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Le 03 décembre 2019

 

Mme Y oppose la prescription aux demandes formées par son ex-époux.

Mais ainsi que l’a exposé l’arrêt critiqué, pour déterminer si l’action formée par M. Y est prescrite, il convient d’abord de rechercher s’il avait ou non connaissance des crédits litigieux ;

En effet, aux termes de l’art. 2224 du Code civil, les actions personnelles ou mobilières se prescrivent par cinq ans à compter du jour où le titulaire du droit a connu ou aurait dû connaître les faits lui permettant de l’exercer .

Si M. Y avait connaissance des contrats, il est prescrit en son action, le délai de prescription ayant commencé à courir dès leur date de signature.

S’il n’a découvert qu’ensuite l’existence de ces contrats, le délai de prescription n’a commencé à courir qu’à compter de cette découverte .

Et M. Y n’a jamais contesté avoir souscrit certains des crédits à la consommation contractés au cours de la vie commune mais a toujours indiqué qu’il n’avait pas été informé de tous les très nombreux crédits qui avaient été contractés à son insu par Mme X .

Il indique avoir appris, en revenant de congés en mai 2012, que son épouse avait contracté deux emprunts auprès du Crédit Mutuel sans l’en informer et avoir constaté que le solde du compte courant commun était débiteur de 5.000 euro.

Il précise qu’après avoir interrogé en vain Mme X sur cette situation financière, il avait décidé de la vérifier entièrement .

Il démontre avoir interrogé la Banque de France en lui demandant de lui communiquer l’entier état des crédits contractés et avoir reçu une réponse le 23 novembre 2012 puis un avis d’inscription au FICP le 5 décembre 2012 .

Mme Y ne saurait par ailleurs tirer aucune conséquence de la saisine de la commission de surendettement par son ex époux .

En effet, celui-ci n’a eu d’autre choix, au regard de la situation particulièrement obérée que de saisir cette commission .

Cependant une jurisprudence avérée retient qu’une déclaration de créances auprès de la commission de surendettement lors de la demande d’ouverture d’une procédure de surendettement ne vaut pas à elle seule reconnaissance de la part de celui qui l’effectue puisqu’il est tenu de déclarer l’intégralité des créanciers lui réclamant paiement .

La Cour de cassation retient en conséquence qu’il appartient au juge de rechercher, pour chaque situation, si cette déclaration de créance peut être considérée comme une reconnaissance de la qualité de débiteur ou si celui qui l’a effectuée a cependant contesté être débiteur des créances qu’il était contraint par la loi de déclarer .

Et en l’espèce M. Y a expressément dénié sa signature devant le juge du surendettement dont le jugement mentionne expressément qu’il a présenté cette contestation .

Mme X prétend donc sans pertinence que M. Y aurait reconnu être redevable des sommes qui lui sont réclamées .

Par ailleurs il ne peut être compris comment le fait que les époux aient effectué des déclarations d’impôt communes et que Monsieur Y ait connu les revenus perçus par son épouse lui aurait permis d’être informé de crédits contractés à son insu .

C’est sans bonne foi que Mme X prétend que M. Y revenant déjeuner au domicile commun lorsqu’elle n’y était pas, réceptionnait le courrier et était donc informé des crédits contractés alors qu’elle avait ouvert un compte personnel domicilié sur le lieu de son travail, dont son époux n’avait donc aucune connaissance .

Ainsi que la cour l’a relevé dans son arrêt frappé d’opposition, il est ainsi établi qu’elle entendait dissimuler des crédits à son mari en se faisant adresser les relevés et les relances des prêteurs à une adresse à laquelle M. Y n’avait pas accès.

C’est sans plus de pertinence que la demanderesse à l’opposition fait valoir qu’elle démontre que les sommes empruntées ont servi aux besoins de la famille puisqu’elle fait exclusivement état, sans d’ailleurs en justifier, de l’achat en quatre ans et demi, de deux ordinateurs portables, d’une machine à laver, d’un lit électrique, d’un déshumidificateur, d’un sèche linge, d’un canapé, d’une télévision, d’un four, d’un lave vaisselle et de l’installation d’une cuisine aménagée qui ne sauraient expliquer la souscription de 35 crédits pour un montant total de 159.355,51 euro .

Les achats dont se prévaut Mme X pouvaient sans difficultés être financés par les revenus du couple et les trois crédits que Monsieur Y reconnaît avoir souscrits avec son épouse .

Mme X ne s’explique pas aujourd’hui sur l’utilisation de la somme totale empruntée, ou sur les motifs qui l’ont conduite à ouvrir un compte qui n’était pas domicilié à son adresse et à se faire envoyer les contrats de prêts et les courriers de relance à son adresse professionnelle .

Elle n’explique pas plus pourquoi elle a imité la signature de son époux sur ces contrats ainsi qu’il résulte tant de l’expertise graphologique produite par M. Y que de la vérification d’écritures qui a été opérée par cette cour qui a constaté des différences de signatures flagrantes .

Seuls les fonds obtenus au moyen de deux des crédits litigieux, d’un montant modeste,ont été versés sur le compte joint des époux, sur lequel M. Y signale qu’il a, à tort mais au motif de ses multiples déplacements professionnels, omis d’opérer la moindre vérification .

Les autres fonds ont servi, soit à Mme X pour désintéresser des créanciers dans le cadre d’une restructuration de crédits, soit à alimenter le compte personnel que l’épouse avait fait ouvrir en se domiciliant chez son employeur .

La volonté de l’épouse de dissimuler les emprunts à M. Y, la facilité avec laquelle elle a pu se faire domicilier sur les lieux de son travail pour souscrire les crédits et ouvrir un compte personnel, ainsi que l’emploi des fonds pour un usage autre que les besoins du ménage s’éclairent lorsque l’on sait que Mme X, qui dénie avoir eu une double vie, entretenait cependant une relation avec son employeur, M. E, et a tenté de créer avec ce dernier une société, la société Infinity Company qui a rapidement connu des difficultés ainsi qu’en justifie M. Y .

L’ignorance dans laquelle a été tenu M. Y de la conclusion de ces contrats de crédit empêche dès lors de fixer le point de départ du délai de prescription à la date à laquelle ils ont été souscrits .

M. Y démontre avoir sollicité le FICP et avoir été informé, le 23 novembre 2012 des crédits recensés et avoir ainsi connu les emprunts souscrits par son épouse .

Le point de départ du délai de prescription quinquennale étant en conséquence fixé au 23 novembre 2012, aucune prescription ne peut être opposée à l’appelant qui a engagé son action le 17 avril 2014 .

Attendu que l’ensemble des éléments susvisés conduit à retenir qu’il est démontré que les fonds ont été empruntés à l’insu de l’appelant et n’ont pas servi aux besoins de la famille .

Certes, le prêt de restructuration a servi à rembourser des emprunts précédemment souscrits mais que ces derniers l’avaient été par Madame X seule en cachette de son époux et pour une utilisation des fonds à son profit exclusif .

En effet le crédit de 60.000 euro souscrit auprès de CGL le 24 novembre 2009 par un contrat indiquait que l’adresse de M. et Mme Y était le bâtiment 5/ […], ce qui était l’adresse de l’employeur de Madame X, la signature portée sous le nom de Monsieur Y étant sans aucun point commun avec l’une de ses signatures habituelles, l’initiale du prénom n’étant pas détachée et les traits de cette signature étant sans similitude aucune avec le tracé habituel de M. Y .

Le crédit 306005893247646 souscrit en décembre 2005 à hauteur de 21.500 euro auprès de la BNP, qui, certes, mentionne l’adresse familiale, porte une signature totalement différente de celle de M. Y étant au surplus relevé que là encore, les mentions d’état civil portées sur le contrat sont du même scripteur qu’elles concernent l’emprunteur, Mme X ou son conjoint, désigné comme étant co-emprunteur .

Ces fonds n’apparaissent pas avoir été empruntés au profit de la famille mais à celui exclusif de Madame X qui a agi en cachette de son époux .

Il convient d’écarter en conséquence l’application des dispositions de l’art. 220 du Code civil et de faire droit à la demande de M. Y tendant à voir juger qu’il n’est pas tenu au titre des prêts .

Mme X est prescrite en sa demande tendant à voir juger que les établissements prêteurs ont manqué à leur devoir de mise en garde, les crédits litigieux ayant tous été contractés plus de cinq années avant qu’elle présente un tel moyen .

Il sera surabondamment relevé que Mme X, tenue d’une obligation de loyauté envers les prêteurs, avait l’obligation de déclarer l’intégralité de ses charges et ressources ;

Non seulement elle a imité la signature de son époux pour convaincre les établissements de crédit que les emprunts étaient contractés par un couple disposant de revenus mensuels de 5.000 euro, mais elle a volontairement omis de mentionner les autres crédits qu’elle avait souscrits .

Ayant déterminé les prêteurs à lui octroyer les prêts qu’elle sollicitait en les trompant sur ses charges, elle n’aurait pu se prévaloir de celles-ci pour soutenir qu’elle aurait dû être mise en garde contre un risque d’endettement .

CGL et la BNP PERSONAL FINANCE font à bon droit valoir que le prêt de restructuration souscrit par Mme X et le crédit 306005893247646 souscrit en décembre 2005 à hauteur de 21.500 euro ne sont pas soumis aux dispositions du code de la consommation comme ayant été conclus pour un montant supérieur à 21.000 euro et avant l’entrée en vigueur des dispositions de la loi LAGARDE .

L’examen des sommes dues n’avait dès lors pas à être renvoyé devant le tribunal d’instance .

Il convient de faire droit aux demandes en paiement, dont les montants ne sont pas subsidiairement contestés par Madame X et sont justifiés par les historiques et les décomptes communiqués devant la cour .

Si le jugement de surendettement dont se prévaut Mme X a pu la dispenser de paiement, cette décision n’empêche pas les créancières de prendre un titre exécutoire à son encontre et d’engager, si elles le désirent, des procédures tendant à la révision de la décision exonérant leur débitrice de paiement en se prévalant des circonstances détaillées dans cet arrêt ;

Ce sont les agissements de Mme X qui sont à l’origine de la présente procédure et qu’elle sera en conséquence condamnée à supporter les dépens d’instance, qui ne comprendront pas les émoluments d’huissier de justice que la loi laisse à la charge du créancier, ainsi qu’à verser à l’appelant et aux parties intimées les indemnités de procédure précisées au dispositif du présent arrêt .

Référence: 

- Cour d'appel d'Orléans, 10 octobre 2019, RG n° 18/034551