constat établi par maître Honor, huissier de justice à Cernay, dont il ressort que le bardage métallique est posé en dents de loup, laissant apparaître des jours plus ou moins importants en haut et en bas du bardage ; que le bardage ne ferme pas le hangar et ne l’isole pas des intempéries du fait de son montage approximatif ; qu’il existe des traces d’humidité sur la couvertine'; que par comparaison, le mur côté gauche du hangar situé à l’opposé de la partie détruite est sain, le bardage étant correctement posé et jouant son rôle protecteur des intempéries. L’huissier constate par ailleurs la présence d’une fondation béton en partie gauche, sur laquelle repose la structure du hangar, mais pas en partie droite ; qu’un pilier d’aggloméré a été sectionné, madame Y précisant que ce pilier n’avait à l’origine pas vocation à supporter la structure, mais que la démolition partielle du hangar a abouti à faire reposer le poids de la structure sur ce pilier.

Ce faisant, l’huissier ne fait que rapporter les déclarations de l’appelante, sans avoir effectué de constatations de son propre chef quant au fait que la structure du bâtiment repose sur un pilier qui n’avait pas vocation à la recevoir.

Monsieur E X conteste les conclusions de l’expertise ACM, en se fondant sur un rapport non contradictoire effectué le 5 janvier 2016 par monsieur K-L A, architecte, qui constate que le contreventement n’a pas été modifié ni touché sur la charpente ; que toutefois, la jonction entre le bardage vertical de pignon et les plaques ondulées en fibrociment manque et que l’eau et l’air

peuvent s’y encastrer et causer irrémédiablement des troubles d’étanchéité. monsieur A indique en avoir fait part à monsieur E X, qui lui a dit en être conscient et l’accepte sans discuter. Il préconise la mise en conformité de l’ouvrage, en posant une pièce de zinguerie par un artisan qualifié, posé sur l’arête de jonction.

Il verse également aux débats un courriel de l’entreprise MF Charpente du 28 août 2017, qui indique, au vu de photographies confirmant des constatations faites sur place, que le hangar est composé de plusieurs travées identiques ; que le fait d’en avoir déposé une n’engendre aucune incidence quant à la stabilité du bâtiment.

Alors que le démontage de la partie du bâtiment appartenant à monsieur E X a été effectué courant 2015 et qu’il n’est fait état d’aucune dégradation du bâtiment postérieurement à cette démolition partielle, force est de constater que le caractère particulièrement peu informatif du procès-verbal de constatation des intervenants ACM ne permet pas de démontrer l’atteinte qui aurait été portée à la solidité du bâtiment et l’absence de contreventement. Il sera relevé par ailleurs qu’aucune pièce n’établit l’état dans lequel se trouvait le bâtiment avant intervention de monsieur E X.

En revanche, il est clairement établi que monsieur X n’a pas remis en place un bardage étanche dans les règles de l’art. L’intimé ne peut à cet égard se retrancher derrière le fait que le hangar en question ne comporte de fermeture que sur trois côtés, que sa façade avant est entièrement ouverte et que le bardage n’a été remis par lui que dans un souci esthétique, alors que le bâtiment, certes ouvert sur l’avant, était clos sur les trois autres côtés, de sorte qu’il s’en déduit que la fermeture sur les côtés assurait une protection contre les intempéries.

Il convient en conséquence de condamner monsieur E X à faire effectuer, dans un délai de trois mois à compter de la signification de l’arrêt à intervenir, des travaux de remise en état du pignon de façade assurant l’étanchéité du bardage mis en place. Il n’apparaît pas nécessaire d’assortir cette condamnation d’une astreinte.

Les autres demandes de travaux seront rejetées, à défaut pour madame Y de rapporter la preuve de ce que les deux travées subsistantes ne sont pas contreventées, que l’écoulement des eaux de pluie a été modifié et que l’intimé a ainsi porté atteinte à la solidité de l’ouvrage.

Sur la demande de dommages et intérêts formée par l’appelante:

Madame Y soutient que des matériaux stockés dans sa partie de hangar ont été endommagés du fait des infiltrations d’eau.

Elle ne verse cependant aux débats aucun élément de nature à établir cette allégation, aucune constatation n’ayant été fait ni par les experts ACM ni par l’huissier mandaté par elle pour effectuer un procès-verbal de constat le 24 avril 2019 et aucune autre pièce du dossier ne venant confirmer ses affirmations.

À défaut de démontrer l’existence d’un préjudice, l’appelante sera déboutée de sa demande indemnitaire.

Sur l’appel incident :

Monsieur E X forme une demande de dommages et intérêts en réparation de son préjudice moral, pour procédure abusive ainsi qu’en raison d’un troubleanormal de voisinage qu’il subirait du fait des objets entreposés par l’appelante sur son terrain.

Il ne peut être fait droit à sa demande, dans la mesure où les prétentions de l’appelante prospèrent au moins partiellement, de sorte que le recours qu’elle a formé, en usant de son droit pour ce faire, ne peut être qualifiée d’abusif ; que pour les mêmes motifs, aucun préjudice moral n’est de même démontré.

Enfin, il ne résulte nullement du procès-verbal de constat établi à la demande de l’intimé le 29 octobre 2019 par Maître B, huissier de justice, que Monsieur X subisse un trouble de voisinage en raison des matériels et objets entreposés par l’appelante dans le hangar.

Le fait que le cas échéant, l’appelante abrite à longueur d’année une caravane dans ce hangar, en contravention au règlement du plan local d’urbanisme, n’est pas de nature à causer un préjudice à l’intimé, justifiant l’allocation de dommages et intérêts.

Le jugement déféré est en conséquence confirmé en ce qu’il a rejeté la demande indemnitaire formée à titre reconventionnel par monsieur X.

Référence: 

- Cour d'appel de Colmar, Chambre 3 a, 28 septembre 2020, RG n° 18/04035