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Le 25 juin 2020

 

Aux termes des dispositions de l'article 971 du Code civil, le testament par acte public est reçu par deux notaires ou par un notaire assisté de deux témoins.

L'article 972 du même code dispose que si le testament est reçu par deux notaires, il leur est dicté par le testateur ; l'un de ces notaires l'écrit lui-même ou le fait écrire à la main ou mécaniquement.

S'il n'y a qu'un notaire, il doit également être dicté par le testateur; le notaire l'écrit lui-même ou le fait écrire à la main ou mécaniquement.

Dans tous les cas, il doit en être donné lecture au testateur.

Lorsque le testateur ne peut s'exprimer en langue française, la dictée et la lecture peuvent être accomplies par un interprète que le testateur choisit sur la liste nationale des experts judiciaires dressée par la Cour de cassation ou sur la liste des experts judiciaires dressée par chaque cour d'appel. L'interprète veille à l'exacte traduction des propos tenus. Le notaire n'est pas tenu de recourir à un interprète lorsque lui-même ainsi que, selon les cas, l'autre notaire ou les témoins comprennent la langue dans laquelle s'exprime le testateur.

Lorsque le testateur peut écrire en langue française mais ne peut parler, le notaire écrit lui-même le testament ou le fait écrire à la main ou mécaniquement d'après les notes rédigées devant lui par le testateur, puis en donne lecture à ce dernier. (...)

Par acte authentique en date du 7 juillet 2009, maître Bernard P, notaire à Solesmes, s'est rendu au domicile de Mme Anne J. Veuve B. sis [...] et a établi le testament suivant:

"Ceci est mon testament.

Je révoque tout testament antérieur.

Je lègue à ma fille, Mademoiselle Anne B., demeurant à [...], pour les bons soins qu'elle m'apporte mes droits dans mes biens à [...] ainsi que la quotité disponible de ma succession si cette dernière n'est pas utilisée en totalité pour ce legs.

Je souhaite lors du règlement de ma succession que ne soit pas oubliée l'avance qui a été consentie à mon fils si ce dernier ne l'a pas remboursé".

A la fin du testament, le notaire a ajouté la mention suivante: "Après que le notaire ait donné lecture en entier des présentes au testateur, ce dernier a déclaré pouvoir le signer, être d'accord avec les termes et ce bien que son usage de l'expression soit limité".

Alors que le testateur doit énoncer lui-même et de façon orale ses dispositions et qu'il ne peut y être suppléé par de simples signes, fussent-ils aussi expressifs et aussi peu équivoques que possible, il résulte des bilans orthophoniques produits aux débats que Mme J. Veuve B avait subi deux accidents vasculaires cérébraux en avril 2003 et septembre 2004, présentait des troubles phasiques, étant atteinte d'une "aphasie motrice de BROCA" entraînant d'importantes difficultés de communication, Mme R-P, orthophoniste ayant examiné Mme J. Veuve B. le 5 mars 2009, soit quelques mois avant la rédaction du testament litigieux, précisant que "Mme B. ne s'exprime que par gestes, mimiques, interjections et 'oui'/ 'non'. Sa communication reste donc très sévèrement perturbée par des troubles arthriques, un important manque du mot ainsi qu'une apraxie gestuelle. La compréhension des consignes simples est préservée mais les épreuves sont entravées par une restriction du champ visuel droit et parfois par une dissociation automatico-volontaire sur les oui/non. Des troubles de l'attention et de la mémoire sont relevés."

Si Mme B. produit aux débats un courrier du docteur G. en date du 5 septembre 2006 aux termes duquel celui-ci précise que "l'interrogatoire de la patiente est difficile du fait d'une aphasie et sans qu'il y ait par contre de problème de compréhension'" et une attestation établie par le Docteur L, médecin traitant de Mme J Veuve B, indiquant qu''en 2009, malgré des troubles du langage liés à un accident vasculaire cérébral, il était possible de communiquer avec elle, force est de constater que le courrier du Docteur G. est daté de 2006, soit près de trois ans avant la rédaction du testament et que l'attestation établie par le docteur L ne présente pas de caractère circonstancié alors que Mme R-P, orthophoniste en charge du suivi de Mme J Veuve B a pu préciser qu'à l'occasion du bilan de renouvellement réalisé le 5 mars 2009, la communication de Mme J Veuve B était "très sévèrement perturbée par des troubles arthriques, un important manque du mot ainsi qu'une apraxie gestuelle".

En conséquence, c'est à juste titre que le premier juge a relevé que Mme J. Veuve B. n'avait pas les capacités physiques pour dicter un testament à maître P, notaire, le 7 juillet 2009, de sorte qu'il y a lieu de confirmer la décision entreprise en ce qu'elle a déclaré ce testament nul et de nul effet.

En cause d'appel, Mme B demande à la cour de reconnaître la validité de ce testament en tant que testament international dès lors que les formalités prescrites par la Convention de Washington en date du 26 octobre 1973 ont été accomplies.

S'agissant d'un nouveau moyen soulevé par Mme B. en cause d'appel aux fins de valider le testament litigieux, il convient de relever que celui-ci ne constitue pas une demande nouvelle au sens des dispositions de l'article 564 du Code de procédure civile mais un moyen tendant aux mêmes fins que ceux présentés en première instance, à savoir la reconnaissance de la validité du testament litigieux.

Toutefois, si l'annulation du testament authentique pour non-respect des dispositions des articles 971 à 975 du Code civil ne fait pas obstacle à la validité de l'acte en tant que testament international, la Convention de Washington du 28 octobre 1973 ayant été ratifiée en France par la loi du 25 avril 1994 et publiée par décret du 8 novembre 1994, il résulte des développements précédents que Mme J veuve B, qui présentait d'importants troubles phasiques et était atteinte d'une "aphasie motrice de BROCA" n'avait pas la capacité d'exprimer un consentement libre et éclairé compte tenu de l'importance de ses difficultés de communication.

En conséquence, il y a lieu de débouter Mme B de sa demande tendant à voir reconnaître la validité du testament litigieux comme testament international.

Référence: 

- Cour d'appel, Douai, 1re chambre, 1re section, 11 juin 2020, RG n° 18/03225