Inscription à notre newsletter

Recevez toutes les informations importantes directement dans votre boite mail. Cliquez ici

Partager cette actualité
Le 21 septembre 2006

Nous ne prétendons pas ici donner une analyse exhaustive du Code civil pour les règles relatives aux distances entre voisins ou aux travaux en limite de propriété. Les commentaires et analyses des textes, nos visiteurs les trouveront dans le Code mais aussi dans de nombreux ouvrages spécialisés. L'Office notarial de Baillargues ne "fait" que du droit pratique... Nous donnons simplement quelques exemples de difficultés assez courantes pour lesquelles il y a eu des décisions judiciaires ou des réponses ministérielles Le mur de soutènement Le propriétaire d'un immeuble contre lequel est adossé un jardinet en remblai voulait en obtenir la suppression en arguant des dispositions de l'article 674 du Code civil. Les juges lui ont rappelé que l'article 674 ne vise que certaines constructions particulièrement nocives ou dangereuses pour le voisinage. A priori ce n'est pas le cas d'un jardinet dont il n'a pas été reconnu le caractère nocif ou dangereux, alors même que le jardinier aurait utilisé du purin d'orties. Les juges ont par ailleurs relevé que le jardinet n'était pas la cause des infiltrations dans le mur d'appui dans la mesure où l'humidité dont se plaint le propriétaire avait pour origine une mauvaise exécution des travaux d'extension de son immeuble puisque la partie enterrée du mur n'avait nullement été protégée contre l'humidité, alors que ce propriétaire n'avait pas été empêché de réaliser des travaux appropriés en passant sur la propriété voisine (Cour d'appel de Besançon, 1re chambre civ., 10 juin 1998). Le mur adossé ne respecte pas les distances légales prescrites En application de l'article 674 du Code civil, déjà invoqué dans l'affaire précédente, doit être démoli le mur adossé à l'immeuble voisin, ne respectant pas les distances légales prescrites. La Cour d'appel saisie dit que rendant une partie de l'immeuble voisin inaccessible, le privant d'une vue oblique et empêchant la pose de volets, ce mur est à l'origine d'un trouble possessoire soumis à la compétence du tribunal d'instance (Cour d'appel de Nancy, 2e chambre. civ., 28 juin 2001). Depuis ce texte, une modification législative a eu pour conséquence de rendre le tribunal de grande instance compétent pour l'action possessoire, mais attention, s'il y a désormais identité de juridiction pour l'action possessoire et l'action pétitoire, elles ne doivent jamais se confondre ou se cumuler et la première est soumise à de strictes règles de délai. Les barbecues Il s'agit ici d'une réponse ministérielle. M. Jean-Louis Masson, député, demande à M. le ministre de l'intérieur de bien vouloir lui préciser s'il existe une réglementation particulière concernant les distances d'implantations des barbecues par rapport aux habitants riverains. Dans la négative, le maire peut-il faire usage des ses pouvoirs de police pour fixer de telles distances? Réponse du ministre: L'article L. 2212-2 du Code général des collectivités territoriales confie au maire le soin de veiller au bon ordre, à la tranquillité, à la sécurité et à la salubrité publiques. À ce titre, la prévention des incendies relève de sa compétence. Les pollutions et les troubles de voisinage que la fumée est susceptible de provoquer en relèvent également. Le maire est donc qualifié pour prendre, en cas de besoin, les mesures qui s'imposent pour faire face aux risques et aux nuisances qui s'attachent à l'installation sans discernement de barbecues dans les jardins. Les limitations qui peuvent à cet égard être prononcées doivent cependant être strictement proportionnées à ce qui est indispensable au maintien de la sécurité et de la tranquillité publiques car les exigences de la police municipale doivent se concilier avec l'exercice des libertés et du droit de propriété. C'est pourquoi, une mesure restrictive applicable toute l'année et sur l'ensemble du territoire communal serait vraisemblablement considérée comme illégale, cependant que des mesures ponctuelles, prononcées en fonction des circonstances de temps et de lieu, par exemple la sécheresse et l'orientation saisonnière des vents, pourraient être admises par le juge administratif. La réponse ministérielle, n° 40.913, a été publiée au J.O. A.N., Q 18 novembre 1996, p. 6.045 Le cas des ruches Une autre réponse ministérielle: M. Georges Hage, député, souhaite connaître de Mme la garde des sceaux, ministre de la justice, si des légitimes préventions d'ordre sanitaire et psychologique, confortées par une actualité récurrente, comme les impératifs de sécurité pour le voisinage, ne militent pas pour justifier l'application, à la construction et à la mise en place de ruches, de l'article 674 du Code civil dont le caractère non limitatif de ses dispositions a été reconnu par la doctrine et la jurisprudence. Réponse de la ministre : La garde des sceaux, ministre de la justice, fait connaître à l'honorable parlementaire que la construction et la mise en place des ruches, font l'objet d'une législation spécifique, codifiée aux articles L. 211-6 et L. 211-7 du Code rural. Ces articles disposent notamment que les préfets déterminent la distance à observer entre les ruches d'abeilles et les propriétés voisines ou la voie publique, sans préjudice de l'action en réparation, s'il y a lieu. Par ailleurs, les maires doivent prescrire aux propriétaires de ruches toutes les mesures qui peuvent assurer la sécurité des personnes, et aussi la préservation des récoltes et des fruits. Les maires doivent également se substituer au préfet dans le cas où celui-ci n'aurait pas exercé sa compétence en la matière. Cette réponse ministérielle, n° 68.588; J.O. A.N., Q 24 décembre 2001, p. 7.460 Ce n'est pas parce que l'on bénéficie d'une servitude ou que la loi le permet que l'on peut priver son voisin de l'ensoleillement Le bénéfice et l'usage d'une servitude n'excluent pas l'existence d'un trouble de voisinage (plusieurs décisions le rappellent). La question qui se pose en pareille matière est celle du comportement du titulaire de la servitude, donc de déterminer si, par son comportement, ce titulaire n'a pas aggravé la servitude, créant ainsi un "inconvénient excessif" (Cour de cassation, 3e Chambre civ., 26 juin 1996). Il en est de même quant au respect des normes légales de voisinage: Des arbres plantés à distance légale au sens des articles 671 et 673 du Code civil peuvent être la source de troubles, anormaux et/ou excessifs (Cour d'appel de Reims, 4 juillet 1996). A l'inverse, ne constitue pas un trouble de voisinage la privation d'ensoleillement consécutive à la croissance d'arbres, dès lors que ceux-ci sont plantés à des distances légales et surtout que cela ne présente pas de caractère excessif ou anormal (Cour d'appel d'Angers, 1re Chambre A, 16 janv. 1996). Aussi c'est le résultat qu'il y a lieu de prendre en considération et non pas le fait de savoir si les normes ont été respectées ou non, ou si le défendeur était titulaire d'une servitude. Par ailleurs l'aspect subjectif des rapports entre voisins l'emporte sur les règles légales de la contiguïté foncière. Quand les thuyas sont plantés pour nuire au voisin Et autres troubles anormaux de voisinage... Une décision assez récente de la Cour d'appel de Bourges (Chambre civ.) du 16 mars 2006 est intéressante pour le principe. La cour dit que c'est à bon droit que les premiers juges (TGI) ont admis l'existence d'un trouble anormal de voisinage après la pose d'une palissade et la plantation d'une haie de thuyas en retrait de la palissade. La cour confirme le jugement qui a relevé que les installation et plantation ne relevaient pas d'une nécessité actuelle, mais d'une volonté de nuire au voisin bénéficiant d'une vue panoramique sur la vallée de la Loire, laquelle vue a été grandement obturée par la palissade et l'aurait été à brève échéance par les thuyas. En conséquence, l'intéressé a été condamné sous astreinte à procéder à l'enlèvement des thuyas et au retrait de la palissade. Une autre décision avait confirmé le jugement ayant ordonné au propriétaire de peupliers et saules de se conformer aux dispositions de l'article 671 du Code civil. Car, s'il produit un rapport de visite d'un expert agricole ne donnant au surplus qu'une estimation approximative de l'âge des arbres, qui n'est d'ailleurs peut-être pas celui de leur plantation à leur emplacement actuel, trois attestations attestent que lesdits arbres ont été plantés depuis moins de trente ans. D'autres troubles de voisinage anormaux ou pas ont été relevés par une décision de la Cour d'appel de Chambéry. Voir sur le site Juris Prudentes: [Bambou,cognassier, coq et poulailler->http://www.jurisprudentes.org/bdd/actu_article.php?id_article=3157] Sur notre site, nous avons commenté un autre arrêt où une construction pourtant régulièrement construite, en vertu d'un permis, a été reconnue comme entraînant un trouble anormal de voisinage au voisin qui se plaignait de la perte de toute intimité (Rubrique PUBLICA). Vues ou souffrances, hauteurs Par un arrêt du 12 octobre 2005, la Cour d'appel de Paris (Chambre 2, sect. A) a jugé que des ouvertures équipées de châssis ouvrants basculants avec vitrage clair, protégées à l'extérieur par des barreaux, et qui sont pratiquées à une hauteur de 2,20 m supérieure à la distance légale (19 décimètres), ne peuvent être qualifiées de vues qui sont caractérisées par la possibilité de regarder sans effort particulier, de manière constante et normale sur le fonds voisin. Il importe peu dès lors que ces ouvertures qui servent à l'aération et à l'éclairage comportent des vantaux ouvrants et des verres transparents. Ces ouvertures doivent être qualifiées de jour de souffrance relevant de la tolérance et non créateurs de droit. Les jours de souffrance ne bénéficiant d'aucune protection légale et n'ouvrant pas d'action contre le voisin, le propriétaire du fonds dominant a été à bon droit débouté de sa demande de démolition de la construction ayant obturé les ouvertures. Mais, ajoute la Cour, l'acte de construire, effectué de façon régulière et sans faute, ouvre droit à une action en dommages et intérêts s'il cause à autrui un trouble de voisinage excédant les inconvénients normaux. La suppression, même d'un simple jour de souffrance apportant la lumière naturelle est constitutive d'un trouble excessif dès lors qu'elle affecte une pièce principale, soit une chambre. La victime a donc droit à réparation (fixée - les dommages et intérêts - compte tenu de la spécificité des ouvertures en cause et des récupérations possibles de sources d'éclairement secondaire à 20.000 euros). A noter, après le rappel de cette décision, que la suppression d'une vue sur le domaine voisin, résultant d'une ouverture irrégulièrement pratiquée, peut être opérée par l'obturation à l'aide de briques translucides (Cour d'appel d'Aix-en-Provence, 4 novembre 1965). Mais la 3e Chambre civ. de la Cour de cassation (arrêt du 28 juin 2000, pourvoi n° 98-14.070) rappelle que le propriétaire d'un mur non mitoyen, joignant immédiatement l'héritage d'autrui, peut pratiquer dans ce mur des jours ou fenêtres à fer maillé et verre dormant: ces fenêtres doivent être garnies d'un treillis de fer, dont les mailles auront un décimètre d'ouverture au plus, et d'un châssis à verre dormant; les fenêtres ou jours ne peuvent être établis qu'à vingt-six décimètres au-dessus du plancher ou sol de la chambre qu'on veut éclairer, si c'est à rez-de-chaussée, et à dix-neuf décimètres au-dessus du plancher pour les étages supérieurs. Toutefois, pour débouter la voisine de sa demande tendant à la mise en conformité avec les prescriptions des articles 676 et 677 du Code civil, de la baie vitrée aménagée par les époux P dans le mur pignon de l'habitation qu'elle leur avait vendue, jouxtant la cour restant lui appartenir, l'arrêt de la cour d'appel attaqué retient que les mesures ordonnées en première instance suffisent à supprimer la vue irrégulière et à préserver l'intimité du voisin, et que les époux P ont mis en place les aménagements nécessaires, conformes aux prescriptions du jugement, en faisant poser un vitrage grillagé et opaque qui transforme la baie en jour de souffrance. La Haute juridiction dit qu'en statuant ainsi, tout en se référant aux procès-verbaux de constat d'huissier, que l'ouverture litigieuse prenait la place d'une porte anciennement obturée, située au rez-de-chaussée, la cour d'appel, qui n'a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations, touchant à la hauteur à laquelle se trouvait la base de cette ouverture, a violé les textes susvisés. Référence principale: [- Code civil->http://www.legifrance.gouv.fr/WAspad/UnCode?commun=&code=CCIVILL0.rcv]