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Le 18 août 2020

 

Le projet de parc éolien litigieux comprenant 6 éoliennes d’une hauteur totale en bout de pale de 164,9 mètres maximum, qui ne s’insère pas dans une des parties du territoire régional favorables au développement de l’énergie éolienne identifiées par le schéma régional éolien annexé au schéma régional du climat, de l’air et de l’énergie approuvé par l’arrêté du 28 juin 2012 du préfet de la région Centre, se situe sur un plateau d’une altitude moyenne de 280 mètres, à la charnière des grandes unités paysagères que sont le Pays Fort, la Champagne Berrichonne, le Val de Loire et le Sancerrois, dans un espace agricole ouvert et vallonné. L’étude d’impact mentionne que le Sancerrois « est remarquable pour la qualité de ses paysages viticoles mais également pour sa position à la croisée du Val de Loire, du Pays-Fort et de la Champagne Berrichonne ». Comme le souligne l’autorité environnementale, dans son avis du 27 février 2019, « le projet s’inscrit à environ 3,5 kilomètres à l’ouest du vignoble du Sancerrois, de réputation internationale, qui est un élément identitaire fort qui s’est développé sur les versants bien orientés des coteaux et marque très fortement le paysage agricole avec le village de Sancerre qui coiffe la colline centrale ». Le rapport de mission du Conseil général de l’environnement et du développement durable (CGEDD) établi, en février 2019, en vue d’examiner le principe du classement du Sancerrois au titre de la loi du 2 mai 1930, indique, par ailleurs, que « cet ensemble constitue un cadre exceptionnel » qui est doté « depuis nombre de points de vue d’une force exceptionnelle ». En outre, un projet de classement au patrimoine mondial paysager de l’UNESCO est à l’étude qui vise les collines du Sancerrois, territoire de l’appellation d’origine contrôlée (AOC) Sancerre et le piton de Sancerre et inclut les communes de Menetou-Râtel et de Sens-Beaujeu sur le territoire desquelles est implanté le projet. L’étude d’impact elle-même mentionne que «l’éolien ne doit pas venir perturber les vues sur ce paysage remarquable, que ce soit depuis le Sancerrois ou depuis les points de vue d’intérêt dans les unités paysagères voisines : depuis le Val de Loire (vues en direction de l’ouest et depuis les rebords de plateaux, dans l’unité paysagère des Collines du Sancerrois (vues en direction de l’est) ».

La préfète du Cher, par lettre du 20 juillet 2018, a indiqué à la société Parc éolien Nordex 76 qu’il conviendrait de compléter son étude d’impact « par des photomontages dans le vignoble, du fait de sa superficie, de sa valeur paysagère et de sa notoriété ». Des photomontages supplémentaires ont alors été réalisés, en accord avec les services instructeurs. En l’absence de carte croisant le territoire de l’appellation d’origine contrôlée (AOC) et la zone de visibilité, la direction régionale de l’environnement de l’aménagement et du logement (DREAL) a précisé à cette société qu’il « apparaissait préférable de placer des points davantage à l’intérieur du vignoble ». Dans un nouveau courrier du 14 février 2019, préalablement au lancement de l’enquête publique, la préfète du Cher a demandé à la société pétitionnaire « d’améliorer la qualité du dossier (…) et d’affiner l’étude des visibilités du projet depuis le paysage viticole du Sancerrois ». L’autorité environnementale a, pour sa part, indiqué, dans l’avis du 27 février 2019 qu’elle a émis sur le dossier de demande d’autorisation, qu'« en ce qui concerne la prise en compte du paysage viticole, il est regretté que la carte des zones de visibilité du projet ne soit pas mise en relation avec les parcelles viticoles. Cette analyse aurait permis d’identifier précisément les secteurs sur lesquels les risques de covisibilité entre les éoliennes et les vignes sont élevés, et ainsi d’y faire réaliser des photomontages (un certain nombre de points a été identifié au titre de ce risque de covisibilité sans qu’il soit possible d’établir que tous les secteurs concernés sont traités) ». Cette autorité a recommandé, à ce titre, à la société pétitionnaire « d’affiner l’étude des visibilités du projet depuis le paysage viticole du Sancerrois » et de « prendre en compte les paysages perçus depuis les territoires agricoles et viticole ». Au vu de ces observations, dans son mémoire en réponse du 14 mars 2019, la société pétitionnaire a complété son dossier par une carte, établie à l’échelle de 1/158 000ème, de superposition de l’aire couverte par l’AOC et de la zone d’influence visuelle (ZIV) du projet éolien. La ministre fait, toutefois, valoir que « cette carte est réalisée à une échelle qui la rend difficilement lisible » et qu’il en ressort néanmoins que « le projet éolien pourrait avoir un impact sur certains secteurs du vignoble, qui ne se situent pas sur le rebord de cuesta » qui n’ont pas fait l’objet d’investigations. D’ailleurs, l’inspection des installations classées a émis un avis défavorable au projet en considérant que « Malgré les remarques formulées à l’occasion de la demande de compléments faite par courrier du 20 juillet 2018 et dans l’avis émis par la mission régionale de l’autorité environnementale le 27 février 2019, les cartographies des zones d’influence visuelle du projet et des zones AOC ne sont pas suffisamment précises pour garantir que tous les secteurs du vignoble susceptibles d’être visuellement impactés par le projet aient bien été traités dans l’étude d’impact. Ainsi, il apparaît notamment que certains secteurs autour de Sury-en-Vaux (autres que ceux étudiés par les photomontages n°s 53 et 54 qui montrent un impact fort) et au Sud-Est de Sainte-Gemme-en-Sancerrois n’ont pas fait l’objet d’une analyse particulière ». 

 Si la société requérante fait valoir, dans ses écritures, que les photomontages n°s 35, 53 et 54 figurant dans son dossier de demande, qu’elle a effectués à l’intérieur du vignoble Sancerrois, depuis les vignes les plus proches de la première éolienne du parc litigieux, ne « révèlent pas un impact fort sur le paysage, les éoliennes n’étant visibles que de façon ponctuelle et lointaine depuis ces points de vue », et que les secteurs n’ayant pas fait l’objet d’une étude sont limités, il résulte de l’instruction que, contrairement à ce qu’elle soutient, le photomontage n° 35, notamment, fait apparaitre un impact du projet sur le paysage du vignoble et que l’étude et les photomontages complémentaires demandés par les services de l’Etat, dont l’autorité environnementale a, ainsi qu’il a été dit, recommandé la réalisation, et qui n’ont pas été effectués par la société pétitionnaire, étaient nécessaires, compte tenu de la qualité paysagère remarquable rappelée au point précédent, et non contestée, du site d’implantation du projet pour évaluer les incidences du projet sur le paysage et assurer la préservation des intérêts visés à l’article  L. 511-1 du Code de l’environnement, notamment, la protection de la nature, de l’environnement et des paysages ainsi que la conservation des sites. Dans ces conditions, la préfète du Cher a pu refuser, par l’arrêté attaqué, de délivrer l’autorisation sollicitée pour le motif mentionné au point 6 ci-dessus. Ce seul motif étant de nature à justifier légalement ce refus, les autres moyens soulevés par la société requérante, l’un contestant l’autre motif du refus et l’autre, tiré de l’absence d’opposition des riverains et de nombreuses communes concernées par le projet, ne se rapportant à aucun des motifs de la décision attaquée, ne peuvent qu’être écartés. 

Il résulte de tout ce qui précède que la société Parc éolien Nordex 76 n’est pas fondée à demander l’annulation de l’arrêté du 16 juillet 2019 par lequel la préfète du Cher a rejeté sa demande d’autorisation environnementale pour l’exploitation d’un parc éolien sur le territoire des communes de Menetou-Râtel et de Sens-Beaujeu, ni celle de cet arrêté en tant qu’il rejette la demande d’autorisation environnementale pour l’exploitation des éoliennes E1 et E3 à E6. Par voie de conséquence, ses conclusions tendant à la délivrance de l’autorisation environnementale, ses conclusions tendant à la délivrance d’une autorisation environnementale pour l’exploitation des éoliennes E1 et E3 à E6, ses conclusions à fin d’injonction ainsi que ses conclusions présentées sur le fondement de l’article L. 761-1 du Code de justice administrative ne peuvent qu’être rejetées.

Référence: 

- Cour administrative d'appel de NANTES, 5e chambre, 17 juillet 2020, req. n° 19NT03709, inédit au recueil Lebon