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Le 12 décembre 2008

Le droit du travail prévoit l'obligation pour la société mère française qui a mis un de ses salariés à la disposition d'une de ses filiales étrangères d'assurer,si le salarié est licencié par cette dernière,son rapatriement et sa réintégration à un poste comparable. Cependant même si
la règle paraît simple,il en va autrement de sa mise en œuvre.En effet,des conditions strictes sont à respecter,notamment celle relative à l'existence d'un contrat de travail entre le salarié et la
société mère,ou bien celle concernant les formes de la rupture du contrat de travail par la société
filiale.

Dans ses 2 arrêts la Cour de Cassation, alternant interprétation stricte et libérale de la lettre du texte,élargit le champ d'application de l'article L.1231-5 du code du travail.

{{La première décision rapportée pose le problème de l'interprétation de l'article L.1231-5 du
code du travail}}.

L'obligation pour la société mère prévue dans cet article ne s'applique que si un
contrat de travail a été conclu par celle-ci avec le salarié et si ce dernier est lié par un contrat de
travail avec la société filiale.L'exigence d'un contrat de travail entre la société mère et le salarié
peut être décelée dans l'utilisation de l'expression "mise à disposition"(comment mettre quelqu'un
à disposition s'il n'existe aucun lien entre la société mère et le salarié?).Mais est-ce que cela signifie
que le contrat initial doit survivre?La règle est-elle applicable au seul détachement ou également au
transfert (impliquant la rupture du contrat initial)?

Pour certains auteurs,cette règle ne s'applique
qu'au détachement,qui ne fait que suspendre le contrat initial.Cependant,le texte est silencieux à
ce sujet,il suffit que le salarié ait été engagé par la société mère.L'article L.1231-5 du code du travail
n'exige pas que le salarié ait été engagé sous contrat à durée indéterminée.Donc la règle s'applique
aux salariés sous contrat à durée déterminée,dans ce cas il est évident que le contrat de travail initial
ne survivra pas longtemps au départ du salarié à l'étranger.La chambre sociale de la cour de cassation
suit cette seconde analyse,précisant que "le texte ne subordonne pas son application au maintien
d'un contrat de travail entre le salarié et la maison mère".Le fondement de l'obligation de rapatriement
et de réintégration est autonome,il réside dans la loi.Cette décision devrait arrêter les utilisations de la
technique du transfert uniquement en vue de contourner l'application de cette règle.

{{Dans la seconde décision rendue le même jour,la haute juridiction applique une lecture plus
libérale de l'article L.1231-5 du code du travail}}.

Cette décision concernait l'hypothèse dans laquelle la
filiale étrangère qui reçoit le salarié est cédée à une autre société.Le contrat de travail du salarié mis
à disposition fut transféré au cessionnaire.La cour de cassation a estimé que la cession de la filiale
"mettait fin ipso facto au contrat de travail liant le salarié à cette filiale, et qu'il s'en déduisait qu'il
appartenait à la société mère de prendre l'initiative du rapatriement du salarié et de lui proposer un
reclassement".La Cour de Cassation se contente du seul fait que la cession de la filiale mettait fin
au contrat de travail entre le salarié et la filiale,là où le code du travail exige un licenciement.Cette
solution est justifiée par la volonté de protéger le salarié expatrié,le champ d'application de la règle
de l'article L.1231-5 du code du travail est étendu aux cas où la rupture du contrat de travail n'est pas
imputable au salarié.

Si ces deux interprétations (l'une stricte,l'autre large) semblent opposées,elles ne le sont qu'en
apparence car les deux décisions participent d'une même logique:donner à l'article L.1231-5 un champ
d'application large.



Arrêts cités

Soc. 13 novembre 2008, FS-P+B+R, numéro 07-41.700

Soc. 13 novembre 2008, FS-P+B+R, numéro 06-42.583


Anthony Gayraud, magistère DJCE 2e année 2008-2009