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Le 08 mai 2021

 

La société JPB Promotion a projeté courant 2009 d'édifier à [...], un ensemble immobilier à usage de maison de retraite dénommé Résidence Les Iris, les logements étant cédés en l'état futur d'achèvement à divers acquéreurs soucieux de réaliser une opération de défiscalisation. Cet ensemble immobilier devait jouxter un immeuble déjà existant, acquis par JPB Promotion courant 2007, et abritant une maison de retraite médicalisée. Le Conseil général a donné son accord pour porter de 26 à 72 lits la capacité d'accueil de la Résidence Les Iris.

Maître P., notaire à Valenciennes, a reçu le 16 mars 2011 en la forme authentique et à la demande de JPB promotion l'état descriptif de division et le règlement de copropriété de la nouvelle résidence contenant 41 lots. La Ville de Montceau-les-Mines a accordé le permis de construire et la banque CIC Nord Ouest a accordé sa garantie d'achèvement.

La société P2i, conseil en investissement immobilier, a proposé à divers candidats l'acquisition de lots dans le cadre du dispositif fiscal loi Bouvard, les acheteurs ayant le statut de loueurs en meublé non professionnels. La société JPB Promotion a conclu avec chaque acquéreur sous la forme sous seing privé un contrat préliminaire de réservation.

Les ventes en l'état futur d'achèvement ont été reçues par maître P. courant 2011. Un bail commercial a été régularisé par chaque acquéreur avec la société Enity Montceau les Mines aux termes duquel chaque propriétaire de lot le donnait à bail commercial à cette société pour une durée de onze années commençant à courir à compter de la date d'achèvement de l'immeuble.

Suite au décès accidentel de son représentant légal, la société Enity Montceau les Mines a été placée en redressement judiciaire par décision du tribunal de commerce de Lille Métropole du 5 septembre 2013. Cette procédure collective a été convertie en liquidation judiciaire par jugement du 29 novembre 2013. La société JPB Promotion, chargée de la maîtrise d'ouvrage, également en redressement judiciaire, a été mise en liquidation judiciaire par jugement du 18 décembre 2013.

Par jugement du 29 janvier 2014, la juridiction consulaire a arrêté à effet au 1er février 2014 la cession du fonds de commerce de la société Enity Montceau les Mines en faveur de la société Mutualité Française de Saône et Loire. La réception de l'ouvrage était prévue le 28 mai 2014 mais la levée des réserves n'a pu aboutir compte tenu du refus des entrepreneurs d'y procéder faute de règlement de la part de JPB Promotion. Un nouveau bail a été régularisé entre chacun des copropriétaires et cette personne morale cessionnaire. Le preneur acceptait de prendre les locaux en l'état et de procéder à leur parachèvement pour lui permettre de l'exploiter en contrepartie de quoi le bailleur acceptait de lui consentir une franchise de loyer de 5 mois. Le bail commercial était consenti pour une durée de onze années à compter du 1er septembre 2014, le loyer annuel étant fixé à 3'684,12 EUR HT.

Par actes d'huissiers des 7 et 8 décembre 2015, 38 acquéreurs faisaient assigner la SCP de notaires P.-C. ainsi que maîtres V. et Thomas R. et aussi maître Thierry B., avocats, devant leTtribunal de grande instance de Valenciennes aux fins de voir cette juridiction condamner solidairement les défendeurs à réparer leurs préjudices matériels et moraux subis du fait de leurs agissements fautifs avec intérêts au taux légal à compter de la notification du jugement.

Appel a été relevé de la décision de première instance.

Pour la cour d'appel,

1. La publication de la dissolution de la SCP d’avocats constitue le point de départ du délai de prescription de cinq ans de l’action en responsabilité des investisseurs contre les associés non liquidateurs. Toutefois, en l’occurrence, les investisseurs ont des domiciles répartis sur tout le territoire de la France, de sorte qu’il n'est pas légitime d'opposer une publication dans un journal local d'annonces légales. C’est donc la publication de la dissolution au BODACC, seule de nature à assurer une information nationale, qui fixe le point de départ de la prescription quinquennale qui n’est par conséquent pas acquise.

2. L’action en responsabilité des investisseurs ayant acquis des biens en l’état futur d’achèvement dans une résidence médicalisée à des fins de défiscalisation, est irrecevable contre deux des défendeurs. L’un d’entre eux n’était plus membre de la SCP d'avocats à la date de souscription des contrats de réservation, et le second n’était pas mentionné sur le courrier type de présentation du projet d’investissement proposant une garantie de bonne fin juridique et fiscale. En effet, l'article 16 de la loi n° 66-879 du 29 novembre 1966 sur les sociétés civiles professionnelles n'envisage de solidarité qu'entre la SCP et l'un de ses associés mis en cause pour un acte professionnel accompli par ses soins, ce qui ne justifie aucune responsabilité solidaire entre coassociés pour un manquement professionnel reproché à l'un d'eux.

3. La garantie de bonne fin fiscale proposée par l’avocat ne tend pas à garantir les résultats financiers escomptés et donc les résultats espérés d'un point de vue fiscal au titre de la défiscalisation. Il en est d’autant plus ainsi que les investisseurs sont bien sous le régime de loueur de meublé non professionnel escompté et ne justifient d’aucun litige avec l'administration fiscale.

4.. Si le notaire est mentionné dans les documents de présentation du projet de défiscalisation, sa mission se bornait à la rédaction des actes nécessaires. Dans la mesure où il n’est pas établi que le notaire aurait été associé par le promoteur à l'ensemble du montage du dossier et chargé de l'ingénierie juridique de l'opération immobilière, sa responsabilité ne peut être recherchée qu’au titre de la rédaction des actes. Or, aucune faute ne peut lui être reprochée. Les acquéreurs des lots ont bien la qualité de propriétaires dans ladite résidence médicalisée, perçoivent des loyers et peuvent bénéficier du statut de loueurs de meublé non professionnel. Il ne saurait être imputé à faute au notaire les vicissitudes ayant grevé l’opération, telles que la mise en location pour un loyer moindre, aucune surévaluation du loyer initial n’étant établie, ou les difficultés connues par le chantier comme le décès accidentel du gérant de la société promoteur ayant conduit à sa liquidation judiciaire.

Référence: 

- Cour d'appel de Douai, 3e chambre, 9 janvier 2020, RG n° 18/03084