Inscription à notre newsletter

Recevez toutes les informations importantes directement dans votre boite mail. Cliquez ici

Partager cette actualité
Le 04 juillet 2019

Suivant acte sous signature privée en date du 1er février 2009, Mme C Y a donné à bail à M. E X un logement situé […], moyennant paiement d’un loyer mensuel de 850 euro, indexé, outre une provision pour charges.

Par acte d’huissier en date du 26 août 2015, M. X, Mme F A, son épouse et Mme D Z ont fait assigner Mme Y, leur propriétaire, devant le Tribunal d’instance de Montreuil Sur Mer, afin d’obtenir la désignation d’un expert afin d’évaluer les désordres affectant l’immeuble et d’évaluer leur préjudice, et de dire les moyens d’y remédier et le coût à prévoir.

M. X et Mme A demandent à la cour de condamner Mme Y à leur verser diverses sommes au titre de leurs préjudices et en restitution du dépôt de garantie, et de la débouter de ses demandes.

Aucune demande en paiement n’a été formulée par M. X et Mme A, locataires, dans l’assignation initiale ni lors de l’audience de plaidoirie du 28 janvier 2016.

Le jugement du 22 mars 2016 a accueilli la demande d’expertise, M. X et Mme A n’en ont pas fait appel.

Aucune demande n’a été formulée par M. X et Mme A devant le premier juge suite au dépôt du rapport d’expertise.

Les demandes qu’ils forment devant la cour d’appel ne sont destinées ni à opposer compensation, ni à faire écarter les prétentions adverses ni à faire juger les questions nées de l’intervention d’un tiers, ou de la survenance ou de la révélation d’un fait depuis le jugement entrepris.

En l’absence de demande devant le premier juge, ces prétentions ne peuvent être qualifiées d’accessoire, de conséquence ou de complément nécessaire.

M. X et Mme A étant demandeurs à l’instance, ces demandes ne peuvent non plus constituer des demandes reconventionnelles au sens de l’art. 567 du code de procédure civile

Elles seront donc déclarées irrecevables comme nouvelles.

Mais, sur les demandes de dommages et intérêts formées par Mme Y au titre des frais de remise en état :

L’expert judiciaire, dont le rapport a été déposé en septembre 2016, relève que les importantes traces noirâtres dans les WC sont consécutives à un important phénomène de condensation essentiellement lié à l’absence de renouvellement d’air dans les différentes pièces, qu’une partie des fenêtres ne s’ouvrait plus en raison de leur vétusté, qu’il existait des infiltrations provenant des menuiseries du rez-de-chaussée, notamment de la porte fenêtre gauche de la pièce principale, générant des dommages au parquet (prolifération d’un champignon de type lignivore) ainsi qu’au droit de la salle de bains, liées à des fuites d’eau consécutives au défaut d’étanchéité des appareils sanitaires, que l’importante condensation était aggravée par l’absence d’isolation thermique mais également par des négligences de la part des occupants de cet immeuble, notamment quant à la fuite d’eau constatée dans la cuisine au niveau de l’arrivée d’eau principale de l’immeuble, que les eaux usées provenant de la cuisine ne sont pas raccordées au tout à l’égout, que l’affaissement au droit du puits des pertes est consécutif à la vétusté et que le réseau électrique, qu’il qualifie de 'moyenâgeux’ à plusieurs reprises, n’est pas conforme à la norme C 15-100. L’expert souligne par ailleurs que le défaut de chauffage a pu aggraver l’état du bâtiment, que l’état de l’installation électrique entraîne un risqued’incendie et chiffre les travaux nécessaires à la remise en état du bâtiment à la somme de 67710,80 eur. Il estime que les locataires, n’ayant pas entretenu les joints de la baignoire, sont responsables de la fuite d’eau dans la salle de bain, à l’origine du développement de la mérule, et chiffre leur part dans la reprise des désordres à hauteur de 12131,45 euro.

Cependant, M. X et Mme A produisent une lettre recommandée avec demande d’avis de réception reçue le 12 février 2011, qui fait état de la nécessité de procéder au remplacement du siphon de la cuisine, 'toujours pas fait trois mois après’ et de la présence de nombreux champignons dans les murs en raison des infiltrations d’eau. Le défaut d’information du bailleur sur l’existence de fuites, tel que retenu par l’expert sur le fondement des déclarations de Mme Y, n’est donc pas avéré.

Une autre lettre recommandée avec demande d’avis de réception, dont la date est illisible, a été adressée par M. X et Mme A et souligne de nouveau la présence de moisissures ainsi que l’état de vétusté des fenêtres.

Mme Y a également été informée des désordres existants dans l’immeuble par une lettre du Service actions sanitaires datée du 10 mars 2011 et adressée par lettre recommandée avec demande d’avis de réception et M. X et Mme A ont mis Mme Y en demeure de réaliser les travaux par une lettre du 8 juin 2011, dont l’avis de réception a été signé le 11 juin 2011.

Mme Y a donc été à de multiples reprises informée des désordres existants.

Par ailleurs, M. X et Mme A produisent une lettre d’une entreprise de chauffage, datée du 21 octobre 2011, adressée à Mme Y, dont il ressort que l’entretien de la chaudière n’a pu être réalisé en raison du très mauvais état de celle-ci et du caractère insalubre de l’installation.

Mme Y a procédé en 2011 au changement du ballon d’eau chaude et de la chaudière mais aucun autre travaux n’a été engagé avant la procédure judiciaire, et elle ne peut sérieusement soutenir avoir réalisé des travaux de sécurisation électrique en 2011 au regard des constatations de l’expert.

Contrairement aux allégations de Mme Y, l’expert ne relève pas que toutes les arrivées d’air sont obturées par M. X et Mme A, seule celle de la cave étant concernée. Il évoque au contraire la nécessité de mettre en place une ventilation mécanique contrôlée ou une ventilation mécanique répartie, la nécessité d’assurer des entrées d’air au droit des menuiseries extérieures des pièces sèches, de procéder au détalonnage des portes, et la nécessité de mettre en oeuvre un isolant thermique dans l’ensemble de l’immeuble et de reprendre les fenêtres fuyardes.

Les photographies de fenêtres ouvertes, ni localisées ni datées, ne sont pas de nature à remettre en cause la vétusté de celles-ci telle que relevée par l’expert.

S’il appartient au locataire d’entretenir l’immeuble loué, il lui est néanmoins impossible d’entretenir correctement un immeuble vétuste et, dans un tel cas, il ne peut pas lui être reproché le fait qu’un manque d’entretien aggrave cette vétusté alors qu’il appartenait au propriétaire de réaliser les travaux de nature à y remédier.

Le jugement sera donc infirmé en ce qu’il a condamné M. X et Mme A au paiement des travaux de réfection de la salle de bain, de traitement des champignons lignivores, de la déshumidification, de l’installation du chantier et des frais de maîtrise et Mme Y sera déboutée de ces chefs de demande.

Référence: 

- Cour d'appel de Douai, Chambre 8 section 4, 13 juin 2019, RG n° 18/01014