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Le 30 décembre 2020

 

Selon les dispositions de l'article 2258 du Code civil, issues de la loi n°2008-561 du 17 juin 2008, « la prescription acquisitive est un moyen d'acquérir un bien ou un droit par l'effet de la possession sans que celui qui l'allègue soit obligé d'en rapporter un titre ou qu'on puisse lui opposer l'exception déduite de la mauvaise foi ». L'article 2272, alinéa 1, du même code, issu de la même loi, précise que « le délai de prescription requis pour acquérir la propriété immobilière est de trente ans. »

Précédemment, étaient applicables :

- l'article 2219, ancien, selon lequel « la prescription est un moyen d'acquérir ou de se libérer par un certain laps de temps, et sous les conditions déterminées par la loi »

- l'article 2262, ancien, selon lequel « toutes les actions, tant réelles que personnelles, sont prescrites par trente ans, sans que celui qui allègue cette prescription soit obligé d'en rapporter un titre, ou qu'on puisse lui opposer l'exception déduite de la mauvaise foi ».

Cependant, en vertu de l'article 2252, ancien, du Code civil, applicable jusqu'à l'entrée en vigueur de la loi du 17 juin 2008, la prescription ne court pas contre les mineurs non émancipés, cette disposition étant incluse dans la section II ancienne, intitulée « des causes qui suspendent le cours de la prescription », du titre vingtième ancien, du code civil, lequel concerne notamment la prescription acquisitive.

L'article 2229, ancien, du Code civil, devenu l'article 2261, suite à la loi précitée, dispose que, « pour pouvoir prescrire, il faut une possession continue et non interrompue, paisible, publique, non équivoque, et à titre de propriétaire ».

En l'espèce, pour pouvoir retenir la possession, à titre de propriétaire exclusif et non de simple indivisaire, de Mme M., il est nécessaire qu'elle ait été l'auteur d'actes matériels incompatibles avec la seule qualité d'indivisaire, c'est-à-dire d'actes qu'un indivisaire n'avait pas le pouvoir de faire seul.

Ainsi, des actes conservatoires, comme le paiement de la taxe foncière, sont insuffisants, l'article 815-2 du code civil autorisant tout indivisaire à prendre les mesures nécessaires à la conservation des biens indivis.

Le fait que les factures d'eau et d'assainissement, concernant le bien, lui aient été adressées par le service eau et assainissement de la commune et qu'elle les ait payées, est également insuffisant.

Il est nécessaire, pour déterminer si Mme M. peut se prévaloir de la prescription acquisitive trentenaire, de rechercher si elle a été l'auteur d'actes de disposition ou si elle a conclu ou renouvelé des baux, s'agissant d'actes qu'un indivisaire ne pouvait faire que sur mandat spécial selon l'article 815-3 du code civil, dans sa rédaction issue de la loi du 31 décembre 1976, en vigueur du 1er juillet 1977 au 1er janvier 2007 ; depuis la loi du 23 juin 2006, ces actes exigent le consentement des indivisaires titulaires d'au moins deux tiers des droits indivis et, comme précédemment, ne peuvent jamais être couverts par un mandat tacite.

En l'espèce, selon les attestations produites par les intimés, M. Joseph G. a été locataire de l'appartement litigieux de 1960 jusqu'au 9 mars 1994, date de son décès, et M. Aqzaz M., au moins de 2000 à 2003.

Cependant, jusqu'au décès de Mme Jeanine A., le 1er août 1973, il n'est pas établi que ce soit Mme M. qui ait consenti ou renouvelé seule le bail de l'appartement litigieux, étant observé que la location serait même antérieure au partage, de sorte qu'aucune prescription acquisitive n'avait pu commencer à courir. Il n'est pas même pas établi, d'ailleurs, que Mme M. ait seule perçu des loyers.

Ensuite, Jean-Luc et Jean-Marc A. étant mineurs, la prescription acquisitive a nécessairement été suspendue à leur égard jusque, pour le premier, au 9 février 1983, et pour le second, au 4 mai 1987.

Postérieurement, entre le 9 mars 1994 et l'année 2000, puis après l'année 2003, il n'est pas établi que le bien ait été loué, de sorte que la possession de Mme M., à titre de propriétaire exclusif, du fait de baux consentis ou renouvelés, n'a pas été continue. Si elle a perçu des loyers, cette perception n'a pas non plus été continue.

Enfin, à compter du 25 mars 2012, la possession de Mme M. est devenue équivoque ; en effet, son fils, Philippe M., a adressé à cette date un mail à Jean-Luc A. pour lui demander son accord et celui de son frère, Jean-Marc, pour pouvoir vendre l'appartement, de sorte que Mme M. ne se comportait plus, à compter de cette date, en propriétaire exclusif.

Il résulte de ces éléments que la prescription acquisitive trentenaire de l'appartement n'est pas caractérisée.

Le jugement déféré doit donc être confirmé en ce qu'il a rejeté la demande de Mme M. tendant à se voir déclarer seule propriétaire du bien.

Référence: 

- Cour d'appel de Colmar, 2e chambre civile, 17 décembre 2020, RG n° 18/01355