Inscription à notre newsletter

Recevez toutes les informations importantes directement dans votre boite mail. Cliquez ici

Partager cette actualité
Le 09 mars 2019

Il ressort du II de l’article 15 du Code général des impôts (CGI) que les revenus des logements dont le propriétaire se réserve la jouissance ne sont pas soumis à l’impôt sur le revenu. Pour éviter l’application de ce texte, le propriétaire, qui détient des biens locatifs, peut envisager, par l’intermédiaire d’une SCI semi-transparente, de céder la résidence secondaire à cette société civile, qui lui louera le bien. À la suite du transfert de propriété, les travaux seront effectués par la société. L’opération permet ensuite la déduction des intérêts d’emprunt des revenus fonciers et la possibilité de constater un déficit foncier en raison des travaux de rénovation réalisés sur l’immeuble nouvellement acquis.

Ainsi le propriétaire d’une résidence secondaire qui entend effectuer des travaux et qui ne peut pas déduire ces charges de ses revenus fonciers est souvent tenté par l’opération de transfert du bien à "sa" société civile immobilière (SCI).

L’arrêt sous référence est susceptible de refroidir les propriétaires intéressés par une telle opération.

Ici les époux (B) et leurs deux enfants ont constitué ensemble en 1989 une SCI dont l’objet est l’exploitation d’un patrimoine locatif. En 1992, monsieur a fait acquisition d’un immeuble, une vila,  à Biarritz, à titre de résidence secondaire du couple. La SCI a racheté la résidence en 1996 ; elle a été immédiatement louée au couple.

La société civile étant soumise à l’impôt sur le revenu, les époux ont constaté un déficit foncier résultant pour l’essentiel des travaux d’entretien et de rénovation réalisés sur la villa de Biarritz.

Pour l’Administration fiscale, la vente puis la mise en location de la résidence secondaire est constitutive d’un abus de droit au sens de l’art. 64 du Livre des procédures fiscales (LPF). En effet, pour l’Administration, l’opération avait pour but exclusif de faire échec à l’application des dispositions du II de l’article 15 du CGI.

Certes le loyer était effectivement payé par les époux à la société civile immobilière : il ne pouvait donc y avoir abus de droit que s’il était établi que les redevables avaient poursuivi un but exclusivement fiscal, contraire aux objectifs de la loi.

Le Conseil d’État a relevé un ensemble de circonstances établissant la recherche d’un but uniquement fiscal:

– en transférant à la SCI, dont ils détenaient avec leurs enfants la totalité des parts, la propriété de la villa de Biarritz, et en concluant avec cette dernière un bail de location, pour en conserver la jouissance, M. et Mme B ont créé les conditions leur permettant d’imputer sur leur revenu global, en dépit des prévisions du II de l’article 15 précité du CGI et à hauteur de leurs droits dans la société, des charges liées aux travaux engagés dans cette maison ;

– les travaux ont pour l’essentiel été engagés après ce transfert de propriété et financés par des apports personnels de monsieur B depuis son compte courant d’associé dans la SCI alors que le loyer versé correspondait aux échéances de remboursement de l’emprunt contracté pour l’acquisition de la villa ;

– Et en dernier lieu, le montant du loyer perçu par la société contrôlée par les époux correspondait aux échéances de remboursement de l’emprunt contracté pour l’acquisition de la villa, et non à la valeur d’usage de la villa qui avait augmenté de façon importante en raison des travaux réalisés, ce qui établit que la SCI ne s’est pas comportée avec ses associés comme avec des tiers : les époux et la SCI avaient sous-évalué les loyers.

De l’instruction de cette affaire résultait par ailleurs que les époux B détenaient 90 % des parts de cette société et que les 10 % restants appartenaient à leurs enfants et que les même époux ont disposé du bien comme s’ils en étaient les propriétaires occupants et s’étaient de la sorte placés dans une situation offrant les possibilités de sous-estimation des résultats fonciers que le législateur a entendu combattre, cette application littérale allait, comme l’a soutenu l’administration, à l’encontre des objectifs poursuivis par les auteurs des dispositions du II de l’art. 15 du CGI.

Référence: 

- Conseil d’Etat, 9e et 10e chambres réunies, 8 février 2019, req. n° 407.641