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Le 14 mars 2020

 

Conformément à l’art. 954 al 3 du Code de procédure civile, la cour ne statue que sur les prétentions énoncées au dispositif des conclusions. L’article 910-4 ajoute qu’à peine d’irrecevabilité relevée d’office, les parties doivent présenter, dès les conclusions mentionnées à l’article 908, l’ensemble de leurs prétentions sur le fond. M. A en déduit justement que la disposition du jugement déclarant les époux X irrecevables en leur action en revendication de la propriété d’une parcelle de terre au profit de la Commune de Miniac-Morvan est définitive, n’ayant pas été critiquée dans le dispositif des premières conclusions des appelants.

En toute hypothèse, la cour n’est saisie, par le dispositif des conclusions des appelants, que d’une demande de condamnation à dommages-intérêts et d’une demande de retrait de la clôture litigieuse. Cette seconde demande est fondée sur le fait que cet ouvrage serait érigé en violation des droits de propriété de la commune de Miniac-Morvan, ce qui constitue un moyen au soutien de la prétention et non une action en revendication de propriété exercée au nom de la dite collectivité.

Il importe peu dès lors que la disposition du jugement portant sur l’irrecevabilité d’une action en revendication de propriété exercée au nom d’un tiers ne soit plus critiquable devant la cour. En effet, la demande de retrait de la clôture formée par les époux X n’en reste pas moins recevable. Il leur incombe néanmoins de justifier du bien-fondé de cette prétention en apportant la preuve que l’implantation de cette clôture est constitutive d’une faute leur causant un préjudice, M. A n’ayant pas à apporter la preuve contraire.

Un bornage amiable de la limite séparative Nord-Ouest de la parcelle […] de M. A et du domaine privé de la commune a été effectué le 29 septembre 2015, le procès-verbal de bornage ayant été signé par toutes les parties et une borne A fixant cette limite ayant été apposée, de sorte que contrairement à ce qui est soutenu, ce bornage est définitif. Il est ainsi établi que le chemin rural a, au droit de la propriété des époux X, une largeur de 4 mètres. Par ailleurs, les différents plans cadastraux communiqués révèlent que le chemin rural possède une largeur constante dans sa partie longeant la parcelle […], d’un côté, et les maisons édifiées sur sa limite Ouest, de l’autre. Enfin le 18 avril 2017, le maire de la commune a signé un nouveau plan de bornage amiable portant sur l’implantation des bornes B et C dans l’alignement de la borne A, lequel vaut reconnaissance de la limite de la propriété de M. C A sur la portion de la parcelle […] longeant le chemin rural dont la largeur de 4 mètres est ainsi confirmée sur toute cette portion. L’arrêté d’alignement obsolète invoqué par les époux X est inopérant dès lors qu’il avait été pris à tort, le chemin litigieux n’étant pas incorporé dans le domaine public de la commune, et qu’il n’avait au demeurant pas vocation à délimiter la propriété de la parcelle litigieuse.

Enfin aucune décision judiciaire, ni aucun acte juridique n’ont consacré l’acquisition par usucapion, par la commune, d’une partie de la parcelle de M. A. Or l’acquisition par usucapion n’existe qu’autant qu’un titre l’établit, titre qui au demeurant n’aurait pu être obtenu que par le possesseur, à charge pour lui de justifier d’une possession trentenaire exempte de vices et à titre de propriétaire, possession qu’il a au contraire démenti en admettant la propriété de M. A sur le fonds litigieux dans le cadre des opérations de bornage.

Il se déduit de ces éléments que la clôture de M. A a été édifiée sur sa propriété. Or le code civil accorde à tout propriétaire le droit de clore sa propriété de sorte que l’édification d’une clôture n’est pas en soi fautive et n’engage pas la responsabilité délictuelle du propriétaire du fonds quel qu’en soit le désagrément pour les tiers. En l’espèce, les époux X ne peuvent exiger le bénéfice d’un stationnement sur le chemin rural au droit de leur habitation et détourner ainsi l’assiette du chemin sur le fonds voisin. Ils ne peuvent non plus revendiquer de droits à l’encontre de l’intimé du seul fait que leurs auteurs ont choisi d’implanter leur immeuble en limite d’une voie de circulation étroite. Ils ne justifient donc ni de l’existence d’une faute de M. A, ni d’un préjudice personnel qui lui soit imputable.

L’édification d’une clôture délimitant un fonds ne peut davantage constituer, à défaut de caractéristiques anormales de l’ouvrage, un trouble excédant les inconvénients normaux de voisinage. C’est seulement au cas où la clôture, par sa dimension ou les matériaux utilisés, occasionne un préjudice grave aux conditions d’habitabilité des fonds voisins, par exemple en les privant totalement d’ensoleillement, qu’un trouble anormal de voisinage peut être caractérisé. Tel n’est pas le cas en l’espèce, la clôture légère litigieuse ayant seulement pour objet et pour effet d’empêcher les voisins d’empiéter illégitimement sur la propriété de l’intimé sans affecter l’usage et l’agrément qu’ils peuvent retirer de leurs propres fonds.

C’est dès lors par des motifs exacts et pertinents que la cour adopte que le premier juge a rejeté la demande d’enlèvement de la clôture litigieuse et la demande d’indemnisation des conséquences de son édification.

Référence: 

- Cour d'appel de Rennes, 1ère chambre, 10 mars 2020, RG n° 18/01981