Inscription à notre newsletter

Recevez toutes les informations importantes directement dans votre boite mail. Cliquez ici

Partager cette actualité
Le 13 janvier 2020

 

En vertu des dispositions combinées des art. 1165 et 1167 anciens du Code civil devenu 1341-2 pour le second les conventions n’ont en principe d’effet qu’entre les parties et ne nuisent point aux tiers, lesquels peuvent néanmoins, en leur nom personnel, attaquer les actes faits par leur débiteur en fraude de leurs droits .

En l’espèce la banque (Banque Populaire de Bourgogne Franche-Comté) considère que la donation litigieuse faite le 31 mars 2015 par Mme Y au profit de son fils, M. Z, et avec la complicité de ce dernier, portant sur la nue-propriété de l’immeuble situé […], dans lequel elle réside, l’a été en fraude de ses droits .

Elle soutient tout d’abord à juste titre que l’intéressée, condamnée par une décision ayant force de chose jugée, au titre de ses engagements de caution ne peut plus aujourd’hui se prévaloir d’une quelconque disproportion manifeste de ceux-ci comme elle le fait dans ses derniers écrits .

Elle ajoute que l’obligation de la caution naissant au jour de son engagement, il n’est pas contestable qu’elle disposait d’un principe certain de créance dès la date des engagements de caution souscrits par Mme Y, tous deux antérieurs à l’acte de donation litigieux et que l’intéressée, qui avait été destinataire d’une première mise en demeure le 3 septembre 2013 avait parfaitement connaissance de son obligation de payer .

Elle soutient donc que Mme Y s’est sciemment appauvrie par cet acte de donation, qui est à l’origine de son insolvabilité, quand bien même elle résiderait encore dans les lieux, puisqu’elle ne possède plus aucun bien immobilier, que ses droits au chômage sont épuisés, et qu’elle avait conscience du préjudice qu’elle lui causait par cet acte d’appauvrissement, à telle enseigne que sa demande de rétablissement personnel a été rejetée, motif pris de la mauvaise foi de la requérante en raison de cet acte d’appauvrissement volontaire .

Mme Y rétorque qu’au regard de l’art. 1341-2 du Code civil la fraude aux droits du créancier doit être démontrée et appréciée à la date à laquelle le débiteur se dépouille, soit le 31 mars 2015 en l’occurrence, et soutient qu’à cette date elle n’avait pas connaissance de la créance de la banque puisqu’elle n’a été destinataire d’une mise en demeure d’avoir à respecter ses engagements de caution que le 7 avril 2015 et que l’action en paiement n’a été engagée que le 27 avril 2015 ;

Mais  s’il est exact que la mise en demeure d’avoir à honorer ses engagements en qualité de caution du 23 mars 2015 adressée à Mme Y ne lui a été distribuée que le 7 avril suivant et qu’elle n’a été assignée en paiement par la banque que par exploit délivré le 27 avril 2015, soit dans les deux cas postérieurement à l’acte de donation litigieux, il n’en demeure pas moins qu’elle avait parfaitement connaissance de ses engagements à l’égard de la banque depuis les 4 et 8 août 2007, dates de leur souscription respective, qui créait à l’égard de la banque un principe certain de créance, et qu’elle avait été au surplus destinataire d’une mise en demeure datée du 3 septembre 2013 adressée à Amolouis, Mme Y X […] l’informant de la transmission du dossier au service contentieux, du montant des impayés à hauteur de 34 .905,33 EUR et du prononcé de la déchéance du terme à défaut de régularisation dans un délai de quinze jours ;

Il s’ensuit qu’à la date de l’acte de donation, elle avait parfaitement conscience, en sa qualité de co-associée de la SCI Amolouis, du fait que les dettes de celles-ci n’avaient pas été intégralement apurées alors que ses deux engagements de caution étaient encore en cours pour expirer en 2023 et 2024 ; que l’appauvrissement induit par l’acte de donation litigieux est par conséquent nécessairement intervenu en fraude des droits de la banque, étant précisé que s’agissant d’un acte à titre gratuit la banque n’a pas à administrer la preuve de la complicité du tiers bénéficiaire ; il n’est pas contesté par ailleurs qu’à la suite de cette donation l’intéressée est insolvable dès lors qu’elle indique spontanément ne plus disposer de droits au chômage, ce que conforte le bénéfice d’une aide juridictionnelle totale et le recours à une procédure de rétablissement personnel .

L’argument de M. Z consistant enfin à soutenir que le bien ayant fait l’objet de la donation à son profit n’aurait pu faire l’objet d’une voie d’exécution, dès lors qu’il était grevé d’un droit d’usufruit et d’un droit de retour au bénéfice des parents de Mme Y, usufruitiers, est inopérant dans la mesure où il aurait pu faire l’objet d’une mesure conservatoire puis d’une saisie au décès des deux usufruitiers, décès qui aurait mis un terme au droit de retour qu’ils s’étaient réservés et qui aurait réunis sur la personne de Mme Y la pleine propriété du bien .

Il résulte de ce qui précède que c’est à bon droit que le premier juge a retenu que les conditions d’exercice par la banque de l’action paulienne sont réunies et qu’il a fait droit à la demande tendant à voir dire inopposable à la banque l’acte de donation du 31 mars 2015; que de ce chef le jugement déféré sera confirmé.

Référence: 

- Cour d'appel de Besançon, 1ère chambre, 7 janvier 2020, RG n° 18/01234