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Le 11 octobre 2020

 

Aux termes des articles 1728, 1729 du Code civil et 7 b) de la loi du 6 juillet 1989, le locataire doit user raisonnablement et paisiblement de la chose louée, suivant la destination qui lui a été donnée par le contrat de location. Si le preneur n'use pas de la chose louée raisonnablement, ou emploie la chose louée à un autre usage que celui auquel elle a été destinée, ou dont il puisse résulter un dommage pour le bailleur, celui-ci peut, suivant les circonstances, faire résilier le bail.

Comme l'a justement rappelé le tribunal, il appartient au juge du fond de déterminer si l'inexécution d'une obligation contractuelle est suffisamment grave pour justifier la résiliation judiciaire du contrat et le juge doit se placer au jour où il statue pour apprécier si un manquement est suffisamment grave pour la justifier.

En l'espèce, le premier juge a constaté que Mme T. avait bien adopté un comportement inadapté, constitutif de troubles de voisinage tels le jet de détritus par les fenêtres ou les nuisances sonores tant diurnes que nocturnes et l'absence de réaction de la locataire à la suite de rappels adressés par la bailleresse en septembre 2017, juin et juillet 2018, Mme T. n'ayant en effet pas cessé ses agissements et les voisins s'étant plaints de hurlements de jeunes enfants, laissés seuls dans l'appartement.

Mme T. ne conteste pas ce comportement contraire à l'usage paisible des lieux loués, mais prétend que, dans la mesure où le juge doit apprécier le trouble au jour où il statue et que postérieurement à la sommation interpellative d'avoir à cesser les troubles signifiée le 7 novembre 2018, elle a cessé tout comportement inadéquat, il ne pouvait être fait droit à la demande de résiliation du bail, ce qu'a constaté le premier juge pour débouter la société Quevilly Habitat.

En cause d'appel, la société Quevilly Habitat verse aux débats plusieurs attestations d'octobre 2019, janvier et juin 2020, faisant suite au jugement du 20 septembre 2019 ayant débouté la bailleresse de sa demande de résiliation de bail, faute de justifier de la persistance du comportement perturbateur de Mme T. à la suite de la sommation interpellative du 7 novembre 2018.

Il résulte de la lecture de ces attestations que, même postérieurement à la sommation interpellative du 7 novembre 2018, Mme T. a poursuivi son comportement inadapté, soit de son fait, soit du fait des personnes sous son toit, de nature à perturber gravement la tranquillité de ses voisins immédiats, dont nombreux indiquent se sentir en insécurité dans l'immeuble, en raison des personnes qu'elle reçoit la nuit et qui se montrent menaçants et injurieux.

Contrairement à ce que prétend Mme T., elle a continué de nuire à la tranquillité de son voisinage, bien après le 7 novembre 2018 et encore à ce jour, puisqu'en effet Mme Raymonde W. indique que, si le calme est revenu momentanément après le placement des enfants de Mme T. (intervenu en fin d'année 2018 selon Mme T. elle-même), ce calme n'a été que de courte durée, puisque les nuisances tels les bruits infernaux de jour comme de nuit et la musique forte la nuit empêchant le sommeil des voisins ont repris.

L'accalmie dont fait état Mme W. lors du placement des enfants et la reprise des nuisances du chef de Mme T., en raison des personnes qui lui rendent visite la nuit sont encore évoquées par Mme P. qui précise que, dans la nuit du 14 octobre 2019, elle a dû une nouvelle fois faire appel au service de tranquillité à 1 heure 35 du matin afin de faire régner l'ordre, ayant été réveillée en sursaut par des bruits et des cris.

D'autres voisins font état du stress et de la fatigue dans lesquels ils se trouvent en raison des nuisances perpétrées par Mme T. et les personnes qu'elle reçoit, de jour comme de nuit, les empêchant de se reposer alors qu'ils travaillent en horaires de quart et qui sont sans rapport avec les bruits normaux qui émanent d'une famille de trois enfants et ce en outre alors qu'en tout état de cause, les enfants de Mme T. ne vivent plus dans cet appartement puisqu'ils ont fait l'objet d'un placement depuis fin 2018.

Il en résulte que manifestement Mme T. n'a nullement cessé les nuisances qui lui sont reprochées depuis plus de deux ans, date de son installation dans l'immeuble 'Lupins', même postérieurement à la sommation interpellative du 7 novembre 2018, et qu'elle adopte aujourd'hui encore un comportement nuisant gravement à la tranquillité de ses voisins, justifiant la résiliation du bail à ses torts et griefs.

Le jugement est donc infirmé en ce qu'il a débouté la société Quevilly Habitat de sa demande de résiliation de bail et d'expulsion de la locataire.

Il convient en outre de constater que Mme T. qui sollicite dans la partie discussion de ses conclusions, des délais pour quitter les lieux, ne formule aucune demande de ce chef sans le dispositif, de sorte que la cour n'est pas saisie de cette demande et n'a pas à y répondre.

Référence: 

- Cour d'appel, Rouen, Chambre de la proximité, 1er octobre 2020, RG n° 19/04314