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Le 29 mai 2020

 

Il est établi que par deux déclarations de dons manuels souscrites aux dates respectives du 19 septembre 2011 et du 18 octobre 2011 (pièces 6 et 7 appelants), Messieurs C et A X ont donné respectivement 4500 et 3000 parts de la SCI du […] à leur fils et frère, Monsieur Y X.

Ces déclarations de dons manuels ont été enregistrées le 19 octobre 2011auprès des services fiscaux, en même temps qu’une troisième déclaration de don manuel, portant sur 7500 parts sociales, effectuée cette fois ci le10 octobre 2011 par Monsieur Y X au profit de son épouse Madame D Z (pièce 8 appelants).

Selon un procès verbal d’assemblée générale extraordinaire de la SCI du […] en date du 18 octobre 2011, monsieur Y X a fait part de son souhait de donner 7500 parts sociales à son épouse, tandis que messieurs C et A X ont indiqué qu’ils souhaitaient donner leurs parts (4500 et 3000 parts) à monsieur Y X. Ces donations ont été autorisées à l’unanimité des anciens associés et madame D Z a été agréée comme nouvelle associée également à l’unanimité. L’assemblée générale a, d’autre part, décidé que madame D Z serait caution des engagements financiers de la SCI en lieu et place de messieurs C et A X et consacré la nouvelle répartition du capital social (7500 parts pour monsieur Y X et 7500 parts pour madame D Z).

Ces opérations sont intervenues après que le prêt souscrit pour l’acquisition du bien immobilier sis […] ait été intégralement amorti, selon un courrier de la SOCIETE GENERALE en date du 7 janvier 2011 (pièce 5 appelants).

La maison acquise par la SCI constituait le domicile familial des époux Y X et D Z.

Il est soutenu que les dons manuels effectués par essieurs C et A X au profit de monsieur Y X sont viciés, au motif qu’ils auraient été provoqués par des manoeuvres frauduleuses commises par le donataire.

Monsieur Y X reconnaît être l’auteur de manoeuvres frauduleuses et s’associe aux appelants pour solliciter la nullité des trois dons manuels, ainsi que la nullité des statuts et procès verbaux d’assemblées générales de la SCI établis en 2011. Il est possible de consacrer le dol au travers de cet acquiescement pour autant que la situation en résultant ne concerne que les trois protagonistes de cette affaire et ne risque pas de faire grief à autrui. Or, tel n’est pas le cas puisqu’il résulte des conclusions des appelants que l’annulation des dons effectués par messieurs C et A X au profit de monsieur Y X est explicitement corrélée à l’annulation du don manuel de 7500 parts effectué par celui-ci au profit de son épouse : c’est ainsi qu’en page 10 des conclusions des appelants (discussion) la nullité de la donation effectuée au profit de madame D Z est présentée comme 'consécutive' à la nullité des dons effectués par messieurs C et A X, ce qui est rappelé dans le dispositif des conclusions par la mention 'en conséquence'. Il apparaît, d’autre part, que la demande de nullité des nouveaux statuts de la SCI adoptés en 2011 (énoncée par monsieur Y X) met directement en cause les droits de madame D Z, puisque ces statuts consacrent sa qualité d’associée à hauteur de 50% du capital social.

Il en résulte que, nonobstant l’acquiescement de monsieur Y X, il y a lieu d’apprécier objectivement l’existence de ces manoeuvres, qui sont contestées par Madame D Z dans un contexte de procédure de divorce particulièrement contentieux.

La question de la prescription quinquennale ne se pose que si des manoeuvres dolosives ont effectivement été commises, puisque l’absence de manoeuvres dolosives interdit la fixation d’un point de départ (découverte des manoeuvres) pour le calcul du délai de prescription.

Monsieur Y X indique, qu’au moment des dons manuels, il n’a présenté aucune balance des comptes à son père et à son frère et que les parts sociales ont donc été transmises pour une valeur très minorée par rapport à leur valeur réelle, de l’ordre de 15 fois. Cette thèse concorde avec ce qui lui était reproché dans l’assignation, qui lui a été délivrée le 28 août 2017 par son père et son frère, puisqu’il était indiqué que 'de manière évidente la maison représentée par la totalité du capital de la SCI, ne peut avoir une valeur à ce moment (2011) de 67 492 EUR..

Messieurs C et A X, qui habitent eux-mêmes à proximité immédiate du […] à […] (selon les adresses figurant sur l’assignation), n’expliquent pas comment la seule absence d’une balance des comptes, ou même de documents comptables en général, a pu les tromper sur la valeur réelle de la maison acquise le21 juin 1996 par la SCI pour le prix de 1' 500'000 F soit 228 '673 EUR, étant rappelé que le prêt souscrit pour l’acquisition était intégralement amorti à l’époque des dons manuels.

Ils ne peuvent, d’autre part, être considérés comme de parfaits néophytes en matière d’appréciation du fonctionnement et de la valorisation d’une société puisqu’il résulte des documents produits par madame D Z qu’ils ont animé au moins deux sociétés, la SARL C TAXI (radiée en 2017 après 18 ans d’activité) et la SARL HOTEL BEARNAIS (monsieur C X en ayant été le gérant de 2011 à 2014) .

Ils n’expliquent pas plus quel est l’événement, qui serait survenu en 2017, qui leur aurait fait prendre conscience des manoeuvres dolosives commises par leur fils et frère et conduit à engager, en août 2017, une action en nullité ou révocation de donation. A cet égard, le courrier en date du 20 février 2018 de maître H I qui rapporte avoir été consulté au cours de l’année 2014 est totalement inopérant, puisque ce courrier indique que le notaire a été consulté par monsieur Y X sur la demande de ses parents pour la cession de l’hôtel BEARNAIS dont

ils étaient associés, cession qui s’est finalement opérée sans l’assistance du notaire consulté. Si les dons manuels ont été évoqués lors de cette consultation, c’est sur la seule initiative de monsieur Y X : il ne peut donc en être déduit que c’est l’auteur supposé des manoeuvres dolosives qui en aurait fait part à son père et à son frère à la suite de cette consultation.

Dans leur assignation en date du 28 août 2017, messieurs C et A X indiquent que 'le résultat (des dons manuels) visait à transférer cet immeuble entre les mains de monsieur Y X et son épouse, au détriment des intérêts du reste de la famille X son père et son frère, alors que ceux-ci sont partie prenante à la constitution de la société'.

Sous réserve de la mention concernant les intérêts de la famille X, cette assertion correspond exactement à la première délibération prise en assemblée générale extraordinaire du 18 octobre 2011 qui fait état de la volonté de monsieur Y X de donner 7500 parts sociales à son épouse.

L’opération n’est devenue préjudiciable à la famille X qu’à l’occasion de la séparation du couple X-Z, survenue en août 2017, avec engagement d’une procédure de divorce sur l’initiative de l’épouse.

Madame D Z, seule, a évoqué ce contentieux familial.

Force est de constater qu’il n’a été fait état d’aucun autre événement, et en particulier d’aucun événement susceptible d’avoir révélé des manoeuvres frauduleuses imputables à Monsieur Y X.

Il se déduit de l’ensemble de ces éléments et circonstances que les manoeuvres dolosives imputées à Monsieur Y X et reconnues par celui-ci dans le cadre de ses rapports avec son père et son frère ne sont pas caractérisées en tant que telles.

La demande de nullité pour dol des dons manuels de 4500 et 3000 parts de la SCI […] Mouzaia est donc rejetée.

Référence: 

- Cour d'appel de Paris, Pôle 3 - chambre 1, 27 mai 2020, n° 18/22249