Inscription à notre newsletter

Recevez toutes les informations importantes directement dans votre boite mail. Cliquez ici

Partager cette actualité
Le 18 février 2009
Il y a lieu de faire droit aux conclusions tendant à ce que soit ordonné à l'autorité compétente d'abroger, dans un délai de trois mois, les instructions fiscales 4 J-1-05 du 25 février 2005 et 4-J-2-05 du 28 avril 2005 en tant que celles-ci ont pour effet de soumettre les fonds de pension néerlandais à la retenue à la source prévue au 2 de l'article 119 bis du CGI.
Les fondations de droit néerlandais : STICHTING UNILEVER PENSIOENFONDS PROGRESS, PENSIOENFONDS PGGM et STICHTING PENSIOENFONDS METAAL EN TECHNIEK ont demandé au Conseil d'Etat :

1°/ d'annuler la décision par laquelle le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie a implicitement rejeté leur demande du 12 juin 2006 tendant, d'une part, à l'abrogation des instructions fiscales 4 J-1-96 du 31 janvier 1996, 4 J-1-05 du 25 février 2005 et 4 J-2-05 du 28 avril 2005 en tant qu'elles ont pour effet de soumettre les fonds de pension néerlandais à la retenue à la source prévue au 2 de l'article 119 bis du Code général des impôts (CGI) et, d'autre part, à ce que soit prise toute mesure utile pour assurer la pleine effectivité du droit communautaire méconnu par le dispositif de taxation en cause ;

2°/ d'enjoindre au ministre de faire droit à la demande d'abrogation et de prendre, dans un délai de trois mois, sous astreinte de 1.000 EUR par jour de retard, les mesures utiles pour assurer la pleine effectivité du droit communautaire à l'égard des fonds de pension néerlandais.

La Haute juridiction administrative rappelle qu'aux termes du 2 de l'article 119 bis du CGI: "Les produits visés aux articles 108 à 117 bis donnent lieu à l'application d'une retenue à la source dont le taux est fixé par le 1 de l'article 187 lorsqu'ils bénéficient à des personnes qui n'ont pas leur domicile fiscal ou leur siège en France... "; qu'en vertu des dispositions du 1 de l'article 187 du même code, le taux de la retenue à la source est fixé, sauf pour les exceptions qu'il énumère, à 25 % des revenus concernés; qu'en vertu des stipulations de l'article 10 de la convention fiscale conclue entre la France et les Pays-Bas, les dividendes payés par une société qui est résident de l'un des États peuvent être imposés dans cet État et selon la législation de cet État mais l'impôt ainsi établi ne peut excéder 15 % du montant brut des dividendes.

Elle rappelle ensuite que l'instruction 4 J-1-96 du 31 janvier 1996 précise, dans ses paragraphes 19 à 26, sous l'intitulé: "II. Nouveau régime applicable aux fonds de pension néerlandais" que, les fonds de pensions néerlandais qui ne poursuivent pas un but lucratif et qui sont, de ce fait, exonérés d'impôt sur les sociétés aux Pays-Bas, peuvent demander le bénéfice de l'attribution de l'avoir fiscal prévue par la convention fiscale franco-néerlandaise s'ils satisfont aux conditions requises pour l'application de cet accord; que cette instruction dispose que, pour les dividendes qui leur sont payés à compter du 1er janvier 1996, les fonds de pension bénéficient du taux réduit de retenue à la source de 15 % prévu par cette convention et de la restitution partielle de l'avoir fiscal à concurrence du montant de cette retenue à la source; que l'instruction 4 J-1-05 du 28 février 2005, publiée après la suppression, par l'article 93 de la loi de finances pour 2004, de l'avoir fiscal pour les personnes autres que les personnes physiques pour les revenus distribués ou répartis à compter du 1er janvier 2005, précise les modalités selon lesquelles les actionnaires non-résidents, au nombre desquels les caisses de retraite des Pays-Bas, qui reçoivent des dividendes de source française pourront obtenir le taux réduit de retenue à la source dès la mise en paiement de dividendes; que le paragraphe 14 de l'instruction 4 J-2-05 du 28 avril 2005 énonce que la faculté, pour les fonds de pension ou caisses de retraite des pays qui y sont énumérés, dont ceux des Pays-Bas, d'obtenir le transfert d'une fraction ou de la totalité de l'avoir fiscal attaché aux dividendes de source française est supprimée pour les dividendes de source française mis en paiement au cours de l'année 2004; que le même paragraphe ajoute que, en revanche, le bénéfice du taux réduit de retenue à la source prévu par les conventions pertinentes, ou pour les fonds de pension néerlandais par l'instruction applicable, leur reste acquis.

Et considère:

1°/ qu'il résulte de l'instruction précitée du 31 janvier 1996 que les fonds de pension des Pays-Bas pouvaient bénéficier du taux de retenue à la source de 15 % et de la restitution partielle de l'avoir fiscal à concurrence du montant de la retenue à la source prévus par elle; que l'application de cette instruction avait pour effet que les fonds de pensions néerlandais se trouvaient, en pratique, exemptés du paiement de la retenue à la source ; que la suppression, par l'article 93 de la loi de finances pour 2004, de l'avoir fiscal pour les personnes autres que les personnes physiques pour les revenus distribués ou répartis à compter du 1er janvier 2005, dont les instructions du 28 février 2005 et du 28 avril 2005 ont tiré les conséquences tout en confirmant le bénéfice du taux réduit de retenue à la source pour les fonds de pension néerlandais, a eu pour effet de faire désormais supporter à ces organismes la charge effective, dans cette mesure, de la taxation des dividendes de source française qu'ils perçoivent;

2°/ Et que si, en vertu des dispositions du c) du 5 de l'article 206 du CGI, combinées avec celles de l'ensemble de cet article, notamment celles de son 1, et avec celles du 5° bis du 1 de l'article 207, un organisme établi en France ayant pour objet de servir des pensions de retraite, tel qu'une caisse de retraite de base ou complémentaire, ou une société mutualiste, dont la gestion est désintéressée et dont les activités non-lucratives restent significativement prépondérantes, est assujetti à l'impôt sur les sociétés à raison des revenus de capitaux mobiliers dont ils disposent, les dividendes de sociétés établies en France perçu par cet organisme ne sont pas imposables; que l'application de la retenue à la source au versement de dividendes de sociétés françaises à des fonds de pension néerlandais, entrant dans le champ d'application de l'instruction précitée du 31 janvier 1996, constitue ainsi une restriction à la liberté de circulation des capitaux; que le régime d'exonération prévu par les dispositions susmentionnées des articles 206 et 207 du CGI étant applicable à des associations, fondations et autres organismes à raison du caractère non lucratif de leur activité et non d'une charge d'intérêt général qui pèserait sur les seuls organismes résidents de France, le ministre n'est pas fondé à soutenir que la restriction à la liberté de circulation des capitaux en cause serait justifiée, pour ce motif, par l'existence d'une différence de situation objective entre organismes français et néerlandais; qu'il ne démontre pas, par ailleurs, l'existence d'une raison impérieuse d'intérêt général, telle que la nécessité de sauvegarder la cohérence du régime fiscal ou l'efficacité des contrôles fiscaux, de nature à justifier la discrimination invoquée/; qu'en effet il n'établit pas l'existence d'un lien direct entre l'exonération d'impôt dont bénéficient les organismes français et la compensation de cet avantage par un prélèvement fiscal déterminé ni ne démontre l'impossibilité d'exercer un contrôle fiscal efficace sur les organismes néerlandais ; qu'il s'ensuit que la discrimination en cause méconnaît les stipulations de l'article 56 du traité instituant la Communauté européenne; que, dès lors, les fonds de pension requérants sont fondés, sans qu'il soit besoin d'examiner l'autre moyen de leur requête, à soutenir que les instructions attaquées des 28 février 2005 et du 28 avril 2005 sont entachées d'excès de pouvoir, lors même qu'elles tirent les conséquences de la suppression de l'avoir fiscal par la loi et font application du 2 de l'article 119 bis du CGI, en tant qu'elles ne prévoient pas de neutraliser l'application de la retenue à la source au paiement de dividendes de sociétés françaises à des organismes tels que les fonds de pension néerlandais qui seraient en mesure d'apporter la preuve qu'ils pourraient bénéficier, s'ils étaient établis en France, de l'exonération d'impôt sur les sociétés prévues au c) du 5 de l'article 206 à raison de la perception de dividendes de sociétés françaises; que le refus d'abroger, dans cette mesure, les instructions susmentionnées, doit être annulé.

En conséquence il y a lieu de faire droit aux conclusions tendant à ce que soit ordonné à l'autorité compétente d'abroger, dans un délai de trois mois, les instructions fiscales 4 J-1-05 du 25 février 2005 et 4-J-2-05 du 28 avril 2005 en tant que celles-ci ont pour effet de soumettre les fonds de pension néerlandais à la retenue à la source prévue au 2 de l'article 119 bis du CGI.

La décision n'est assortie d'aucune astreinte.
Référence: 
Référence: - Conseil d'État statuant au contentieux, 3e et 8e sous-sect. réunies, 13 février 2009 (req. n° 298.108)