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Le 10 décembre 2008

En effet, il s'avère que l’exploitation d’un taxi est soumise en France à une double condition :

d’une part, il est nécessaire d'avoir la compétence reconnue par un certificat de capacité professionnelle délivré par le préfet et,

d’autre part, il faut être titulaire d’une autorisation de stationnement (ou licence) délivrée par le maire de la commune, par le préfet de police à Paris ou par le préfet lorsqu’elle concerne
un aéroport.

L'article 6 de la loi du 20 Janvier 1995 prévoit que les nouvelles autorisations sont délivrées en fonction de listes d'attente rendues publiques

L’article 12 du décret du 17 Août 1995 prévoit les conditions de mise en œuvre desdites listes.

En effet, elles doivent être établies par l'autorité compétente pour délivrer l'autorisation. Elles doivent mentionner la date à laquelle chaque demande a été déposée. Ces demandes sont valables un an. Les nouvelles autorisations sont attribuées en fonction de l'ordre chronologique d'enregistrement des demandes.

Il s'avère alors, au vu des faits, qu'à compter du 12 août 2004, les membres du syndicat ont déposé systématiquement des demandes d’autorisation de leurs entreprises sur les listes d’attente des communes du département parmi lesquelles soixante-et-une ont été communiquées au Conseil de la
concurrence dans le cadre de la saisine.

Or, après examen des pièces du dossier il apparaît que dans trente communes sur soixante-et-une, les demandes déposées sont uniquement celles des cinq membres du conseil d'administration du syndicat de taxis

Le Conseil de la concurrence affirme ainsi que les parties ont volontairement saturé les listes d'attente pour l'obtention d'autorisations de stationnement dans le but d'empêcher l'installation de nouveaux taxis concurrents.

Il était alors nécessaire à l'autorité régulatrice de rechercher si un tel comportement pouvait être considéré comme une entente prohibée par l'article L-420-1 du Code de commerce. Pour cela il est nécessaire de déterminer le marché, d'énoncer les éléments constitutifs de l'entente,pour arriver à l'application à notre cas.

Le Conseil de la concurrence procède dans un premier temps à la détermination du marché.
Il faut alors s'intéresser à deux aspects:

d'une part on détermine la dimension matérielle: le marché est l'endroit où se rencontre l'offre et la demande de produits ou de services considérés comme substituables entre eux par le consommateur. Le Conseil de la concurrence vient alors énoncer: « en l’espèce, le marché de services pertinent est celui du transport professionnalisé assis. La spécificité de la demande sur ce marché est liée au fait qu’il n’y a pas d’acheteur-consommateur, mais un patient qui suit la prescription d’un médecin. »

d'autre part on regarde la dimension géographique: sur ce point il énonce qu'« en ce qui concerne la dimension géographique du marché, la réglementation reposant à titre essentiel sur la détention d’une autorisation de stationnement dans la commune, le marché pertinent se définit normalement par rapport à l’offre et est celui de la prestation de transport par taxi dans la commune (cour d’appel Paris 5 mai 1998). Toutefois, cette détermination du marché reste, en l’espèce, insuffisante. »

Il faut cependant noter que, lorsqu’une pratique d’entente revêt un objet anticoncurrentiel, la définition du marché pertinent n’est pas essentielle. Dans une décision n° 02-D-42 du 28 juin 2002
relative à des pratiques relevées dans le secteur de la distribution des appareils électroménagers et d’électronique grand public, le Conseil de la concurrence a précisé « qu’au demeurant, pour définir l’infraction aux dispositions de l’article L. 420-1 du code de commerce, la définition précise et détaillée des marchés n’est pas nécessaire ».

Il faut alors s'intéresser à la pratique de l'entente elle-même.
Les éléments constitutifs de l'entente peuvent revêtir trois formes.
Il peut s'agir d'accords entre entreprises qui peuvent se traduire au travers d'un contrat par lequel les parties audit contrat ont pu montrer leur volonté d'agir en commun. Il se peut également que ces accords soient des actions en apparence unilatérales expresses ou tacites. On y intègre tout ce qui est parallèle au contrat ( e-mail, directive...).

Il peut également s'agir de décisions d'association d'entreprises. Dès lors que c'est anticoncurrentiel les décisions sont condamnables. A noter ici que seules les décisions sont condamnables et non l'association d'entreprise en elle-même.

Il peut s'agir en dernier lieu de pratiques concertées. Ca englobe tout ce qui n'appartient pas aux deux catégories sus-mentionnées. Il s'agit de la situation dans laquelle des opérateurs ont des comportements parallèles.

En l'espèce, le fait pour les cinq membres du syndicat, de figurer à une certaine place sur les listes d’attente (souvent les premières) est susceptible d’empêcher les candidats qui se situeraient
après eux sur ces listes d’obtenir légalement une autorisation de stationnement.

Le Conseil de la concurrence énonce donc qu' « en adoptant une démarche consistant à figer autant que possible la situation sur le marché de la prestation de transport de taxi dans le département des Alpes-de-Haute-Provence par la création artificielle d’une nouvelle barrière à l’entrée au travers de l’utilisation détournée de la réglementation des taxis, le syndicat et ses cinq membres ont ainsi mis en œuvre une pratique concertée ayant un objet anticoncurrentiel, prohibée par les dispositions de l’article L. 420-1 du code de commerce. »

Il prononce ainsi une condamnation pécuniaire d'un montant total d'environ 40 000 Euros et enjoint la publication d'un résumé de sa décision dans plusieurs supports d'information régionaux ou professionnels.


Master I Droit des Affaires Magistère 2ème année